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Dacha

Biens immeubles mal acquis par...

Qui oserait douter que les biens meubles et immeubles qui font partie du patrimoine du clan Sasou-Nguesso ne sont pas le fruit d’un dur labeur même si la valeur vénale de ces biens tranche rudement avec le pouvoir d’achat du Congolais moyen qui vit avec moins d’un dollar par jour ?

Dans un chemin montant, mal aisé, goudronné, de tous les côtés au soleil exposé, se trouve à la lisière de la forêt du Mont-Boron, un « bien mal acquis » : la cossue résidence d’Edith Bongo née Sassou. Quand ce ne sont pas des châteaux en Espagne, ce sont des manoirs sur la Côte que ces parents offrent à leurs enfants, aux frais des Congolais.
Le bijou familial est situé Bd Mont Boron au n°50.
Selon les rumeurs, cette villa sert actuellement de maison de convalescence à qui de droit.
L’architecture de cette pièce/maîtresse s’inscrit dans le style de la Belle Epoque comme nombre de constructions du début du siècle dernier qui font la spécificité de la Côte d’Azur et qui servaient de résidences d’hiver aux monarques de ce monde.
Du haut de la colline où se situe cette imposante résidence princière on a une vue imprenable sur la Baie des Anges ( l’étendue de la Méditerranée qui arrose la ville de Nice). Le moins que l’on puisse dire c’est que la splendide courtisane est logée à bonne enseigne.
Le château se situe au fond d’une voie privée dont le calme dissuade d’entrée de jeu tout curieux qui n’a rien à y faire.

Voie privée menant vers la villa


La petite voie privée conduit jusqu’à un grand portail en fer sculpté. C’est dans ce nid d’aigle que vit, entre autres, la famille Nguesso quand elle descend à Nice.
La visite des lieux n’est pas rassurante lorsqu’on n’est pas de la maison. Comme s’il y avait péril en la demeure, un concert d’aboiements accueille en général l’intrus. Ce sont des chiens ; des chiens de garde qui doivent appartenir à la race des molosses très prisée par les méchantes gens ou ceux qui ont tout à cacher au public.
En vérité il s’agit de deux parcelles. Elles sont enregistrées sous le code Rivoli 4350, bât C et B, entrée 01 Niv OO, n° porte 01001. Revenu cadastral : 8215 et 1739.

Un ensemble massif de la Belle Epoque. La villa date de 1957

« Pour la valeur vénale de l’immeuble, il faut voir au bureau des hypothèques » conseille la dame du Cadastre.
Disons que ça peut s’estimer, au bas mot, autour de plusieurs millions d’euros. "C’est un gros morceau" apprécie, à juste titre, un agent immobilier consulté. De quoi humaniser, avec grand soin, l’hôpital général de Brazzaville (CHU).
Bref, autant dire qu’on a affaire à une acquisition immobilière qui, pour reprendre Me William Bourdon n’est pas le fruit d’un « dur labeur ».
C’est que ça coûte une immense fortune d’acheter sur la colline très bourgeoise du Mont Boron. Or nous venons tous d’apprendre, à notre grande stupéfaction, que la plainte pour recel de biens meubles et immeubles portée contre Sassou et Bongo a été classée sans suite.
Autant dire que nos deux dictateurs ont le bras très long pour influencer en leur faveur la très redoutable et indépendante Justice française qui, cependant, vient de faire la nique aux Congolais par son verdict.

Goût immodéré des immeubles

Le paradoxe, c’est cette propension architecturale qu’affichent actuellement les membres les plus fortunés de La Nouvelle Espérance alors que Brazzaville ressemble à une décharge publique.
D’Oyo à Nice (en Europe), ils se livrent à une frénésie immobilière sans précédent.
"Il y a plusieurs demeures dans la maison du père" disent les Ecritures des hypothèques. Selon le plan cadastral, Edith Bongo est propriétaire de deux parcelles : l’une construite, l’autre nue ( nue-propriété).

Marché à Brazzaville, capitale du Congo

Ca construit et ça achète fort en ce moment. Rien n’est plus sûr que la pierre. Oyo et Owando sont entrés dans la modernité. Les lotissements poussent comme des champignons. Désormais, dit un griot de TV Congo « les natifs du coin peuvent aller en villégiature durant les week-ends » à Oyo, tant le cadre est devenu hyper urbanisé, presque hollywoodien. Grâce à l’une des rares voies goudronnées construites par Sassou, le village d’Oyo n’est plus qu’à quelques heures de route de Brazzaville. Avec un puissant 4X4, on a vite fait d’avaler les 400 kms qui séparent la capitale congolaise de cet arrière-pays où est né Sassou.
Cette boulimie immobilière contraste honteusement avec la négligence dont ils font preuve quand il s’agit de doter Brazzaville en équipements dignes du 21è siècle comme font leurs homologues dans la plupart des capitales africaines. Il faut avoir une pierre à la place du cœur pour privilégier le bien privé au détriment de la propriété publique.
Le site des « Biens mal acquis » exprime l’insolence avec laquelle la nomenklatura congolaise étale son luxe à travers la planète. Au Congo on a le loisir d’admirer de gigantesques constructions qui tranchent avec l’environnement dans lequel elles sont érigées. De Pointe-Noire à Owando, en passant par Brazzaville, le système urbain de la Nouvelle Espérance nargue le bon sens : des châteaux poussent à côté des masures. Ville cruelle. De toute évidence ces riches "dachas" de premier plan sont pour la plupart des résidences secondaires.
Bâties en toute hâte en milieu rural les villas du bord de l’Alima et de la kouyou sont ou seront pour la plupart inhabitées durant toute l’année.
Quand on se réfère à l’histoire, il y a de fortes chances que ces Versailles sous les Tropiques soient recouvertes du vert manteau de la forêt quand cette bourgeoisie pétrolère aura fait son temps. La nature reprendra ses droits sur la civilisation que ces seigneurs de la jungle sont en train d’ériger avec la vitesse de l’éclair comme s’ils étaient pris par le temps.
Le village de Mobutu, Guadolité, n’a-t-il pas connu le même destin à la chute du maréchal/léopard ?

