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Il paraît…

Le pays suffoque, et l’impression d’un laisser-aller généralisé est partout. A part les séances d’interpellation du gouvernement à l’assemblée, la communication officielle est en panne. Les explications sont données dans leur contradiction, ou amputées. Alors, là où on ne dit pas, où on n’explique pas, où on ne commente pas, où on n’indique rien d’officiel, c’est la rue qui s’empare de l’information, la commente et l’enfle à son gré.

« Il paraît que … » était une formule courante de mon temps. Elle est désuète, mais aujourd’hui la machine à tisser la parole fonctionne autant. Alors de la masse d’intox et de l’inflation d’ivraie, il faut tenter de tirer une certitude. Le pays agonise, mais les yeux qui le voient ne sont pas dans les corps qui le vivent.

Aucun des ministres du gouvernement n’a du mal à faire sa douche le matin : la pénurie d’eau est donc inexistante. Aucun d’eux, ne risque de voir son frigo griller sous les coups de yo-yo d’une électricité qui ne vient que quelques heures, avec ses hauts et ses bas - visibles.

Aucun d’eux, peut-être, ne sait qu’il faut avoir du muscle pour avoir du carburant, car il faut y jouer des coudes. Et du poing. A moins que les taxis dont ils sont les propriétaires ne passent leur temps à inventer des astuces pour retarder les versements : « aujourd’hui, c’était la journée d’attente du carburant chef !… »

Le pays suffoque : la communication officielle se fait hésitante. Radio et télé officielles sont boudées par les officiels eux-mêmes. La loi sur la presse est encore en attente de mise en application, mais Brazza compte déjà sa radio et sa télé privées. Sans texte réglementaire. A ceux, associations ou institutions privées, qui piaffent d’impatience, les ministres disent : il faut attendre la loi.

Le ministre Andély possède t-il six chantiers de construction à Brazzaville ? Le maire central a-t-il demandé à ses administrés de rentrer dans leurs villages s’ils n’étaient pas contents de sa gestion ? Le ministre Okombi-Salissa se serait-il vanté de ne plus jamais être de ceux qui iront un jour à pied ?

La famille Sassou a-t-elle placé le Congo en coupe réglée au point qu’aucun petit marché ne puisse lui échapper ? La lettre ouverte de Ngouolondélé sur l’atmosphère de fin de règne au pays aurait-elle été inspirée par Sassou lui-même ? Ntumi serait-il l’épouvantail du pouvoir qui s’en sert pour mettre le Pool à genoux ? « Il paraît que… ».

Je ne critique jamais un confrère. Mais « Le Choc » mérite mon courroux passager. Il a titré : « Le Célibat de Kabila relève d’une impuissance congénitale ». Le journal entendait réagir à la guerre des médias qui fait rage entre Kinshasa et Brazzaville sur un prétendu coup d’Etat déjoué. La rumeur comme information. Défendre une Nation à coups de grossièretés à la Une peut se faire aujourd’hui. Il paraît…

Benda Bika

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