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FESPAM 2009 : entre propagande et médiocrité.

Le festival panafricain de musique, FESPAM, est, ou plutôt devrait être l’évènement musical qui réunit tous les deux ans les artistes venus de toute l’Afrique au Congo. ²Mais cette année, il a bel et bien pris des allures de bamboula pour fêter la victoire pour le moins douteuse de Sassou à la présidence de la République.

Mascarades de tous genres

Décidemment, le Congo excelle en mascarades. Quand elles ne sont pas politiques, elles prennent une tournure culturelle. C’est bien le cas de la 7e édition du Fespam qui s’est tenue à Brazzaville du 03 au 07 août dernier. Sous le thème « La musique africaine à la croisée des chemins de la mondialisation », le FESPAM n’a été au fond qu’une occasion toute rêvée de fêter en grandes pompes la victoire sans effort de celui qu’on surnomme Otchombé et, qui, par voie de fait, va se succéder à lui-même après un quart de siècle de présence plus ou moins ininterrompue au pouvoir.

Feu d’artifice à défaut d’électricité dans la ville

En témoignent, tous les griots du PCT qui se sont succédés sur la scène du stade Eboué de Brazzaville et les feux d’artifices presqu’interminables qui ont dû coûter des millions. Ce délire pyromane a suscité d’ailleurs la stupéfaction de Claudy Siar, l’animateur de la soirée d’ouverture qui, certainement n’avait jamais vu autant de feux d’artifices pour un évènement culturel ; pas même pour le 14 juillet français. Mais quand on sait qu’au Congo, propagande et gaspillage des fonds publics vont de pair, on se dit tout juste, que ce journaliste /animateur est bien naïf de ne pas s’en être déjà aperçu. Mais cette dérive pyrotechnique, c’était peut-être une manière de compenser le manque de lumière électrique dans la ville...

Que Sassou ait voulu faire d’une pierre deux coups, cela ne fait aucun doute puisque le pseudo-chef d’Etat « réélu » a tenu que les élections aient lieu presqu’en même temps que le FESPAM malgré le report que demandait l’Opposition pour impréparation et pour non maîtrise du corps électoral.

Insipide sélection

Quant à la sélection des artistes qui y ont participé cette année, elle laisse à désirer. En dehors de gros calibres de la musique congolaise comme Les Bantous de la capitale qui fêtaient à l’occasion leur 50e anniversaire et Ferré du Congo-Kinshasa, le plateau n’était pas attractif dans son ensemble. Etait-il nécessaire de faire jouer au FESPAM un Roga-Roga d’Extra- Musica devenu lui aussi griot du gouvernement de Sassou nguesso ? Etait-ce le lieu de rejouer des morceaux comme « Toko voter Sassou » qui ont servi pour la campagne présidentielle ? On ne le dira jamais assez, au Congo, tout est corrompu ; les politiques comme les musiciens. C’est triste de voir Roga-Roga autrefois plein de talent se rabaisser à ce point en jouant la carte ethnique. Allez-y savoir pourquoi Koffi Olomidé, werrason, Papa wemba et les bisso na bisso, invités au festival, ont posé un lapin aux organisateurs.

On était, en revanche, pris de compassion pour Fanny, cette jeune artiste franco-guyanaise. L’entendre chanter innocemment ses chansons d’amour sur fond de zouk devant le public congolais sans enthousiasme faisait de la peine. La pôvre devait se faire une autre idée du Fespam et n’a eu droit qu’à un public mangeant à peine à sa faim et que les dirigeants voulaient gaver de chimères. Heureux le peuple qui chante et qui danse ?

Spasmes et Fespam

Au finish, le constat est sans appel, le Fespam 2009 a frôlé le fiasco. Trop d’absents parmi les artistes de renom, un public moins enthousiaste, beaucoup d’improvisations dans la programmation. Rien de tel pour rabaisser le niveau d’un évènement qui est le pendant culturel du FESPACO de Ouagadougou et que toute l’Afrique devrait nous envier. Et dire que le Congo est le berceau de la roumba ! Et la mondialisation dans tout ça ? Certainement dans les tiroirs du ministère congolais de la culture, comme d’habitude, et ou les conclusions du forum sur le thème de chaque édition finissent dans les poubelles. Mais alors, quelle idée de parler de mondialisation de la musique africaine quand nos artistes finissent tous griots de politiciens et dictateurs africains pour se faire des sous, au lieu d’investir leurs talents dans la World-Music ? La mondialisation de la musique africaine, ce n’est pas pour demain. C’est un leurre, surtout quand le soi-disant Festival panafricain de la musique se déroule au Congo, un pays de plus en plus isolé au monde.

Océane Lout - loutaya

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