« On pourra en faire des sites touristiques » disent certains supporteurs qui voient d’un bon œil ces « réalisations » de nos barons noirs tout en se doutant qu’elles feront long feu lorsque ce système des choses prendra fin. Encore faudra-t-il que les potentiels touristes aient le cran d’atterrir à Ollombo (aéroport inachevé) pour aller admirer des villas/musée sans charme pittoresque.

Un écrin sur fond azuréen

De toute évidence, Sassou a une revanche à prendre. Sur qui ? Dieu seul sait. Alors qu’à Brazzaville on « réhabilite » des bâtiments désuets légués par les colons ou vieux de vingt ans (cas de l’immeuble d’Hydro-Congo métamorphosé en siège de la SNPC), à Oyo/Owando des immeubles neufs poussent comme des champignons...vénéneux. C’est le cas du « complexe urbain » qui tiendra lieu de marché d’Oyo. A en croire l’architecte/maison, il sera doté d’une grande chambre froide, d’une salle de conférence et, bien entendu, d’étals sur lesquels seront exposées les marchandises. Le complexe tient sur deux niveaux. « Que compte-t-on y vendre ? » se demandent, ironiques, les Brazzavillois. Dans une région où l’agriculture n’est pas la priorité des priorités, il y a de quoi, en effet, s’interroger.

Vue d’ensemble de la villa

Lé dza, lé nwa, lé bina

L’autre priorité dans cette frénésie architecturale sont les boîtes de nuit. Owando et Oyo rivalisent sur ce registre festif. La municipalisation accélérée a donné l’opportunité à nos amis de la Nouvelle Espérance de construire ce qui leur tient le plus à cœur : les bars de nuit.
Résultat : Impfondo, Oyo et Owando peuvent se targuer d’être les villages les plus branchés du Congo. Et comme par hasard, ce sont les villages où est née la crème du Parti Congolais du Travail : Noumazalaye, Ngouabi/Yhombi, Sassou.
Dans le même temps, à en croire Mme Adelaïde Moundeléngolo, Sassou s’acharne à détruire toutes les structures du développement qui se construisent dans la région du Pool. L’école et la crèche dont elle fit don aux populations de Mindouli furent saccagées par les Cobras et les Nsiloulou qui comme chacun sait, travaillent ensemble.
Le plus triste c’est que cette modernité qui touche actuellement lapartie nord du pays s’est déclinée au détriment du voisinage régional. Ce développement urbain n’est pas global. Il est parcellaire. Il est même exclusif. En tout cas il est très égocentrique. Ethnocentrique et égocentrique. D’abord l’ethnie et, dans cette ethnie, d’abord soi-même. Ainsi fonctionnent ces dirigeants qui manient chaque jour avec conviction le slogan de l’unité nationale.

Villa à Oyo avec piscine

Le "gros morceau" du Mont Boron ne constitue pas une pièce unique. La Côte d’Azur étant très prisée, les autres collines de Nice sont prises d’assaut par ces amoureux congolais de la pierre. La nomenclature de la nomenklatura signale un autre produit de recel sis Bd Fréderic Sperling sur les hauteurs de Cimiez et qui porte le nom prédestiné de Résidence Val d’or. Son propriétaire : Bongo Albert Bernard.
Pour ceux qui aiment joindre l’image au texte, vous aurez les photos de cette propriété prochainement.

Tombée de la nuit sur la Côte d’Azur. Vue imprenable depuis la villa

Le panorama est féérique quand on est sur le versant ouest du Mont Boron. On a une vue insaisissable de la ville de Nice et son port de paisance. Au loin, sur la ligne de l’horizon, l’aéroport de Nice et le cap d’Antibes s’offrent au regard. Rien de tel pour calmer les nerfs et reposer l’esprit.
A Roquebrune Cap-Martin, après Monaco, en allant vers l’Italie, trônait une célèbre villa. Elle appartenut à Mobutu Wa Zabanga. Depuis, elle fut vendue aux enchères, aux dépens de son propriétaire légal : la RDC.
Y a-t-il une justice en ce bas monde ?

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