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Le Ministre Ange Antoine Abena est rentré de la 28è Session du CAMES à Libreville

Il est difficile d’imaginer plus piètre orateur qu’Ange Antoine Abena, Ministre de l’Enseignement Supérieur dont on a vu la triste prestation rhétorique ce vendredi 15 avril à son retour de Libreville où il a assisté à la 28ème session ordinaire du CAMES.

Structure molle

Le Chemin d’Avenir, fatigue , elle est, elle-même fatiguée, ses animateurs fatiguent, ils sont tous fatigués. Ceux qui ont suivi Télé Congo ce vendredi se sont fait une idée de la nonchalance des représentants du pouvoir congolais. Fatigue due au voyage ou état d’être général d’un personnel politique à la mollesse congénitale ? Le camarade ministre Ange Antoine Abena semble la meilleure illustration de cette paresse politique nationale.

Chose vue à la télé

Ange Antoine Abena, vautré dans un fauteuil, suivant un rituel immuable, a subi la petite avalanche de questions de journaliste comme le coup de grâce après le calvaire d’un colloque sur l’Université qui a duré trois jours et auquel ont assisté des experts et des ministres des pays membres du CAMES. Autant dire que la puissance intellectuelle dégagée durant cette réunion de plusieurs intelligences n’avait rien à avoir avec les travaux classiques du Comité Central et autre Bureau Politique du PCT auxquels est habitué le camarade ministre et où on se caresse dans le sens du poil sur fond d’allégeance au camarade Sassou.

« Tu mangeras à la sueur de ton front » dit La Bible. On ne peut pas en dire autant de ce ministre de l’Enseignement Supérieur qui a donné des signes de fatigue inquiétants. Si Ange Antoine Abena transpire durant l’interview, la sueur qui ruisselle sur son visage est loin d’être le fruit d’une réflexion intellectuelle intense. Cet homme illustre l’inertie cognitive.

Abacost : grotesque accoutrement

Littéralement affalé dans un canapé A.A.A (appelons-le ainsi) porte un abacost dont les trois premiers boutons à partir du col ne sont pas mis. Du coup le torse est nu. Ca fait « débraillé  » tout ça. AAA n’a même pas enfilé de T-shirt en guise de maillot de corps. Un « contre-sueur » à la "Gbgagbo" eut été plus décent. Mais il se trouve que la veste "à même le corps" est de rigueur sous Sassou. Il paraît que ça doit se porter comme ça : directement sur la peau ; un sacrilège pour les sapologues. On prendrait ces ministres et ces députés pour des cinglés avec cet accoutrement que plus personne en RDC ne porte depuis la disparition de son patron : Mobutu Sésé Séko, panafricaniste milliardaire. Curieusement, le PCT, (à commencer par Sassou) a récupéré bagage idéologique, mœurs dissolues, kleptomanie, coutumes et costumes de l’ancien dictateur zaïrois. Toute honte bue. Au Congo, on porte l’abacost du sommet de l’Etat (son Président) à la base (l’agent de nettoyage).

Petite forme

Donc notre ministre est rentré de Libreville, groggy. L’Etat congolais est violent, son personnel amorphe. Ainsi sont les dictatures : plus le système est rigide, plus la pensée est molle.

K.O debout, le malheureux haut fonctionnaire a un débit oratoire très lent, trop lent ; le niveau de la voix faible. Ce ministre des études supérieures est visiblement dans sa plus petite forme quand il descend de son avion. S’agit-il seulement d’un cas particulier ? Permettez qu’on en doute. Quand on analyse un corpus des interviews données par les agents politiques du PCT, d’Oba Apounou à Sassou, en passant par Obami Itou, Henri Djombo et le ci-nommé A.A.A, le débit oratoire est mou, le propos confus, le verbe diffus, le coq à l’âne récurrent, le regard du locuteur absent. Cet homme aurait besoin d’un orthophoniste si ce métier existait au Congo.

Illustration

Voici un échantillon du bref échange entre la presse et le ministre : « Que s’est-il passé au CAMES ?  » demande le journaliste. Réponse du ministre : « on a discuté  ». Mais encore ? On a changé le bureau du CAMES. Soit. Ensuite ! « On a parlé de la violence dans les universités ».

On vous épargne les blancs dans le discours, les « heu… » et autres tics de langage qui alourdissent l’intelligibilité du propos en général.

Ange Antoine Abene cherche ses mots. On se demande pourquoi a-t-il choisi de répondre aux questions de la presse alors que l’exercice semble l’ennuyer et les compétences requises pour une bonne interview lui font cruellement défaut. Ces hommes adorent tellement les media et les projecteurs de la célébrité que la peur du ridicule ne les effraie plus. "Le ciel ne tombera pas" disent-ils pour justifier leur audacieuse médiocrité.

Ce que parler veut dire

Le passage à la télé quand on ne s’y est pas préparé est politiquement mortel. Sauf, bien sûr au Congo, où la télé unique a imposé le cafouillage langagier comme modus vivendi.

