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Les dirigeants arabes ravissent la vedette au Sommet du G8

Publié sur le web le 16 Juin 2004

Les relations de l’Afrique avec le monde développé se réduisent à une politique de la main tendue de la part du continent, estime l’activiste de la société civile kényane Edward Oyugi. Mais, les dirigeants africains soutiennent qu’ils ont un partenariat avec les nations riches - qui est basé sur l’investissement en échange de la bonne gouvernance.

L’affirmation a fait encore l’objet de discussions la semaine dernière pendant une réunion du Groupe des huit (G8) - une association des économies les plus puissantes du monde.

Le groupe comprend les Etats-Unis, l’Allemagne, l’Italie, la France, la Grande-Bretagne, le Canada, le Japon et la Russie.

Le président sud-africain Thabo Mbeki, avec cinq collègues d’autres parties du continent, étaient également impliqués dans les discussions - qui se sont déroulées dans la luxueuse station balnéaire de Sea Island, située au large de la côte de l’Etat américain de Georgie. Ce qu’ils ont ramené de la rencontre a été un projet dans lequel le G8 s’engage à aider à la formation et à l’équipement de quelque 75.000 soldats de maintien de la paix et de policiers d’ici à 2010 - agents qui seront déployés pour satisfaire les besoins sécuritaires en Afrique.

Ils sont également sortis avec un appel des dirigeants du G8 exhortant les Nations Unies à arrêter le carnage dans la région du Darfour, dans l’ouest du Soudan, où des milices arabes pro-gouvernementales se livrent à une campagne d’épuration ethnique contre les Africains noirs.

"Nous comptons sur les Nations Unies pour prendre la tête d’un effort international en vue d’éviter un désastre majeur et nous travaillerons ensemble pour atteindre cet objectif", ont indiqué les dirigeants dans une déclaration.

Toutefois, le régime islamique au Soudan affirme que l’Occident doit être blâmé pour l’agonie du Darfour.

S’adressant à environ 300 intellectuels soudanais et égyptiens dans la capitale égyptienne, le Caire, le 10 juin, le premier vice-président Ali Osman Tahaa a déclaré que le Soudan avait été privé de millions de dollars par des sanctions économiques.

Ce blocage de financement, a-t-il ajouté, avait empêché le développement du Darfour, prédisposant ainsi la région à un conflit.

Les sanctions ont été imposées après que le président Omar Bashir, arrivé au pouvoir suite au renversement du gouvernement élu du Premier ministre Sadek al Mahdi en 1989, a permis au Soudan de devenir un refuge pour des terroristes islamistes comme Osama ben Laden. L’Union européenne a accepté le 10 juin de donner 12 millions de dollars pour soutenir le déploiement rapide d’une force de maintien de la paix de l’Union africaine (UA) au Soudan.

L’UA a également annoncé des plans pour envoyer 90 observateurs au Darfour, tandis que Mbeki est en train de dépêcher 10 officiers haut-gradés de l’armée dans la région. Mais, "on ne sait pas exactement de quelle efficacité 90 observateurs - 60 militaires et 30 civils - feront preuve dans une région de la taille de la France, où des assassinats et des viols quotidiens sont toujours en train d’être signalés", a indiqué Amnesty International dans un communiqué il y a quelques jours.

L’UA et l’ONU disposent déjà de soldats de maintien de la paix dans certains pays africains comme la Sierra Leone, la République démocratique du Congo, la Côte d’Ivoire et le Burundi.

Les dirigeants du G8 ont également dit qu’ils étendraient l’Initiative des pays pauvres très endettés (PPTE), qui devrait prendre fin cette année, jusqu’à la fin de 2006.

En outre, ils ont demandé aux scientifiques d’accélérer le développement d’un vaccin anti-SIDA. Des chercheurs australiens sont actuellement en train de tester un vaccin qui contrôle la quantité de VIH chez les personnes vivant avec le virus, en renforçant leurs systèmes immunitaires. Washington a promis de donner 500 millions de dollars pour financer cette recherche.

C’est une bonne nouvelle pour un continent où quelque 26,6 millions de personnes ont contracté le VIH - et où environ 3,2 millions de nouvelles infections sont survenues l’année dernière seulement, selon le Programme conjoint des Nations unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA).

Toutefois, le degré d’attention accordée à l’Afrique est devenu plus clair lorsque Mbeki a dit aux journalistes que les leaders africains avaient passé seulement deux heures avec leurs homologues du G8. Des contraintes de temps les ont empêchés de discuter d’autres questions d’importance, a-t-il ajouté.

Tout compte fait, le Moyen-Orient semble avoir ravi la vedette. Durant le sommet, le président américain George W. Bush a rencontré le nouveau dirigeant de l’Irak - Ghazi al-Yawar - et le roi Abdullah Hussein de Jordanie. Pendant les discussions, Bush a, une fois encore, présenté sa vision de l’exportation de la démocratie au Moyen-Orient, en utilisant l’Irak comme un tremplin.

Mbeki a été invité à Sea Island avec les présidents Abdelaziz Bouteflika de l’Algérie, John Kufuor du Ghana, Olusegun Obasanjo du Nigeria, Abdoulaye Wade du Sénégal et Yoweri Museveni de l’Ouganda.

C’est la quatrième année consécutive que des dirigeants africains ont été invités à la très importante rencontre, dans le contexte du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).

Des universitaires africains et des activistes de la société civile ont remis en cause l’engagement de l’Occident vis-à-vis du NEPAD, qui propose la bonne gouvernance de la part des Etats africains en échange d’investissements. Selon eux, le continent devrait plutôt améliorer son système de perception de taxes pour mobiliser par an les 64 milliards de dollars que le NEPAD recherche auprès du G8.

D’autres ont également critiqué les dirigeants africains pour n’avoir pas engagé suffisamment leurs citoyens dans le NEPAD.

"C’est un rêve des dirigeants africains qu’ils ont refusé de partager avec les populations africaines. Ils se sont plutôt hâtés de le partager avec des étrangers qui ne veulent pas le bien de l’Afrique", a affirmé Oyugi à un atelier organisé par le Forum et le réseau africains sur la dette et le développement (AFRODAD), à Pretoria, la capitale sud-africaine, à la fin du mois dernier.

En mai, un groupe de représentants d’entreprises africaines, se réunissant à Maputo, au Mozambique, s’était plaint du manque d’information sur le NEPAD. Ils ont également mis l’accent sur le fait que pas une seule société n’avait investi dans aucun des 20 projets identifiés par le NEPAD pour relancer la croissance sur le continent.

Moyiga Nduru

http://fr.allafrica.com/

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