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Thierry Moungalla, Ministre des Postes et Télécommunications, Chargé des Nouvelles Technologies de la Communication accorde à congopage une interview exclusive.

J’ai pris contact avec le tout nouveau Ministre des Postes et Télécommunications, Chargé des Nouvelles Technologies de la Communication, Thierry Moungalla, afin de lui demander d’accorder une interview à Congopage. Chacun de nous ne connaissait l’autre qu’à travers ses écrits. C’est avec une grande amabilité qu’il a accédé à notre demande.

Nous pensions pouvoir nous rencontrer à Pointe-Noire, mais son calendrier chargé l’a tenu éloigné de la capitale économique. Des obligations autres m’appelant pour un très bref séjour à Brazzaville, je l’ai appelé pour lui suggérer de l’y rejoindre. Un retard sur les vols se répercutant sur l’horaire du rendez-vous, le ministre m’a obligeamment offert un petit sursis pour que je puisse le rejoindre. Il m’a reçu dans un hôtel de Brazzaville où sa fonction lui confère une suite dans laquelle il dit préférer recevoir ses visiteurs afin de préserver sa vie privée.
Le ministre n’avait pas pu préparer ses réponses puisque je ne lui avais pas soumis préalablement mon questionnaire. Ceci faisait partie du jeu qu’il avait librement accepté. Il a répondu avec spontanéité et humour sans éluder aucune question.

Ya Sanza : Monsieur le Ministre, je vous remercie d’avoir accepté de me recevoir. Vous n’y avez fait aucune difficulté, je peux même dire qu’il a été très facile d’obtenir cette entrevue.
Qui est Thierry Moungalla ?

Thierry Moungalla : Thierry Moungalla est un juriste de formation qui a 42 ans, bientôt 43 qui a longtemps travaillé en Europe, travaillé dans le privé et qui aujourd’hui, depuis environ cinq ans, s’investit dans une carrière politique, à Brazza au Congo. Dans le cadre des avatars successifs qu’il a du connaître a été d’abord conseiller spécial du Président de la République et puis, depuis un mois et demi environ, ministre des postes et télécommunications, chargé des nouvelles technologies de la communication.

YS : Vous avez beaucoup travaillé avec André Milongo et pour le site mwinda.org, vous considérez-vous toujours comme un homme d’opposition ?
TM : (brève hésitation) A votre avis ?
YS : Ce n’est pas mon avis qui compte, mais le votre.
TM : Le mien est clair, je suis… Ais-je été un homme d’opposition ?
YS : Je ne sais pas. C’est à vous de le dire.
TM : Que donnez-vous comme acception à ce terme là ? J’ai travaillé avec feu le Président Milongo, j’ai été son directeur de campagne. Je ne m’en suis jamais caché et le Président de la République bien évidemment l’a tout à fait su.
J’ai aussi apporté de manière épisodique ma contribution au site Mwinda à une époque où il ne connaissait, selon moi, pas la dérive extrémiste qu’il connaît depuis quelque temps.
Je ne renie pas mon passé politique puisque les valeurs qui m’ont conduit à entrer en politique restent aujourd’hui identiques à ce qu’elles étaient hier. Simplement, l’appel du pays, le premier magistrat de votre pays qui vous appelle et vous demande de servir votre pays, en tant que patriote, je crois que vous ne refusez pas cette demande, cette injonction de votre président.

YS : Selon vous, quels ont été pour le Président Sassou les critères de choix pour qu’il vous invite dans ce gouvernement ?
TM : C’est une décision discrétionnaire. Elle relève de la seule volonté du Président de la République. Mais enfin, j’imagine que dans le cadre de son choix politique en tant qu’homme d’Etat, il a pesé un certain nombre de critères qui doivent probablement tourner autour de l’idée qu’il se fait de ses collaborateurs en tant que ministres, l’idée qu’il se fait du positionnement de chacun des membres de son cabinet qui on pu être élus députés, puisque je vous le rappelle j’ai été élu député. Et puis, probablement, des critères liés à la compétence. Il a estimé que je pourrais servir dans cette fonction, à la technicité, à l’ouverture au monde des nouvelles technologies. A un certain nombre de critères à la fois éthiques et politiques, je pense.

