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Ces entreprises qui font leurs emplettes au Congo

Dans la galaxie des sociétés qui opèrent au Congo-Brazzaville, Total occupe une place dominante. Une place de choix où s’enchevêtrent exploitation pétrolière et diplomatie parallèle.

La part du lion

Premier producteur de pétrole au Congo-Brazzaville, Total s’est taillé la part du lion en raison des liens privilégiés du Congo-Brazzaville avec la métropole. En dépit de la crise économique consécutive au tête-à-queue des subprimes, Total arbore une santé financière insolente. En effet, le pétrolier français Total a fait état, vendredi 29 octobre, d’un bénéfice net de 2,47 milliards d’euros au troisième trimestre, en hausse de 35 % sur un an, porté par la remontée des cours du pétrole et la hausse de sa production d’hydrocarbures. Le chiffre d’affaires s’est établi à 40,18 milliards d’euros au troisième trimestre (+ 19 %) et à 119,11 milliards d’euros sur neuf mois (+ 25 %). - (AFP , 29 Octobre 2010). Si Total ne connaît pas la crise, Sassou Nguesso et les agents du chemin d’Avenir sont en proie à une crise d’inconscience. Les actionnaires du mastodonte pétrolier Total s’apprêtent à recevoir en partage un témoignage sonnant et trébuchant. Pendant que Total pompe allégrement l’or noir, Sassou Nguesso et son clan s’en mettent plein les poches et les populations du Congo-Brazzaville croupissent dans la misère.

Si riches et si pauvres

Le cas des pays africains est un non sens économique.

"C’est ici que le bât blesse. En effet, pour les anciennes colonies françaises dont le Congo-Brazzaville fait partie, on s’est demandé pourquoi les Etats, aujourd’hui indépendants depuis cinquante ans, vivent-ils une situation pire que celle des années soixante ? Une thèse qui est vraie établit le lien entre l’incroyable état de délabrement économique de ces pays et une nébuleuse nommée "Françafrique". Le parrain de cette mafia postcoloniale, un certain Jacques Foccart, postula d’entrée de jeu, dès 1960, qu’un réseau d’agents politiques était indispensable pour prendre le relais de la colonisation. Pourquoi ? Parce que, après l’indépendance de l’Algérie, la question pétrolière se posait à la France. Echaudé par les événements d’Algérie, Foccart conçut un plan B alors que de Gaulle est en train d’octroyer l’indépendance aux pays africains au Sud du Sahara. Ce plan, le voici : trouver des hommes de main à la "peau noire et aux masques blancs" afin d’étouffer les tensions politiques dans les nouveaux Etats indépendants alors que la filiale ELF pompera les gisements pétroliers dont le golfe de Guinée regorge. Au Gabon, Bernard Bongo fut l’un de ces hommes de paille. Suivront, au Congo, Yombi et Sassou après la tragique erreur de Ngouabi qui voulut, au sujet de l’or noir, faire la nique au réseau Foccart en s’adressant aux Algériens. Sassou puis Lissouba puis encore Sassou : au Congo, la françafrique démet à sa guise les hommes à tout faire qu’il met à la tête des néo-colonies. A force de services rendus, Bongo se rend indispensable, voire incontournable dans le réseau françafricain. Puissant, on a vu, il l’était. Rancunier aussi. Lorsqu’éclate l’affaire des Biens mal acquis, Bongo pique une colère noire contre le tout nouvel élu Nicolas Sarkozy. Le bougre ne comprend pas qu’on fasse tant de boucan pour des bricoles qu’il possède en France. Sassou, pour sa part, parle de racisme quand on se penche sur ses biens de l’avenue Rapp et du Vésinet. Teigneux, Omar Bernard Bongo obtient la tête du ministre français de la coopération, Jean-Marie Bocquel, qui préconise (l’inconscient !) signer l’acte de décès de la Françafrique" (congopage.com, 20 Octobre 2010).

Total, faiseur des rois nègres

Premier produit d’exportation du pays, le pétrole contribue à près de 75% au budget de l’Etat. Le budget de l’Etat exercice 2011 est estimé en recettes et en dépenses à trois mille quatre cent milliards six cent cinquante trois millions de francs cfa (3004.653.000.000 frs cfa), contre deux mille huit cent quatre vingt trente et un milliards deux cent cinquante sept millions de francs cfa (2831.257.000.000 frs cfa) en 2010, soit une progression de 6,12%. En 2011, la production pétrolière atteindra environ 170 millions de barils. Une manne financière qui pourrait concourir à la résorption de la pauvreté et à la réalisation des infrastructures. Mais, rien n’y fait. Il convient de remarquer (ce qui est une absurdité et un recul de la démocratie) que le pétrole a ceci de particulier qu’il affranchit les chefs d’Etat des pays pétroliers de tout compte à rendre au peuple. En 1997 Sassou renverse Lissouba suite à un coup d’Etat. Il se rend compte que son prédécesseur a bradé le pétrole à bas prix et les actifs que le Congo détenait dans certaines sociétés. Il demande à être indemnisé par Total/Elf. Contre toute attente, celle-ci obtempère aux injonctions de Sassou Nguesso. La compagnie française cède à cet effet un gisement pétrolier au Congo. C’est le gisement Likouala. Mais au lieu que ce gisement soit géré par la SNPC, société pétrolière nationale, on crée de toutes pièces une société, Likouala SA à laquelle le pouvoir vend le gisement. La société Likouala SA est contrôlée par une mystérieuse fondation basée dans un paradis fiscal. Bref au bout du montage on soupçonne que c’est Sassou lui-même en personne qui tire les ficelles. Le résultat de ce hold-up est qu’on ne trouve aucune trace des revenus tirés de ce gisement : les fonds qui n’ont jamais atterri au trésor public s’élèvent à plusieurs centaines de millions de dollars par an. Cerise sur le gâteau, Bahoumina, l’administrateur de cette société est un salarié… de Total (Cf Transparence de l’or noir congolais, France Culture 29 Janvier 2008). Au Congo-Brazzaville, non seulement la société Total fait du business, elle est aussi un Etat dans un Etat. Elle fait et défait les pouvoirs. A Total/ELF, Pascal Lissouba avait tout promis, Denis Sassou Nguesso a tout cédé et le Congo-Brazzaville a tout à craindre.

Benjamin BILOMBOT BITADYS

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