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Qui a pris en charge le voyage de Kolelas ?

L’Etat congolais n’aurait pas financé l’évacuation sanitaire de Mme Kolélas à Paris

Une polémique est en train de naître sur la véracité de la prise en charge du voyage du couple Kolélas par l’Etat congolais. Aucun des deux camps (Mpila et le MCDDI) ne confirme ou ne dément officiellement. Du coup, les spéculations vont bon train. (La photo en médaillon représente l’hôpital St-Louis à Paris).

La présidence du Congo n’aurait pas financé l’évacuation sanitaire de Jacqueline Kolélas l’épouse de l’ancien maire de Brazzaville. C’est ce qui ressort en tout cas des propos recueillis auprès des proches de l’opposant congolais. Joints au téléphone, ceux-ci n’ont pas caché leur stupéfaction devant la rumeur de la prise en charge de l’évacuation sanitaire par Willy Nguesso, fils de Sassou-Nguesso, jeudi 23 septembre au matin.

Dans un article proposé à plusieurs salles de rédaction (dont Congopage) puis publié par le site Le Moustique, un certain Jean de Présilly, docteur de son état, décrit avec force détails les conditions logistiques dans lesquels le couple Kolélas serait arrivé en France. L’heure (21h), le type d’appareil (Falcon 900 médicalisé), l’aéroport (Orly sud), le loueur de l’avion (Willy Nguesso) sont clairement indiqués dans l’article. Puis, plus loin, la description du mal dont souffre l’épouse Kolélas (un AVC) et les précautions d’urgence à prendre en cas de crise.

Un proche de Mpila nous confirmera la connexion financière entre la famille Kolélas et la présidence du Congo dans cette prise en charge médicale. Le Dr Jean de Présilly prend soin de rappeler que « les frais d’hospitalisation à Bamako et Paris seront supportés par l’Etat congolais. »

« Faux ! » s’indignent les proches de la famille qui laissent filtrer certaines réactions. En dépit du silence dont s’entoure la famille Koléas, parfois l’information vient des très proches. Selon un fils, Vital Kolélas (résident à Londres), qui a également fait partie du voyage, lui et ses parents auraient pris un vol régulier d’Air France, Bamako/Paris.

« Nous possédons des titres de transport » précise-t-il comme pour mettre au défi ceux qui affirment qu’ils auraient emprunté un Falcon affrété par l’Etat congolais. "Les frais de voyage furent pris en charge par la présidence malienne" avait-on appris d’entrée de jeu. La question du visa, semble-t-il, n’a pas été facile. Les autorités maliennes auraient exercé leur pression sur la France pour permettre l’évacuation.

Ne pouvant faire face à la gravité du cas, les autorités maliennes n’avaient pas d’autres choix que préconiser l’évacuation vers un pays où les structures hospitalières sont plus fiables, en l’occurrence la France.

Euphrasie Niakissa, née Kolélas, sœur de Landry, partie à Bamako dès l’annonce de la maladie de sa mère, aurait également compté parmi les passagers d’Air France à destination de Paris. Le choix de l’hôpital St-Louis où séjourne la patiente aurait relevé d’un gendre de Bernard Kolélas, le colonel Niakissa.

Exit donc la thèse de Willy Nguesso jouant le rôle de St-Martin patron de la générosité, distribuant une partie de son manteau aux pauvres.
"D’ailleurs pourquoi n’aide-t-il pas tous les malheureux qui vivent au Congo ? Pourquoi ne construisent-ils pas des hôpitaux au pays" s’insurge, très en colère, un militant.

Centre hospitalier universitaire St-Louis à Paris

Coriace rumeur

Pourtant la rumeur du financement du voyage de Kolélas par l’Etat congolais semble persistante. En revanche celle relative à la prise en charge par la présidence malienne paraît totalement battue en brèche.
Que Kolélas ait accepté l’aide financière de son adversaire Sassou, la chose n’a pas été du goût de tout le monde.
Les réactions (indignées) n’ont pas tardé. Notamment parmi les militants déçus par cette brusque faille dans l’intransigeance légendaire de leur leader. « Il n’aurait pas dû accepter l’aide de Mpila » disent, amers, certains fans.
« De toute façon cet argent n’appartient pas à Sassou. c’est l’argent du Congo » renchérissent d’autres militants.

Le couple Kolélas, depuis son départ en exil au Mali, n’était pas connu pour vivre dans des conditions matérielles cossues. En plus Bamako ne semblait pas le lieu approprié pour faire parler de soi en tant qu’opposant congolais.

Il y a tout de même lieu de souligner un paradoxe : ceux qui soupçonnent le leader Mcddi d’avoir emporté beaucoup d’argent dans son exil sont les mêmes qui l’accusent de n’avoir pas accepté la galère malienne contre les sous de Sassou.
Kolélas a-t-il ou non été aidé par Sassou ?

Les partisans du bon sens n’ont pas tardé à donné leur point de vue.
« Pourquoi ne pas faire un démenti ? » se sont-ils demandés.
« On ne va pas entrer dans ce jeu » rétorque Mampouya Elloh, un proche du leader du Mcddi.
« Pour l’heure la préoccupation c’est la santé de ma Ngoudi, (NDLR-Jacqueline Kolélas) »

« Non, il ne doit rien dire. Le calme c’est bon. » s’insurgent quelques militants.
Donc pas de droit de réponse.

Affluence

L’établissement hospitalier où est soignée Mme Jacqueline Kolélas a connu une immense affluence dès que la nouvelle s’est répandue à Paris. Le personnel médical, inquiet, a pris des dispositions pour préserver la tranquillité des patients en général. Désormais les visites sont filtrées à l’hôpital St-Louis où exerça le célébre professeur Jean Bernard dans les années 1940. Outre les personnalités de l’opposition qui font anti-chambre auprès du malade, on a noté l’entrée en scène de nombreuses figures proches du leader du Mcddi, dont Me Philippe Missamou, conseil du Collectif des Parents des Disparus du Beach.

Quelle est la température à Brazzaville ?

La présence de Bernard Kolélas à Paris n’a pas laissé indifférents les brazzavillois toutes tendances confondues. Un militant parisien rapporte : « J’ai appelé Brazzaville. Les gens sont émus. « wa tou widi, tata wa kotélé kou Paris, mama maladie » (« Le vieux serait à Paris, son épouse est malade, a-t-on appris »)

La ville serait en proie à une vive émotion. Pour les militants, c’est une bonne chose que Kolélas soit enfin à Paris. « On a tout fait pour l’empêcher de rentrer à Paris » critiquent certains sympathisants. « Pas question qu’il retourne à Bamako » préviennent-ils. « C’est bien qu’il soit à Paris, centre de la démocratie. Il ne pourra plus enfin être réduit au silence. A Paris on pourra mieux l’écouter. »

Pourtant, pour l’heure, ils font tous les voeux pour que leur leader observe un silence absolu. "On ne tombera plus dans le piège. Il suffit seulement qu’il parle pour que le régime massacre à Bacongo, comme en 1998" se souvient un réfugié politique à Marseille.

Une chose est sûre : un virage vient d’être amorcé dans les rapports entre le Pouvoir de Brazzaville et l’Opposition en exil.

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