YS : Nous pouvons imaginer que le Président Sassou vous a donné des assurances de financement pour que vous puissiez mener à bien votre mission. Pensez-vous que les moyens qui vous sont offerts peuvent suffire ?
TM : Il ne s’agit pas de me donner des moyens de mener une politique. Ma politique c’est la Nouvelle Espérance.
La Nouvelle Espérance en matière de Postes et Télécommunications est contenue dans le point quatre du projet de société du Président de la République. Disons que si on prend schématiquement ce qu’est la feuille de route depuis le 30 décembre 2007, c’est de restituer à la poste congolaise la place qu’elle avait avant les évènements malheureux que nous avons subis.
La poste congolaise était une poste de proximité, qui fournissait des services, qui était utile aux populations. Elle était déployée sur tout le territoire national. Nous avions avant les évènements 111 bureaux de poste et depuis que la reconstruction du pays est en œuvre, nous avons pu réhabiliter 45 bureaux, c’est-à-dire que le chemin est encore long, mais je pense que nous arriverons à réhabiliter un nombre suffisant de bureaux de poste et peut-être une bonne dizaine cette année.
Alors, attention, quand je dis que le projet de société du Président sur ce point est clair, il ne s’agit pas de réhabiliter un bureau de poste avec des murs, une table et un guichetier. Il s’agit d’avoir un bureau de poste qui soit celui du XXIème siècle c’est-à-dire qu’il contienne à la fois ce que les nouvelles technologies peuvent apporter de mieux aux populations en terme de services, de fiabilité, de sécurité et de diversité de produits qui doivent être adaptés aux besoins des populations.
Je profite de l’occasion pour parler d’un produit qui n’est pas assez connu des populations, peut-être en raison d’un déficit de communication de notre part. Nous proposons un produit qui s’appelle le « Mandat Flash », il est disponible sur l’ensemble du territoire y compris dans les plus petites localités du pays. Ce service est comparable à celui de Western Union, de Moneygram, de Maouéné ou celui de tous les fournisseurs de produits du type transfert de fonds. Il est important que nous menions une campagne de promotion, de communication pour faire connaître ce produit et dire aux populations congolaises que la poste congolaise, en février 2008 est capable de lui proposer des produits adaptés aux besoins.
Ça c’est pour le volet postal.
L’autre gros volet qui est celui de la télécommunication. Comme vous le savez notre tissu d’infrastructures à été largement entamé et détruit par les évènements que nous avons connus. Il est à reconstruire. Le projet de société du Président de la République contient un double objectif, le premier est de réhabiliter notre système de téléphonie fixe, et le second c’est l’installation et la mise en œuvre de la fibre optique. Alors la téléphonie fixe…

YS : Ça ne va plus, vous êtes en train de me piquer toutes mes questions.
Rires…
TM : … Vous me demandez, je fonce… la téléphonie fixe (il a beaucoup de mal à reprendre son sérieux)… la téléphonie fixe parce que tout simplement on a besoin d’une armature de base, on a besoin de fondamentaux. Sans téléphonie fixe on ne fait rien, mais la téléphonie ne suffit pas. y a 20 ans, il suffisait d’installer une ligne téléphonique quelque part pour que l’utilisateur de communications soit satisfait. Ça ne suffit plus, vous le savez comme moi. Désormais, la téléphonie doit s’accompagner de la possibilité du transférer de toutes les données qui existent : la voix sous IP, l’internet à haut débit, la télévision demain… La fibre optique répond à cet objectif.
Ces deux projets structurants sont la grande affaire que j’ai à gérer jusqu’au terme du mandat du Président de la République, puisque le Président de la République lors du premier conseil des ministres de l’année, de la nouvelle équipe gouvernementale, a défini neuf chantiers qu’il estimait devoir être atteints au terme de son mandat. Nous avons la chance et le défi que la couverture nationale en télécommunications ait été retenue par le Président de la République parmi ces neuf chantiers.
Pour répondre à votre interrogation de tout à l’heure, j’ai pour mission de mettre en œuvre le projet du Président de la République et compte tenu de la volonté politique forte qui est la sienne, nous aurons les moyens de notre politique.

YS : Par rapport au téléphone fixe ? Alors que toutes ses infrastructures sont en décrépitude et que les investissements pour le réhabiliter sont pharaoniques, y a-t’il encore un avenir pour lui avec tout ce que nous apporte la téléphonie mobile ?
TM : Oui ! Vous savez comme moi qu’en 1997, au moment du retour aux affaires du Président Sassou, nous n’avions plus aucune infrastructure des communications, aucune. Alors, Parce que nous avons trouvé des partenaires qui croyaient en la reconstruction de notre pays, CELTEL pour ne pas le nommer, puis LIBERTIS, actuellement NTM, nous avons fait le choix de développer avec eux, sur le plan national un réseau en téléphonie mobile parce que l’Etat congolais n’était pas en mesure à ce moment là de reconstruire son tissu d’infrastructure en téléphonie fixe. Nous avons donc accordé à ces opérateurs toutes les possibilités. C’était un choix, qui n’était ni stratégique ni politique, mais un choix dicté par les évènements.
Aujourd’hui, le Président de la République, qui s’est largement investi dans les différents sommets mondiaux sur la société de l’information et notamment le dernier qui a eu lieu à Tunis, est convaincu de la nécessité pur nous d’atteidre les standards internationaux en matière de télécoms. Il a compris qu’il y a là à la fois un gisement d’emplois et un vecteur de croissance économique.
La téléphonie mobile est un marché en cours de normalisation qui a atteint sa maturité. La preuve, nous avons un troisième opérateur WARID SA qui arrive. Ce marché qui est en cours de normalisation.
A côté de ce marché là, nous avons l’absolue nécessité de restituer à notre opérateur historique SOTELCO, à l’époque ONPT, son rôle central d’impulsion. Pour cela nous avons besoin de repartir des fondamentaux, à savoir la réhabilitation de nos infrastructures. C’est dans ce sens là et seulement comme cela que nous restituerons à notre opérateur historique la place centrale qu’il aurait du conserver.