Quand P. Bourdieu écrit « Ce que parler veut dire », il veut dire que selon ce qui se dit, selon le statut de celui qui parle, selon le canal qu’il utilise, le message n’est pas reçu de la même manière par celui qui l’écoute.

Ministre de l’Enseignement Supérieur, monsieur Ange Antoine Abena, on le suppose, est doté d’un capital culturel qui le positionne en bonne place dans le champ intellectuel. Après une session parmi des collègues universitaires au Gabon, on s’attendait à une prestation de très haut vol de la part d’AAA. Malheureusement, la montagne a accouché d’une souris. Les platitudes ont succédé à des inepties. Tout universitaire soit-il, Abena ne sait pas parler. Rendons-lui justice : dans la classe politique, ce n’est pas le seul minable locuteur. Quand A.A.A. parle, il ne sait pas ce qu’il dit et, ce qu’il dit ne dit pas grand chose de ce qu’il a vu à Libreville, au CAMES. Or "ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément". (Boileau). Abena a affiché une confusion mentale. Etait-il réellement à Libreville ?

En vérité, Ange Antoine Abena comme son collègue de la Santé qui n’arrive pas à réparer un ascenseur de l’hôpital général de Brazzaville est un cornichon.

Fort heureusement, il n’y avait pas que des patates et des cornichons à la session de Libreville.

« Nous avons de très brillants Universitaires en Afrique, mais force est de constater que nous n’avons pas de très brillantes Universités. Comment devons- nous faire ? C’est cela l’approfondissement que nous devons poursuivre au niveau du CAMES pour qu’en plus des brillants universitaires, nous ayons des brillantes universités et de brillants centres de recherches capables de (…)compétitir au plan international  », a déclaré Séraphin Moundounga, Ministre gabonais de l’Enseignement Supérieur.

Ce n’est pas terrible comme réflexion que celle du ministre gabonais, mais c’est mille fois mieux que le minable compte-rendu qu’a livré à la presse le nommé Abena, compte-rendu qui a pour conséquence de le disqualifier d’emblée en tant que homo academicus car on suppose que, comme tout ministre de l’Enseignement Supérieur sous Sassou, il est forcément prof d’université.

Qu’est ce que le CAMES (Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur) ?

Il s’agit d’un lieu de validation des diplômes des différentes universités africaines. Il est au monde des chercheurs africains ce que le CNRS est à la recherche en France : une autorité scientifique et un espace d’authentification du logos.

On a tous compris qu’habituées au népotisme et aux trafics d’influence de tout genre, les Universités africaines, en l’occurrence l’université Marien Ngouabi du Congo, sont soumises par le CAMES à un contrôle arbitral indépendant pour une meilleure compétitivité sur le plan international.

C’est parfois avec effroi qu’on constate que l’université de Brazzaville est un désert culturel et les universitaires (pour la plupart accumulant des fonctions ministérielles) des tonneaux vides. Il suffit de les entendre parler pour comprendre qu’il y a un gouffre entre les diplômes dont ils sont porteurs et la structure de leur tête. "Tête bien faite vaut mieux que tête trop pleine" (Montaigne) Tête mal faite, tête vide.

Rapports de force

Dans les coulisses de la Fac se narre l’anecdote d’un Ministre de l’Education, chef de département de sociologie à Marien Ngouabi. Ses travaux ne furent pas reçus au CAMES qui siégea à Dakar pour le grade de Maître de Conférences. En revanche un collègue dont les recherches furent validées ne put accéder au poste de Chef de département à la Fac. Grâce à une savante conspiration, celui qui ne fut pas reçu au grade de Maître de Conférences conserva néanmoins la tête du Département de Sociologie parce que sa fonction de ministre le positionnait près du pouvoir de Mpila avec tous les abus dont ce pouvoir est capable sous les stimuli du Chemin d’Avenir.

On peut dire qu’il a beau être une superstructure transversale aux Etats, le CAMES a des limites face aux conflits d’intérêts en vigueur dans nos républiques bananières façon Congo-Brazzaville.

En fait de violence à l’Université, elle émane du système lui-même fondé, entre autres rapports de force, sur le droit de cuissage, le harcèlement sexuel, le marchandage des notes, la délation politique, l’infiltration policière etc.

Université à l’envers

L’entretien d’une mollesse indescriptible qu’a donné Ange Antoine Abena ne pouvait pas être le moteur d’une réflexion de très haute portée analytique. Car l’Université congolaise (disons l’école en général) est malade. Les vieilles structures héritées de la colonisation ( Bayardelle et l’ENS) ne répondent pas aux normes d’une Université du 21 è siècle. C’est par pure mauvaise foi que le Congo continue de payer ses cotisations au CAMES puisqu’en fait d’Université, ce pays gère des ruines.

Le bonhomme que la chaîne unique de Télévision a montré est à l’image d’un bédouin fatigué à force de marcher dans un sahel culturel.

Comment s’étonner que l’Université soit extrêmement malade quand celui qui la porte sur ses épaules est exténué comme un docker à la pause de midi ?

Le Congo, à l’image d’Ange Antoine Abene, est asphyxié. Il a besoin d’un nouveau souffle. Si vous voyez ce que ça veut dire...

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