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Coups de feu

Le retour de Ntumi se fera dans le tumulte, nous en voyons déjà les signes avant-coureurs. La semaine dernière Brazzaville a renoué avec son sport favori : celui des foules, balluchons sur la tête, fuyant vers les zones-abri. C’était, cette fois encore, le tour de Bacongo et Makélékélé de renouer avec l’anxiété et avec les coups de feu. Autour de la résidence future de Ntumi et/ou de son retour dans la ville.

Il a été dit beaucoup de choses sur ces événements. Le gouvernement a parlé « d’échauffourées » (Akouala). Les Nsilulus de Ntumi ont parlé de « provocation ». Les Ninjas de Kolélas ont, quant à eux, mis en cause les forces de l’ordre. Le gouvernement congolais a promis une enquête. Quand on sait ce que les enquêtes de nos gouvernements ont apporté comme contribution à la paix dans notre pays, nous pouvons vraiment dormir tranquilles !

En novembre 1992, au Rond-Point du Centre Culturel ; en mai 1999, avec la disparition de 353 de nos compatriotes au Beach : les Commissions d’enquête n’ont pas encore remis leurs conclusions. Ce que le ministre Akouala promet a-t-il des chances de voir le jour - même si par ailleurs, et c’est un trait congolais, personne ne croira un mot de ce qui pourrait se dire ?

Quels que soient les commanditaires des derniers événements de Brazzaville, ces nouvelles violences soulignent un fait : Ni Ntumi, ni Kolélas, ni - donc - Sassou ne sont à même de garantir une paix véritable au Congo. Car la confluence de ces trois natures de souffre ne donnera, fatalement et toujours, que des étincelles. Et aucun d’eux ne pourra asseoir une démocratie, fondée sur notre apaisement prolongé - oserais-je ?- sur « la paix des cœurs et la tranquillité des esprits » ! Il est temps qu’on le sache.

La paix ne nous viendra pas non plus de notre attitude, nous qui aimons à nous voiler la face, parce que nous sommes tenus prisonniers de nos attaches tribales. Critiquer Kolélas et Ntumi, ce n’est pas condamner les Laris à la marginalisation. Critiquer Sassou n’a rien à voir avec une condamnation des Mbochis ou, d’une manière large, des « Nordistes ». Tout comme Lissouba ne nous a pas désigné les Bembés et les Nzabis de la République à la vindicte par ses errements : la paix passe par cette catharsis-là. Douloureuse, mais nécessaire.

J’ai déjà dit mon incompréhension devant la multiplication des obstacles aux retours de Ntumi et de Kolélas à Brazzaville. C’est un aveu que notre justice n’est pas juste, et que le processus en cours est surtout fragile des à-peu-près et des tricheries historiques qui ne nous mettent pas en position, nous peuple, de renvoyer chez eux tous ceux qui ont pris la part la plus nuisible à la ruine de notre être en tant que nation.

Kolélas doit rentrer au Congo et y subir la justice - la vraie, qui passe par une reprise de son procès. Ntumi doit venir à Brazzaville et se voir donner l’occasion d’affronter l’opinion ; de donner sa part de vérité sur sa sanglante aventure. Mais une fois un tel processus entamé : il faudra l’étendre et l’élargir. Sinon, ce serait la fuite en avant et la pratique du deux poids et deux mesures de toujours.

Est-ce cela que certains craignent ? Cela qui explique que chaque Noël soit pour nos populations synonyme d’angoisses et de terreur ?

BB

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