YS : Pardonnez-moi de vous contredire, monsieur le Ministre. En 2000, à l’issue de la guerre, Pointe-Noire possédait un téléphone fixe, elle n’en a plus du tout, et ça commence à faire très longtemps.
TM : (Navré) Depuis mai 2007, eh oui !
YS : C’est terriblement long et la situation est catastrophique. Je sais que le nouveau central va être installé. On nous en parle beaucoup, mais c’est vrai aussi qu’il se fait beaucoup attendre.
TM : Il se fait attendre tout simplement parce que nous sommes dans des délais qui sont à la fois d’urgence parce qu’on doit réhabiliter le plus tôt possible un central téléphonique… Vous avez raison sur le fait qu’on ne peut pas tolérer que la capitale économique de notre pays soit privée de téléphone fixe. C’est clair. Les grands comptes, les grands clients que nous avons, aujourd’hui trouvent des solutions alternatives qui sont extrêmement onéreuses. Le risque que nous avons à terme, si nous ne trouvions pas de solution, c’est qu’ils ne reviennent jamais, tout simplement. Premier point.
Le deuxième point, c’est qu’en raison de l’arrêt brutal du central téléphonique de Pointe-Noire c’est que SOTELCO connaît une baisse dramatique de ses recettes. Elles sont passées, pour vous donner un ordre d’idée, de 400 millions de francs CFA mensuels SOTELCO à 65 millions. En mettant en parallèle la seule masse salariale mensuelle qui est de 195 millions. Nous voyons bien que l’entreprise n’est pas en mesure de faire face et de payer un salaire mensuel à l’ensemble des agents. Vous savez comme moi que des arriérés aujourd’hui sont apparus au niveau de SOTELCO. Nous avons sept mois d’arriérés. Nous entrerions, si nous ne faisions rien, dans le huitième mois.
Le partenaire qui est le notre pour le projet de couverture nationale est l’entreprise chinoise Wei Wueh, qui est une réelle référence en la matière, probablement la première aujourd’hui au monde en termes de technicité, de fiabilité et de compétences. Pour donner à nos français une référence qu’ils connaissent, Wei Wueh est l’équipementier de l’entreprise CEGETEL-SFR.
Sitôt la panne connue, c’était bien avant ma prise de fonction, le Président de la République, dans le cadre du projet de couverture nationale, a ordonné à notre partenaire technique d’anticiper sur l’installation du central de dernière génération qui était prévu dans le cadre du projet. Afin, dans un premier temps, de rétablir les lignes des 7000 abonnés qui étaient connectés à Pointe-Noire, puis de poursuivre ensuite son extension, puisqu’il est évolutif, jusqu’à la capacité maximale attendue sur Pointe-Noire.
Sur ce point je suis donc en mesure de vous rassurer et j’ai d’ailleurs fait une mission dans la capitale économique qui m’a permis de prendre la masure de l’évolution des travaux. Sans optimisme exagéré je peux vous dire que dans les trois mois nous établirons à Pointe-Noire une téléphonie fixe de de la dernière génération.
YS : Prenons date !
TM : On prend date ! (Rire)

YS : Vous avez déclaré que la SOTELCO n’est pas tout à fait morte. Faut-il envisager de la mettre en soins intensifs ou l’euthanasie s’impose-t-elle ?
TM : (Éclat de rire) Ni l’une des solutions ni l’autre. Quand j’ai dit que la SOTELCO n’était pas tout à fait morte, je le disais parce qu’on doit se placer dans la perspective de restituer à cet opérateur son rôle originel. Pour cela nous devons faire face à deux ou trois paliers différents. Le premier est dans l’urgence que je viens d’évoquer. On ne peut pas, a moins de vouloir voir mourir notre opérateur, laisser perdurer une situation où la tension de trésorerie est telle que l’entreprise ne peut pas faire face à ses charges courantes. Il fallait que nous trouvions une solution. Elle est en phase d’exécution.
Le deuxième aspect est conjoncturel. Il nous faut le plus rapidement possible trouver les solutions permettant à SOTELCO de se délester de son passif social et de son passif commercial. Ce sont deux gros boulets qui plombent l’entreprise.
La dette sociale est consécutive à la scission de l’ONPT en SOPECO et SOTELCO, la poste et les télécommunications. Nous devons aussi faire face à un passif commercial, une dette fournisseurs notamment, nous devons y répondre.
Sur le plan structurel, afin que dans les trois mois nous puissions proposer au Président de la République un plan de redressement et de développement de la SOTELCO, j’ai demandé à son management de se constituer en groupe de travail avec mon cabinet et la direction générale de l’administration centrale des postes et télécoms dont je suis désormais en charge. L’entreprise est aujourd’hui dans l’incapacité d’absorber seule le choc que constitue le projet de couverture nationale et le projet de fibre optique. Pour des raisons d’infrastructures et de compétences et d’adaptabilité du personnel à ces techniques. Le redressement doit porter sur ces deux aspects là. Mais le développement c’est la stratégie de l’entreprise sur les cinq prochaines années. Que fait-on de SOTELCO ? Quelle est notre vision pour SOTELCO dans les 5 ans c’est-à-dire 2008-2013 ? Cceci nous impose des choix politiques et des choix économiques.
Un choix politique, pourquoi ? C’est qu’une fois que le plan de redressement et de développement aura été élaboré, probablement avec des expertises qui viendront nous apporter un éclairage en termes d’audit et de stratégie (c’est là un problème d’architecture technique, SOTELCO est une entreprise de prestation de services mais à une vocation quasiment industrielle), puis adopté, nous nous trouverons confrontés au volet financier. Combien ça coûte ? Combien de milliards de francs CFA faut-il investir pour que SOTELCO redevienne dans les cinq ans le centre d’impulsion de notre politique nationale de développement ?
Si j’ai parlé de choix politique. C’est qu’à ce moment là il faudra décider si nous considérons que notre opérateur historique de télécoms doit rester dans le giron public à 100%, et l’Etat devra se poser la question : « Suis-je en mesure de financer tout seul un projet de redressement et de développement ? ».
Nos partenaires, la Banque Mondiale, que j’ai rencontré récemment, et le FMI nous incitent fortement à aller vers des partenariats public/privé. C’est une tendance lourde qui consiste, et, a dire les standards internationaux sont un partenariat intelligent public/privé en matière de télécoms. Etant donné que les télécoms font partie des déclencheurs avec la poste de l’initiative Pays Pauvres Très Endettés. Vous comprendrez bien que pour nous, on ne pourra pas probablement opter pour une solution public/public.
La première option c’est la recapitalisation par financement public, la deuxième option c’est l’ouverture du capital à un partenaire stratégique, financier et technique qui dirait : « Je suis prêt aujourd’hui à vous apporter du sang frais, je suis prêt à vous apporter des ressources financières, je suis prêt à vous apporter des compétences et des ressources techniques. » Il est évident qu’un partenaire qui apportera tout ça posera des conditions en termes juridiques, c’est-à-dire se voir délesté des boulets des passifs dont j’ai parlé tout à l’heure et probablement des solutions en termes stratégiques et politiques. Voilà, globalement les défis et les problèmes auxquels nous serons confrontés dans les tous prochains mois pour l’élaboration du plan et à moyen terme pour sa mise en application.

