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Niger : deux journalistes condamnés à 18 mois de prison ferme

NIAMEY (AFP) - Le directeur de publication et un journaliste de l’hebdomadaire privé nigérien Le Républicain ont été condamnés vendredi à 18 mois de prison ferme pour "propagation de fausses nouvelles et diffamation" par le tribunal correctionnel de Niamey.

Le juge Moussa Chaibou a également condamné Mamane Abou et Oumarou Keita à 300.000 francs CFA (environ 460 euros) d’amende et 5 millions de FCFA (7.620 euros) de dommages et intérêts chacun.

Dans son réquisitoire, le procureur de la république avait réclamé « un an de prison ferme » contre les deux prévenus pour « propagation de fausses nouvelles » et « six mois de prison ferme » pour « diffamation » après la publication le 27 juillet d’un article reprochant au Premier ministre Hama Amadou, « de lâcher l’Occident pour l’Iran ».

« Il s’agit du plus grand scandale politico-judiciaire que ce pays ait connu depuis des années », a déclaré à l’AFP Me Moussa Coulibaly, un des avocats des journalistes.

Pour Abdoulaye Masaalatchi, président de l’Union des journalistes privés nigériens (UJPN, syndicat), « il s’agit là d’une parodie de procès ».

« Notre justice est à l’envers et je m’inquiète pour toutes les libertés au Niger, pas seulement la liberté de la presse », a-t-il ajouté.

Quatre jours après l’arrestation de MM. Abou et Keita, leurs avocats avaient déposé un recours en exception devant une Cour d’appel de Niamey.

Ces derniers considèrent que « la procédure de flagrant délit ne peut être appliquée au délit de presse et que le juge Chaibou est incompétent pour juger un délit d’opinion », qui doit être jugé par une cour civile et non un un tribunal pénal, a rappelé Oumarou Salaye l’autre avocat des journalistes.

En attendant la décision de la Cour d’appel le 11 septembre, Mamane Abou a été conduit dans un centre de détention de Téra, à 160 km à l’ouest de Niamey et Oumarou Keita à Filingué, à plus de 180 km au nord de la capitale.

Généralement considéré comme un proche du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS), principale formation de l’opposition nigérienne, M. Abou avait indiqué à l’AFP peu après leur arrestation qu’au delà de l’article incriminé, il avait le sentiment d’être dans le collimateur du régime.

Selon lui, les autorités avaient notamment très mal perçu la publication début juin par l’hebdomadaire d’un rapport d’audit confidentiel de l’Union européenne faisant état de « malversations » sur des fonds européens destinés au secteur de l’éducation.

Quelques semaines plus tard, le président Mamadou Tandja avait été contraint de limoger deux de ses ministres ayant eu en charge le portefeuille de l’Education nationale durant la période concernée.

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