email

Jahwise

Un rasta franco-congolais qui ne mâche pas ses mots

Quand tous les musiciens congolais ne rêvent que d’aller en Europe pour enregistrer leur album, Jahwise suit une démarche radicalement inverse. Ce rasta franco-congolais de 31 ans qui vit en France a choisi d’enregistrer son dernier album "JUSTICE" à Brazzaville. Un fou ? Pas du tout, Jahwise a les pieds sur terre même si parfois ses prises de position sont limites suicidaires.

Nous avons contacté Jahwise via son site internet, il nous a tout de suite répondu avec gentillesse et efficacité. D’une longue et très amicale discussion par messenger nous avons tiré l’interview qui suit :

Ya Sanza : Mbote camarade
Jahwise : Wa faso

YS : Fioti, comme le pays, Et toi ?
J : Ouais on va se battre pour que ça change sinon tout va bien grâce à dieu

YS : Je voudrais que tu me parles des aspects professionnels de ton séjour à BZV ?
J : Je suis venu pour 3 mois de novembre à janvier. J’avais en tête de faire un album dans mon pays natal malgré le manque de matériel du fait des conséquences de la guerre. Arrivé sur place j’ai rencontré la communauté rasta du congo.
J’ai formé un groupe et on a commencé à répéter, mais quand ils ont entendu les paroles, et ce que je revendiquais... Certains n’ont plus voulu faire parti du projet. Il a donc fallu trouver d’autres musiciens qui était prêts à s’engager avec moi en dépit du contexte.

_ Nombreux sont ceux qui ont tenté de me décourager, de me sensibiliser au fait que je prenais des risques pour ma vie et pour celle de ma famille au congo.
J’ai eu les mêmes problèmes avec les techniciens, ingénieurs... mais finalement nous avons fait l’album.
Finalement j’ai travaillé avec un groupe déjà existant "Les Beaux Arts" qui partage mes convictions.
L’album "JUSTICE" est sorti fin décembre 2003 au Congo. C’est une autoproduction réalisée au studio KEBANO à Brazzaville dans des conditions qui n’ont rien à voir avec celles que l’on peut trouver en France. C’est sur que le studio n’était pas très perfectionné, on a fait avec les moyens du bord mais je voulais mener mon projet à terme.
Le disque est distribué chez Ndiaye à Brazzaville mais pas encore à Pointe-Noire.

YS : Penses-tu revenir bientôt au Congo ? ?
J : Je pense revenir d’ici quelques mois pour faire un concert au pays, mais étant donné que c’est un gros investissement je ne veux rien laisser au hasard et je suis en train de m’organiser.
Je voudrais aussi prendre contact avec des gens qui agissent, ce n’est pas toujours évident de faire des aides ponctuelles mais j’aimerais bien travailler avec une association du Congo pour faire des choses concrètes à long terme.
Les gens portent aussi de l’intérêt pour les artistes comme moi qui dénoncent les injustices, la corruption et tout ce que le peuple pense sans pouvoir l’exprimer sans risques de représailles.

YS : Oui tu sais de quoi tu parles puisque tu as essuyé une fusillade lors de ton séjour à Brazzaville (Voir le lien). A ce propos, penses-tu vraiment que l’origine de ces coups de feu est l’interview que tu as donnée à radio liberté, ou ton look rasta directement associé, par les cobras, à l’imagerie ninja ? ?
J : C’est justement Ce que je voudrais savoir, mais je pense que les coups de feu sont plus liés à mes propos qu’à mon look. Ma vision est peut-être un peu simpliste mais je dénonce la politique du pays et je reçois en échange des coups de feu. C’est vrai que je ne vais pas chercher plus loin
Je n’ai aucun rapport ni avec les ninjas ni avec les cobras, les rasta ne tiennent pas les armes c’est là toute la différences. Nous ne sommes pas là pour tuer mais pour dénoncer et c’est là qu’est tout le problème, la musique est porteuse de messages et le pouvoir sait que l’artiste est écouté, c’est en ça qu’il lui fait peur, alors il tente de faire peur à l’artiste ou même de l’éliminer.
Menace réelle ou intimidation, je ne sais pas, mais ce n’est pas avec ce genre de truc qu’on va me faire taire.