YS : Le service d’acheminement du courrier, partout dans le monde considéré comme essentiel, est de nos jours inexistant au Congo…
TM : (Rires) Vous êtes bien dur…
YS : Pensez-vous devoir rendre au facteur la fonction qui est partout la sienne ?
TM : Oui… oui, je crois que ce qui permettra au peuple congolais de considérer que la poste est de retour, the post is back, ce sera le jour où on reverra le préposé de la poste, le facteur, arriver avec son uniforme, son petit képi…
YS : Son petit vélo…
TM : Son petit vélo, ou sa mobylette ou son scooter ou son véhicule utilitaire. Qu’on voit cette personne, ces personnes dans nos rues, dans nos quartiers en train de distribuer du courrier…
YS : Dans nos campagnes…
TM : Et dans nos campagnes mais parlons d’abord de nos quartiers, on redéploye la poste. Et donc, je crois que symboliquement le jour où nous arriverons à cela, on pourra dire que nous avons restitué à la poste sa fonction principale et sa fonction essentielle, c’est vrai.
Mais ne soyons pas trop durs, sur le fait que la poste, ne remplit pas apparemment cette fonction basique qui était la sienne. Parce qu’il faut préciser que la poste fonctionne totalement et parfaitement pour ce qui concerne le convoyage du courrier vers les boites postales et puis elle fonctionne totalement et parfaitement pour ce qui concerne les produits dont j’ai parlé tout à l’heure, notamment le mandat flash qui est un produit excellent et tout aussi fiable que celui proposé par nos concurrents.
Par contre, par contre, j’apporte quand même une précision à nos internautes, la poste congolaise qui a déjà les difficultés de redéploiement dont nous avons parlé, sur le territoire et de valorisation médiatique et communicationnelle de ses produits, la poste congolaise souffre d’une concurrence déloyale qui est celle de tous les opérateurs qui aujourd’hui violent le monopole du service postal universel et celui de la poste congolaise. Pour que nos internautes comprennent ce que je veux dire, aujourd’hui c’est comme si pour la poste française par exemple, on avait un concurrent qui illégalement convoierait les courriers de moins de deux kilos. C’est-à-dire qui concurrencerait frontalement la poste française.
Je vais être amené dans les prochains jours à rappeler à ces concurrents de la poste, les dispositions de la loi congolaise et à les inviter à quitter ce créneau qu’aujourd’hui la poste congolaise est tout à fait capable de remplir.
D’ailleurs, pour votre information, vous parliez du postier, du facteur, qui distribue le courrier, et bien, il y a un plan qui est initié dans le département de Brazzaville, au niveau de la Direction Départementale des postes à Brazzaville pour une formation à court terme de facteurs qui effectivement dans les prochains mois seraient en réapparition publique et symbolique dans nos rues, nos artères etc.

YS : Vous avez parlé des boites postales, c’est vrai qu’elles semblent fonctionner à peu près bien, mais j’ai toujours la désagréable surprise d’y trouver mon courrier ouvert. Ça ne me semble pas être un signe de bon fonctionnement…
TM : Là vous évoquez un autre aspect qui est celui de la moralité éventuelle des agents qui sont chargés de traiter ce courrier là…
YS : Oui, où de celle d’un colocataire de la boite…
TM : Ou des colocataires de la boite. Mais bon, si un colocataire de la boite est indélicat, vous comprendrez bien qu’il va être difficile pour le ministre que je suis, d’obtenir…
YS : Mais peut-être que si les boites doivent être partagées c’est qu’il n’y a pas assez de boites…
TM : Oui, alors peut-être que la boite postale est victime de son succès et qu’il va falloir envisager des solutions qui vont permettre d’étendre le nombre de boites postales…
YS : Peut-être que si le courrier ordinaire était distribué on aurait besoin de moins de boites postales…
TM : Certes, mais nous rétablissons progressivement le service postal universel. N’eut été la concurrence déloyale dont j’ai parlé tout à l’heure, je pense que la résurgence du courrier ordinaire et de son convoyage serait beaucoup plus rapide aux yeux des populations. Simplement, je vais rappeler aux partenaires privés du secteur les obligations de la loi congolaise en la matière.

