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le Général Ngouéléndélé sur RFI : Brazzaville est un volcan qui peut cracher à tout moment

« Brazzaville, de mon point de vue est un volcan éteint qui à tout moment peut cracher parce qu’il y a trop d’armes » a dit M. Ngouéléndélé Mongo sur les antennes de RFI.

Ce 8 novembre 2005, le général Ngouéléndélé Mongo a été l’invité d’Afrique Matin sur RFI. Dans les années 80, sous la première présidence de M. Sassou Nguesso à Brazzaville, cet officier supérieur a été le chef des services spéciaux. Il est ensuite devenu le chef d’état major particulier du président Lissouba. Aujourd’hui, ce général à la retraite dirige à Brazzaville le Rassemblement pour la Démocratie et la République (RDR). Aux élections présidentielles de 2002, il a soutenu la candidature de Sassou Nguesso. Il le regrette aujourd’hui. Il le justifie auprès de Christophe Boibouvier, journaliste de RFI.

Christophe Boibouvier : Général Ngouéléndélé Mongo, bonjour !
Général Ngouéléndélé Mongo : Bonjour !

C.B : Pourquoi l’ancien chef des services spéciaux du Congo-Brazzaville sort de son silence ?
G.N.M : Vous avez, devant le péril que court notre pays, à cause de sa gestion calamiteuse, devant l’arrogance et le mépris du pouvoir, je me lève. Depuis pratiquement 7 ans, à Brazzaville et à Pointe Noire, la fourniture en eau devient un véritable parcours du combattant. La priorité doit être donnée à l’électricité. Et s’il vous plait, le Congo ne doit pas être géré comme si on gérait une épicerie familiale.

C.B : Quand on a servi successivement comme vous les présidents Marien Ngouabi, Denis Sassou Nguesso et Pascal Lissouba, quel regard on porte sur l’évolution politique de votre pays ? Est-ce que c’était mieux avant ou est-ce que c’est mieux maintenant ?
G.N.M : Moi, j’ai servi le président Sassou de 79 à 91. Sassou n’a jamais été un homme violent. Jamais. Sassou n’a jamais accepté au tour de lui le gaspillage. Jamais. Mais, ce que je constate aujourd’hui, je ne reconnais plus cet homme qui était un homme regardant, vigilent, rigoureux. Or aujourd’hui, je qui se passe me surprend.

C.B : Vous regrettez l’époque de la...
G.N.M : Sassou I.

C.B : ... de la première présidence Sassou
G.N.M : Voilà, il y avait de l’ordre. Je dis : il y avait de l’ordre.

C.B : Pourquoi les conflits politiques au Congo-Brazzaville finissent très souvent soit par un assassinat, soit par une guerre civile et meurtrière ?
G.N.M : J’ai l’impression qu’en République du Congo, il y a ce que j’appelle les professionnels de la politique qui prennent le peuple congolais en otage. Certains prennent leur tribu en otage. La politique est devenue une industrie en Afrique. Tout ce que nous connaissons aujourd’hui comme problème, c’est la politique. Les Ambitions personnelles. On arrive à la catastrophe aujourd’hui parce que les gens veulent aller à la politique. Ca nourrit mieux qu’être à la fonction publique.

C.B : La violence continue. Il y a eu des affrontements meurtriers le mois dernier à Brazzaville entre l’armée et les miliciens du pasteur Ntumi. Comment résoudre cette crise ?G.N.M : Il y a entre le pasteur Ntumi et l’Etat congolais un accord. Ntumi avait accepté de venir à Brazzaville. L’Etat y a mis des moyens pour réhabiliter une résidence à Bacongo. Les Ninjas de Ntumi se sont installés et malheureusement M. Ntumi n’est jamais venu. Donc il ne restait plus qu’à l’Etat de dire : Messieurs, votre patron n’est pas là, vous devez quittez la maison. L’Etat dans tous les pays est le régulateur de l’ordre. Un citoyen n’a le droit de braver, ni de narguer un Etat.

C.B : Le Congo-Brazzaville est riche en pétrole et en bois. Et pourtant vos 3 millions de compatriotes continuent à vivre dans la misère. Est-ce que la corruption est une fatalité, quelque soit les régimes en place ?
G.N.M : La corruption ne peut pas être une fatalité. Il y a essentiellement un problème de gestion. Si les dirigeants qui viennent au pouvoir viennent avec l’idée de s’enrichir... Vous savez, je vais vous dire une chose : l’article 48 de notre constitution dit : ‘tout citoyen congolais élu ou nommé à une haute fonction publique est tenu à faire la déclaration de son patrimoine au moment où il prend ses fonctions et à la cessation de celle-ci’. Mais, tenez-vous bien ; depuis personne n’a fait la déclaration du patrimoine. Vous imaginez la suite.

C.B : Alors, vous dites que tous les hommes politiques congolais ou presque sont corrompus. Mais pourquoi serez-vous, vous général Ngouéléndélé, le seul homme politique propre au Congo ?
G.N.M : Je n’ai pas la prétention de dire que je suis propre. J’ai été aux affaires. J’ai dirigé les services spéciaux pendant 12 ans. Si j’ai été corrompu, il y’en a qui peuvent avoir des preuves. Mais qu’ils viennent me faire la démonstration. Je suis prêt à y répondre. Vous savez, en décembre 2003, le gouvernement a pris la décision de mettre en place une commission anti-corruption. Je voudrais qu’on me dise aujourd’hui où se trouve cette commission, si elle continue de travailler et quels en sont les résultats. Donc, je ne suis pas un nostalgique du mono, et tel que la démocratie est en train de fonctionner j’arrive à ma dire s’il ne faut pas repartir au mono.

C.B : C’est-à-dire ?

G.N.M : En régime monopartiste. Parce que le pluralisme politique aujourd’hui, j’ai le sentiment que ça ne marche pas. Partout, ce n’est pas la démocratie qui parle, c’est les armes qui parlent. La naissance des milices privées armées, ce sont des éléments qui tuent le continent. La République, connaît pas. L’Etat, connaît pas. Vous voyez le continent comme ça brûle. Brazzaville, de mon point de vue est un volcan éteint qui à tout moment peut cracher parce qu’il y a trop d’armes.
C.B : Général Ngouéléndélé Mongo, je vous remercie.

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