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FRUSTRATIONS

L’Editorial de Benda Bika

Les Forumiers ont abondamment commenté ici la composition du nouveau gouvernement congolais publiée mi-août. Dans leur large majorité, ces commentaires traduisent une déception certaine et la déconvenue de qui voulait du neuf. Il n’y a pas eu de nouveauté. Il n’y a pas eu de changement. Les mêmes se sont remis aux affaires, avec la feinte surprise de qui découvre une pièce montée à son propre mariage.

On (l’opposition) pensait le moment d’une amnistie venue. On croyait à un gouvernement de large ouverture. On supposait une relève de la garde. Rien de tout cela : Thystère est à l’Assemblée ; Noumaz au Sénat et Mvouba est Premier ministre de fait. Des caciques. Le PCT a placé sous son rouleau compresseur même les quelques dosages ethniques entrevus naguère. De Ntsiba à Mvouba, en passant par Moussa, seule prédomine la jaquette PCT, pas trois régions, ni trois symboles géopolitiques d’union.

Peut-être est-ce mieux ainsi, disent les proches. Peut-être est-il mieux que le parti qui a gagné les élections prenne totalement les rênes du pouvoir, pour n’être que seul à rendre des comptes à l’heure des bilans ? On verra à la pratique ce qu’une omniprésence PCT donnera. Mais on peut déjà entrevoir les dangers q’un tel accaparement font courir à un pays à l’unité fragile et à la santé économique incertaine. Les frustrations des uns peuvent devenir bien vite des bannières politiques. Et tenir lieu de cause. Ntumi le prouve par l’absurde.

Cette monopolisation gratuite, émoussera vite les élans. Sassou Nguesso n’avait aucune menace pressante. Etant Président sans Premier ministre, n’ayant aucune opposition crédible en face, la composition de son gouvernement lui appartenait. Finis les temps où il fallait d’abord récompenser la fidélité des gardiens de barricade. Il devait trancher et marquer les temps nouveaux ; donner une leçon d’humilité à l’opposition en l’incluant dans le processus quitte à mieux l’étouffer. Ca n’a pas été.

Ensuite, une machine PCT aussi largement positionnée sur le terrain, aussi compacte, ne pourra rien faire de bon aujourd’hui qu’elle n’a pas su faire hier. Entre les copains et les coquins, comme écrirait F. Mitterrand, il n’existera pas les conditions du contrôle pour distinguer l’essoufflement de l’inefficacité des camarades. On sait être tolérants quand on est entre soi !

Enfin, le simple souffle pendulaire des idées et des actions politiques exigeait autre chose. Le mandat de l’actuel Président est de sept ans. C’est long. Arrivera forcément le moment où les fidélités deviendront des impatiences. Alors, il faudra décider dans l’urgence, et mettre de côté ceux des ministres et dirigeants actuels qui n’auront pas convaincus. Ce sera trop tard. On allongera la liste des frustrés pour rien.

D’aussi loin qu’on l’analyse, le gouvernement actuel ne tranche ni par le renouveau de ses membres, ni par leur jeunesse sur la place publique, ni par le symbole de régénérescence. Tout est fait comme si la démocratie pluraliste n’avait été qu’une parenthèse vite refermée. Et que le parti d’aujourd’hui, écrasant en nombre et en moyens, n’avait rien eu à se reprocher dans les échecs passés.

Le Congo n’a jamais su réussir ses alternances, en réalité. Youlou fut chassé, Massamba-Débat aussi, quoi qu’on en dise. Ngouabi fut tué ; Yhombi déposé ; Sassou battu aux élections et Lissouba à la guerre. On croyait le pays mûr pour, au moins, entrer dans le 21ème siècle en tirant les leçons de ce passé de tumulte. J’ai peine à croire que nous en ayons pris le chemin, avec les dirigeants déjà nommés, et/ou avec ceux à nommer.

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