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Plaidoyer pour l’art africain

Un bel article sur l’art africain est paru dans The Guardian de Londres et rapporté par l’hebdomadaire Courrier International de cette semaine. Le constat est connu sans doute : l’art africain est sans cesse pillé, et nos artistes sont sous-estimés alors qu’ils devraient avoir des raisons de se bomber les pectoraux. En effet, si le continent noir est l’un des plus pauvres, paradoxalement il couve une des plus grandes richesses artistiques du monde. Le Britannique critique d’art Jonathan Jones qui signe cet article du Guardian pointe du doigt l’étrange situation de l’artiste africain, la place de l’art africain et l’attitude "irresponsable" des Occidentaux. Il souligne : « Lorsqu’on regarde les chefs-d’œuvre de l’art africain qui sont au British Museum, on a du mal à croire que les exploiteurs aient pu considérer les divers peuples d’Afrique comme une race inférieure, parvenue à son stade final d’évolution. »

En un mot, ce critique d’art ne peut pas concevoir qu’un tel continent avec un tel potentiel artistique soit un continent « arriéré ». Pour cela, il prend l’exemple des salières en ivoires sculptées par des artistes béninois, de même que les plaques de cuivres qui ornaient le palais du roi du Bénin. Toutes ces œuvres ont donc émigré en Europe et sont exposées au British Museum, en Grande Bretagne !

Le sculpteur Ousmane Sow

Faut-il en déduire que l’Africain n’a pas la sensibilité de l’Art ? Peut-il, lui aussi, être un collectionneur, un mécène, j’allais dire pour aller plus vite, un amoureux de l’art qui consacrerait sa vie à la défense de ce patrimoine qui fonde l’essence même des civilisations africaines ?
Tous les jours les œuvres d’art quittent le continent noir vers l’Europe, œuvres bradées par des artistes dont les conditions de vie laissent peu de place au militantisme et au réflexe de la conservation de notre mémoire.
Le statut de l’artiste africain dans le continent est plus qu’ambigu, voire flou. Considéré comme un errant, une espèce de fou qui s’acharne à fabriquer des statuettes, cet artiste n’a pas toujours l’estime des sociétés dont les intellectuels passent devant une peinture comme on passerait devant la morgue, très vite, de peur de voir les cadavres se remettre en jambes !

Toutefois, c’est aussi l’occasion de saluer des critiques d’art africain comme l’écrivain Camerounais Simon Njami qui organisa à

Simon Njami

Beaubourg du 25 mai au 8 aout 2005 une magnifique exposition intitulée Africa Remix, exposition qui nous fit découvrir une nouvelle génération d’artistes africains. La Revue Noire joue un rôle important en la matière, Simon Njami est un des rédacteurs de cette prestigieuse revue qui vient par ailleurs d’assurer la parution des œuvres inédites de Sony Labou Tansi.

De même, il faut saluer l’autre Camerounais, Godefroy Bidima qui, dans son Que sais-je intitulé L’Art négro-africain, offre une vision globale qui pourrait nous aider à regarder autrement les œuvres africaines. C’est en les aimant que nous arriverons à stopper cette culture bradée au jour le jour dans l’indifférence totale des gouvernements africains. Alors, tournons-nous vers les initiatives privées.

Victor Hugo, par Ousmane Sow

A Paris, le Musée Dapper organisera du 27 avril au 13 juillet une exposition qui mettra en valeur la création artistique sénégalaise qui, comme on le sait, est celle qui est la plus en vue sur le plan international. Ce sera pour nous l’occasion de voir par exemple les œuvres de Moustapha Dimé, un de nos plus dignes représentants qui contribuent à vulgariser le génie artistique du continent...

PS : L’image en haut, la toute première, est une sculpture du Sénégalais Ousmane Sow. "Visage du lutteur"

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