YS : Qu’en est-il de la libération des fréquences radio ?
TM : Le problème des fréquences, vous savez comme moi que c’est un problème délicat au niveau mondial. Les fréquences sont une ressource rare dont chaque pays n’est que le dépositaire pour le compte de la société mondiale et de l’humanité en entier. Nous sommes dans l’incapacité de les étendre à l’infini. Il nous faut gérer au niveau de chaque Etat un nombre limité de fréquences. Aujourd’hui, je pense que vous le savez très précisément, nous avons un problème de pénurie de nos fréquences. Non pas dans le sens que nous soyons dans une situation où ces fréquences seraient mal utilisées, mais tout simplement parce qu’elles sont squattées, qu’elles sont cooptées par nos voisins d’en face. Par les opérateurs de télévision, les opérateurs de radio notamment de la RDC, mais aussi les opérateurs de téléphonie mobile. Aujourd’hui, au moment où nous parlons, nous avons dans le cadre de la commission mixte Congo Brazzaville/RDC, entamé une négociation avec nos partenaires de RDC et notamment mon homologue chargé des postes et téléphones et télégraphes de la RDC de manière à obtenir la libération de nos fréquences qui aujourd’hui sont squattées, je maintiens le terme, par la RDC. Je pense que vous le savez comme moi, sur le plan des fréquences Brazzaville et Kinshasa sont la même ville et nous travaillons donc sur les mêmes fréquences.
C’est quelque chose à laquelle je tiens éminemment, pourquoi ? Parce que c’est une question de souveraineté. A titre d’information encore une fois pour nos internautes, aujourd’hui, sur les 22 fréquences audio visuelles qui existent entre les deux capitales, nous avons un spectre de 22 fréquences audio visuelles, et la RDC en occupe 16 alors qu’en principe nous devrions être en parité 12/12. Ça c’est le premier aspect.
Deuxième aspect, nous avons le problème de la violation, très grave, par des opérateurs de téléphonie mobile de RDC des dispositions de l’Union Internationale des Télécommunications. Je ne cite pas le nom des opérateurs concernés parce que ce n’est pas le plus important, mais ils sont connus. Deux grands opérateurs de RDC augmentent la puissance de leurs émetteurs et ils les tournent sur Brazzaville. Aujourd’hui, un des opérateurs de RDC couvre 80% du territoire de Brazzaville. C’est-à-dire que si vous chargez depuis Brazzaville une carte SIM de cet opérateur dans votre téléphone, vous pourrez l’utiliser comme celle des opérateurs nationaux. Comme si cet opérateur était autorisé à exploiter le Congo Brazzaville. Le seul hic c’est qu’il n’a pas acheté de licence et une licence de téléphonie mobile coûte plusieurs milliards de francs CFA. Voilà un exemple de ce qui doit faire l’objet de notre négociation avec ces opérateurs. Le retrait de RDC de nos fréquence, c’est un problème de souveraineté sur lequel il va être difficile de transiger.
YS : C’est un problème éminemment politique…
TM : Absolument.

