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Diamants

« Sanctions », « bon ordre », « retour à la nornalité ». Qui était à la conférence de presse de vendredi à Paris, aura remarqué le ton de fermeté de Denis Sassou Nguesso sur l’affaire dite des « Diamants du sang ». Le Congo a été écarté du processus de Kimberley, qui garantit l’écoulement sur le marché des seuls diamants dont l’origine a été certifiée par la communauté internationale, et qui ne sont pas le produit des pillages qui alimentent les guerres.

Le Congo produirait de 40 à 50.000 carats de diamants l’an. Mais ses exportations auraient atteint, au cours des années, jusqu’à 5 millions de caracts. Problème mathématique : comment peut-on produire une quantité insignifiante et exporter une quantité exponentielle ? Réponse, politique, venue du Zaïre : le Congo recycle les diamants pillés en RDC par la cohorte des milices et se fait, comme le Bukina Faso hier avec l’or de Savimbi, le complice des guerres chez son voisin. Suspendu !

Brazzaville promet donc de sévir et de frapper fort ; de remonter les filières et de démasquer les coupables. Je ne sais pas vous, mais moi je suis quelque peu amusé par ces proclamations. Car, sans vouloir préjuger de ce que sera une volonté exprimée sur les bords de la Seine quand elle doit passer à sa phase d’exécution sur les bords du Congo, on peut sourire que notre pays proclame une fermeté en cette matière et prétende aller jusqu’au bout.

Pour les simples raisons que si, à l’extrême limite, on peut penser que quelques lampistes vont tomber, et les têtes les plus antipathiques sacrifiées, l’affaire des Diamants n’ira pas plus loin. Nous le disions la semaine dernière : au Congo tout ce qui rapporte est sous la surveillance d’un gang de kleptocrates. Les diamants, pierres mythiques par excellence, ne peuvent pas avoir été laissés à la « gestion » de quelques débrouillards ingénus. Des barons en sont.

Or, dans notre pays, plus la chaîne des responsabilités monte et s’approche du sommet, et moins il y a des chances que la justice soit faite et qu’on y voye clair. Ce n’est pas, dirait-on, à proprement parler une spécialité congolaise. Vrai. Mais au Congo, la faiblesse de la loi ; l’inexistence de la justice, la cencentration du pouvoir dans les mains d’un clan et de personnes qui se connaissent depuis les années 60 (il y a au Congo des personnes qui ont plus d’années de vie de ministre que de vie simple) : tout cela crée des précédents qui font douter de la détermination proclamée et des effets de menton.

Chez nous, quand la vérité gène on dément, on fait un procès factice ou on tape du poing sur la table. Pour la galerie. Ngouabi est mort, et nous en sommes encore à dire que depuis 1977, une vérité - la vérité - nous est dûe. Le Zaïre a officiellement accusé le Congo de « pomper » ses diamants, le ministre des Mines, Louis-Marie Djama, répondait en hurlant au « complot. Nous nous battrons et nous nous défendrons ! ». Sassou le dément, qui envisage des sanctions…

Le Congo a échoué à être élu à l’initiative PPTE (Pays pauvres très endettés) du FMI, aussitôt nos officiels ont mis en cause le mode de calcul dans les 57 milliards de CFA, surplus extra-budgétaires pétroliers dont on n’a pu justifier l’utilisation : « le mode de calcul est faux », tonnait Jean-Bruno Itoua de la SNPC ; « tout est clair », renchérissait Roger Rigobert Andelly, ministre de l’Economie.

Quant à l’affaire des disparus du Beach, le Congo promet la justice depuis 1999 et a multiplié les commissions. Cinq ans bientôt que pas un début de justice ne donne à penser que nous sommes déterminés à régler ce problème, dans la vérité et pour la réconciliation. Alors, guettons voir et comptons le nombre de têtes qui vont tomber dans l’affaire des diamants. Ne prenez pas de paris.

Benda Bika

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