YS : Vous nous promettez la fibre optique et l’ADSL pour 2009. Quelles sont les objectifs réalisables pour cette date ?
TM : Il faut déjà replacer le tout dans son leur contexte. La fibre optique est déjà arrivée au large de Pointe-Noire. Et aujourd’hui nous avons tous les pays voisins ou quasiment tous, sauf la RDC et quelques autres pays moins importants sur le plan géographique… nous sommes un des seuls pays qui n’avait pas à l’époque c’est-à-dire il y a sept ou huit ans saisi l’occasion dans le projet SAT3 qui était de nous connecter à cette fibre, le câble sous marin qui passait.
Aujourd’hui, nous sommes dans une session de rattrapage. C’est-à-dire que grâce à l’obligeance de quelques partenaires, sud africains notamment, ce sont les concepteurs du projet, et à la courtoisie diplomatique de quelques voisins, nos avons la possibilité de nous raccrocher à ce projet. Cette session de rattrapage consiste en quoi ? C’est que, pour ce qui concerne le Congo, le câble va arriver au large de Pointe-Noire, à la fin du premier trimestre 2009 d’après les prévisions. Il va arriver parce que j’ai été visiter le site, lors de la mission dont j’ai parlé tout à l’heure, sur la plage à Matombi. C’est un site qui est très beau. Le câble arrivera.
En attendant que ce câble arrive, il faut que nous ayons en aval de ce processus, réussi à monter un projet qui permette de tirer la fibre sur le continent. Il ne suffit pas que la fibre arrive au marge de Pointe-Noire, encore faut-il qu’elle arrive sur le continent c’est-à-dire jusqu’à Brazzaville dans un premier temps. Et dans la partie septentrionale dans un deuxième temps.
Ce qui se passe en ce moment, et le grand projet du ministère, parallèlement au grand projet de la couverture nationale, c’est que début mars, le 5 mars, nous allons avoir un grand sommet, ici à Brazzaville, qui va réunir tous mes homologues chargés de la communication de la sous région auxquels vont s’ajouter le ministre sud africain des télécoms, puisque le projet est d’origine sud africaine, le ministre togolais, le ministre nigérian, et quelques autres. Nous allons signer, à cette occasion, un protocole d’accords de mise en place et de maintenance de la fibre optique sur le continent. Ce projet fait l’objet d’un financement de 15 millions de dollars dans le cadre du projet global de couverture nationale. C’est-à-dire que la part congolaise dans le projet, puisqu’il y a mutualisation entre les différents pays dans le cadre du projet, la part congolaise, identique à celle des autres pays est de 15 millions de dollars [1]. Nous avons à ce jour versé 10 millions de dollars. Reste avant le sommet, c’est l’une des conditionnalités à l’ouverture de ce sommet, à verser 5 millions de dollars. Nous sommes très optimistes car je crois qu’un comité de trésorerie s’est réuni hier et que cette ligne de crédit est désormais disponible. Nous allons mettre en place ce financement et procéder au virement bancaire nécessaire vers l’Union Sud Africaine dans les tous prochains jours. Donc je peux annoncer que pour le 5 mars, nous aurons finalisé la partie juridique et la partie montage du projet.
A partir de là, la fibre dont le câble sous marin est au large de Pointe-Noire, fin premier trimestre 2009, sera installée de Pointe-Noire à Brazzaville dans un délai de 15 à 17 mois. Ce qui veut dire qu’en juillet/août 2009, nous serons en mesure, s’il n’y a pas d’impondérable en terme de climatique ou d’intempéries, nous serons en mesure de fournir aux populations de Brazzaville, et de Pointe-Noire un service de fibre optique.
YS : Peut-on espérer qu’il en soit de même pour Dolisie, Nkayi…
TM : Oui, c’est sur le chemin.
Mais avec toutes les extensions qui tiennent compte des procédés techniques nécessaires, parce que vous savez comme moi que la fibre, on ne peut pas la tirer partout. Sur un plan topographique il y a des lieux inaccessibles, des contraintes techniques qui empêchent qu’on la tire dans le moindre recoin du territoire. Par contre nus aurons des procédés qui permettront de faire arriver les signaux dans les localités les plus éloignées, c’est le Wymax, c’est toute une série de procédés qui existent qui nous permettront dans un délai que je qualifierai de 3 à 4 ans vers une quasi couverture nationale en termes de fibre optique.
Le projet, on va dire, l’épine dorsale du projet, Pointe-Noire, Brazzaville, Oyo, Ouesso, c’est cela l’épine dorsale, qui doit se réaliser en trois phases, verra l’arrivée à Brazzaville du câble fibre optique pour juillet/août 2009, peut-être septembre si on est confrontés à de petits impondérables.
YS : Je suis un peu surpris d’apprendre que le point d’atterrage choisi se trouve maintenant à Matombi, ce site est tout au fond de la baie de Loango. Votre prédécesseur avait parlé de Djéno qui pourtant semble un choix plus aisé.
TM : Alors là je vais vous dire c’est une question qui doit répondre à une prise de décision des techniciens qui doivent considérer que les spécifications techniques et topographiques supposaient que l’on choisisse Matombi plutôt que Djéno. Là je n’ai pas de réponse. Ça doit répondre à des considérations techniques sur lesquelles je n’ai absolument pas prise et surtout pas de réponse.

YS : L’arrivée d’un troisième opérateur de téléphonie mobile laisse espérer une baisse des tarifications et une amélioration des services pour l’utilisateur, pour peu que, comme ça a été le cas dans bien des pays, il n’y ait pas entente entre opérateurs. Quels dispositifs de surveillance comptez-vous mettre en place pour éviter cela ?
TM : Déjà, parler d’entente, vous avez touché du doigt la problématique. C’est qu’en réalité, l’impression que le consommateur moyen pouvait avoir de la situation quand il y avait deux opérateurs, donc un oligopole pour parler technique, un oligopole qui est intelligent du point de vue des deux sociétés concurrentes, c’est que manifestement, l’impression que l’homme de la rue avait, c’est qu’une partie de la thématique avait été volontairement sortie de la concurrence et qu’on avait laissé le jeu de la concurrence jouer sur la marge. Pour parler clairement, on a sorti la problématique du coût de la communication de la concurrence. Et il y eu un partage du marché.
Arrive un troisième opérateur qui par principe, doit s’imposer. Qui par principe doit démontrer aux congolais en quoi ils auraient intérêt à se délester d’un des deux autres pour opter pour Warid. Alors, quels critères pourrait pousser un consommateur congolais à abandonner CELTEL ou NTM au profit de Warid si ce n’est le coût de la communication ? Si on y ajoute le fait que Warid est un opérateur qui semble avoir des moyens puissants, des ressources financières considérables, et la nécessité de se faire une place, nous escomptons que cette politique commerciale agressive qu’ils vont mettre en place va contribuer à tirer les prix vers le bas. Il est évident que sa seule solution, sa seule voie en matière d’installation et de survie, c’est d’aller vers une politique agressive en matière de prix.
Il est évident également, deuxième conséquence, que cette politique agressive matière de prix va amener les concurrents qui sont en place à réagir. Je crois que dans ce sens là nous pouvons escompter que dans les six à dix mois qui viennent on devrait avoir une baisse significative du coût de la communication. Ça c’est le premier volet.
Le deuxième volet qui est aussi important à mes yeux, c’est celui du coût de l’interconnexion. C’est un volet extrêmement important. J’explique en un mot pour vos internautes ce que c’est que l’interconnexion. C’est que quand je suis client, utilisateur CELTEL, et que je vous appelle sur un NTM ou un Warid, voir sur votre téléphone fixe, j’ai un coût d’accès au réseau et il y a entre les opérateurs une convention de prix qui dit : « Pour que je vous autorise à accéder à mon réseau ça coûte tant. ». Il y a un tarif qui a été fixé d’accord parties entre les différents opérateurs de téléphonie qui est de 100 FCFA. C’est-à-dire que même si les opérateurs de téléphonie mobile ou même SOTELCO, disaient : « Le coût de la communication chez moi c’est zéro. », il y aurait un coût incompressible qui est celui de l’interconnexion. C’est-à-dire que même à communication gratuite le consommateur paierait quand même ces 100 FCFA là puisque c’est le coût de l’interconnexion qui lui est incompressible.
Alors, j’ai discuté avec ces différents opérateurs, parce que l’Etat ne peut pas se substituer à eux, nous ne sommes pas dans une économie administrée où l’Etat pourrait dire « J’abaisse par décret le coût de l’inter connexion. ». Nous avons depuis le mois de novembre, par mon prédécesseur, et par moi-même depuis ma prise de fonction, fortement incité les opérateurs de téléphonie, à baisser le coût de l’inter connexion parce qu’on ne peut pas parler de baisse significative du coût de la communication, Tant qu’on a des interconnexions les plus chères du monde. Les plus chères c’Afrique en tout cas. A titre d’exemple, le Sénégal, pays qui est aujourd’hui en pleine expansion sur le plan des télécoms, pratique un coût d’interconnexion à 30 ou 35 FCFA.
Ceci veut dire que si l’on cumule la baisse du coût de l’interconnexion et une politique agressive de baisse des prix, qui pourrait être initiée pas Warid et qui serait suivie par les autres, je pense que raisonnablement nous pouvons espérer une baisse des communications au profit des populations congolaises. J’y tiens, je n’ai pas les moyens juridiques ni de coercition j’ai simplement une fonction tribunitielle qui est de dénoncer les éventuelles ententes des opérateurs qui sont aujourd’hui quatre en comptant SOTELCO, s’ils s’asseyent sur le dossier en disant « Il est urgent de ne pas avancer. ». Je suis assez optimiste, je crois que les signaux que j’ai reçus de ces opérateurs là montrent d’abord que le message est passé et montrent ensuite qu’il y a une réelle volonté de baisser le coût. Attention, que l’on soit clairs sur le sujet, je n’ai pas demandé à ces opérateurs et ce n’est en tout cas pas le rôle de l’Etat de tuer le poule aux œufs d’or, je n’ai pas demandé aux opérateurs de passer brutalement de 100 FCFA à 35 francs. Je leur demande de manière significative d’arriver à une baisse graduelle mais une baisse significative.

YS : (Tournant ses notes en tous sens) Oh, ben, j’en ai plus…
TM : (Rires)
YS : J’aurais dû en préparer davantage… Pensez-vous que j’ai oublié quelque chose ou avez-vous quelque chose à ajouter ?
TM : Je crois que ce qui nous importe aujourd’hui où nous prenons possession des dossiers des nouvelles technologies des télécommunications et des postes, c’est vraiment une priorité politique absolue de situer le Congo au niveau des standards internationaux. C’est pour moi une obligation minimale. On ne peut pas aujourd’hui parler de télécommunications si on ne parle pas d’un certain nombre d’outils fondamentaux comme une téléphonie fixe fiable, comme une fibre optique qui en réalité est un tuyau dans lequel nous pouvons faire passer des données et plus la bande est rétrécie et moins les données passent et moins les données passent vite. Tout ce que nous entreprenons dans le sens d’une amélioration de l’infrastructure sera un acquis pour nos populations. C’est une volonté clairement affichée du Président de la République. Il y tient car il sait bien qu’à travers la mise à niveau de nos infrastructures, nous aurons deux conséquences positives, la première c’est un réel gisement d’emplois, parce que secteur est créateur d’emplois. La deuxième c’est que c’est un facteur de croissance et une aubaine pour nos finances publiques.
Prenez le cas du Sénégal, aujourd’hui, le Sénégal dans le cadre d’une politique des télécommunications intelligente, est en train petit à petit de substituer l’arachide qui est un produit dont on ne fixe pas les prix nous même, il est clair que le Sénégal n’a aucune prise sur ces prix là, c’est donc une production dont un terme essentiel lui échappe, le Sénégal à donc vraiment misé sur les télécommunications et aujourd’hui les télécommunications sont en train de devenir un des pourvoyeurs essentiels du budget de l’Etat. Nous sommes en mesure parce que nous avons une jeunesse qui est formée, qui a un bon niveau de culture générale, pour peu que nous ayons des infrastructures qui soient mises à niveau, pour peu que nous ayons une politique de ressources humaines intelligente nous pourrons faire ce que le Sénégal fait aujourd’hui, ce que le Rwanda fait aujourd’hui, ce que ces pays font en matière de centres d’appel. Dans ce domaine, Dakar est devenu un des centres principaux en Afrique avec le Maroc. Aujourd’hui la plupart des grands prestataires de services en matière d’internet, en matière de téléphonie, en matière de télévision, je peux citer des opérateurs comme Free par exemple, ces opérateurs là utilisent des centres d’appel au Sénégal, au Maroc notamment et grâce aux infrastructures développées par ces pays, des centaines, des milliers de jeunes marocains, des centaines des milliers de jeunes sénégalais bénéficient d’emplois qui sont des emplois stables et des emplois évolutifs.
La volonté du Président de la République, est que nous puissions rattraper notre retard parce que incontestablement nous avons un retard, il faut donc nous mettre au niveau des standards internationaux et arriver dans un délai qui soit relativement bref qui fasse qu’à défaut d’avoir une croissance hors pétrole sur des investissements lourds de type industriel nous puissions nous investir largement dans des services à l’instar de pays comme l’Irlande, comme l’Inde, qui sont des pays qui aujourd’hui sont fortement pourvoyeurs de croissance grâce aux télécommunications et aux nouvelles technologies. C’est un objectif pour nous parce que nous ne pouvons pas faire l’économie d’avoir une infrastructure et un système de télécommunications qui soit au niveau.

YS : Pour toutes ces réalisations et pour les faire fonctionner, il va vous falloir de l’énergie, et nous en manquons. Vous allez être confronté à un problème d’interfaçage avec le ministère de l’énergie. Ne craignez-vous pas de trouver là un obstacle ? Pensez-vous pouvoir obtenir une énergie suffisante et de qualité ?
TM : Il y a deux réponses à la crainte que vous émettez, la première c’est qu’aujourd’hui les opérateurs de téléphonie mobile dont on parle et qui assurent une couverture quasi nationale utilisent justement dans ce contexte de pénurie d’énergie tous les moyens qui existent et notamment la redondance dont vous connaissez les critères et les traits principaux, et toutes les ressources qui existent en matière d’énergie de substitution de manière à ce que le réseau ne soit jamais en situation de rupture, là c’est la première réponse. Maintenant ce n’est pas suffisant et ce n’est pas une situation qui soit satisfaisante à terme.
Parallèlement à ces solutions provisoires il faut compter avec la mise en service, je l’espère courant 2009, du barrage d’Imboulou qui permettra de tirer sur Brazzaville une énergie électrique de qualité. Vous posez un vrai souci, c’est évident. Aujourd’hui, il existe des procédés qui permettent d’assurer un maintien du service, grâce à des mécanismes d’énergie de substitution, malheureusement à des tarifs qui sont souvent assez élevés, mais tout est évolution dans le monde. Je préférerais que la seule interrogation qui nous reste dans quelques mois ou quelques années soit de dire « où trouve-t-on l’énergie », plutôt que de devoir dire : « on a pas d’infrastructures et on a pas d’énergie ». Si on règle déjà le problème de l’infrastructure, je crois que le reste suivra. Mais vous avez raison, c’est un goulot d’étranglement assez important.

YS : Je veux bien croire qu’Imboulou présente quelques caractères d’amélioration sur le plan énergétique au niveau de Brazzaville. Par contre, sur Pointe-Noire on ne voit pas bien le bout du tunnel. Il est vrai qu’il y a le projet de centrale à gaz à Boundji, mais l’énergie qui en sera issue semble être réservée aux besoins industriels. On ne voit donc pas bien comment la capitale économique va sortir de ses problèmes de mauvaise qualité de l’énergie.
TM : Oui, parlons plutôt de la mauvaise qualité de l’énergie plutôt que de pénurie, là encore pour nos internautes doivent prendre en compte que c’est plutôt la qualité de l’énergie qui est en cause, parfois des interruptions mais aussi et surtout la qualité de l’énergie fournie. Moi je réponds ceci…
YS : S’il vous plait, nous avons évité la langue de bois il serait dommage d’en user maintenant. Vous savez très bien que des quartiers entiers ne reçoivent quasiment aucune fourniture.
TM : Je ne suis pas ponténégrin je ne peux pas répondre à cela mais je ne peux pas non plus laisser passer l’idée qui est répandue sur internet qui dit qu’au Congo il n’y a pas d’énergie du tout.
YS : Soit, ce n’est pas tout à fait vrai.
TM : Certes des quartiers ne sont pas suffisamment alimentés et en tout cas pas suffisamment longtemps. La question posée est aura-t-on assez d’énergie pour faire fonctionner ces infrastructures là, je suis assez confiant. Nous avons parlé d’Imboulou, vous avez parlé de la centrale à gaz, ajoutons-y la modernisation de Moukoukoulou ajoutons-y tout ce qui est lié au boulevard énergétique qui est un des grands projets de la sous région et je crois qu’on devrait arriver à un niveau acceptable de fourniture de l’énergie qui soit compatible avec les besoins de mon secteur.

Thierry Moungalla n’est pas parvenu à nous entraîner avec lui dans le sillage de la Nouvelle Espérance. En revanche, il n’a eu aucune peine à nous démontrer qu’il connaît son sujet. Il croit profondément en la mission qui lui est confiée et sans doute fera-t-il tout, du moins tant qu’il n’en sera pas découragé, pour la mener à bien. Sur l’énergie, il patauge un peu, mais il n’est pas en charge du secteur.
L’homme est simple, la fonction ne lui monte pas à la tête. J’ai eu un réel plaisir à cette entrevue. Moungalla pourri parce que membre du gouvernement congolais ? Non, je ne le pense pas, le Congo n’est pas aussi manichéen. Moungalla pense servir son pays du mieux qu’il le peut dans un secteur qu’il maîtrise et dans un contexte difficile. Seul l’avenir nous permettra de dire s’il se/nous trompe ou au contraire s’il est un visionnaire éclairé. S’il réussit et traverse cette mission sans dommage, le Congo aura trouvé en lui un homme politique avec lequel il faudra compter.

Un dernier détail, nous sommes sortis de l’hôtel ensemble, en discutant comme de vieux amis. Je l’ai quitté alors qu’il montait dans son véhicule : un Suzuki Grand Vitara.

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