YS : Tu te sens donc profondément attaché à ton pays maternel, te serait-il envisageable d’y vivre au moins à mi- temps ou ce monde t’est-il devenu étranger ? ?
J :

Ce monde fait partie de moi comme je te le disais c’est une partie de ma culture qui fait aujourd’hui l’homme que je suis, je pourrais même y vivre à plein temps.
Je veux aussi faire passer mon message en France pour combattre l’inertie dont est victime le congo, me faire connaître au pays est une chose mais pour vraiment activer les choses, je dois aussi faire passer mon message dans d’autres pays et notamment en France.

YS : Quelle est ton audience en France ? ?
J : Je monte, je monte mais ce n’est pas évident de percer car les grosses majors comme Universal ont le monopole. Depuis mon second album "Paris-Congo" je suis sous contrat avec XIII bis music, j’ai beaucoup moins de chose à assumer seul.
Je fais pas mal de Concerts mais je suis à la recherche d’un tourneur car XIII bis ne prend pas ça en charge.
Mon objectif premier est de retravailler l’album "Justice" pour qu’il soit commercialisable en France.
Je fais beaucoup de radios locales et mes différents albums sont diffusés dans pas mal de radios. Mais je n’ai pas encore accès aux grosses radios nationales. En ce qui concerne la télé j’en ai fait quelques unes et je suis en deal avec une chaîne du câble.

J : Je voudrais profiter de l’occasion pour passer un message : Notre frère rasta Ras Naty Baby Ky est injustement emprisonné à l’île Maurice pour un crime qu’il n’a pas commis. Maintenu en détention provisoire depuis 1 an sans aucune charge contre lui. Le Magistrat siégeant à la cour de Mahébourg à refusé sa remise en liberté conditionnelle estimant que son incarcération ne remettait pas en cause la liberté des droits de l’homme.
La présomption d’innocence est une fois de plus bafouée.
A la sortie de son album MILITANT, il attend JUSTICE dans un cachot aux murs marqués par l’histoire sanglante de Kaya.
Nous exigeons qu’il soit libéré sans délai.


les paroles qui fâchent

LA POLITIQUE DU PERROQUET

C’est la politique du perroquet, une fois hissés au sommet, ils s’empressent de tout oublier.
Mais il ne faut pas oublier qu’une pirogue n’est jamais trop grosse pour chavirer.
C’est la politique du perroquet, une fois hissés au sommet, ils s’empressent de tout oublier.
Et les parents des victimes réclament justice.

Tu disais que tout aller changer, fini le chômage et la pauvreté, que tu combattrais l’injustice
une fois hissé au sommet…
Mais depuis le temps rien n’a changé, les droits de l’homme ne sont pas respectés et les fonds publics sont toujours détournés.
Et tout le peuple est toujours affamé alors qu’on rêvait d’un peu plus de liberté,
Mais tu nous as tous oublié.

Refrain :
C’est la politique du perroquet, une fois hissés au sommet, ils s’empressent de tout oublier.
Mais il ne faut pas oublier qu’une pirogue n’est jamais trop grosse pour chavirer.
C’est la politique du perroquet, une fois hissés au sommet, ils s’empressent de tout oublier.
Et les parents des victimes réclament justice pour les crimes contre l’humanité.
(Bis pour le refrain entier)

Les enfants qui meurent dans les rues pour des conflits politiques,
Des familles qui meurent de faim dans les ghettos,
Les pleurs qui coulent sur nos visages, ne nous empêcheront pas de voir la vérité.

Refrain (bis)


Discographie

"L’UNIFICATION"

Enregistré en Afrique, au Burkina-Faso, on retrouve déjà ses influences de la musique traditionnelle africaine dans cet album reggae chanté en français.

Produit par Seydonie Production, on y découvre des choristes du pays ; Awa Mélone et Elvire dont l’accent ajoute un soupson d’exotiste non négligeable.
Basse : Yanogo Grégoire
Synthé : Yanogo Claude

"PARIS-CONGO"

Une production Section Urbaine Crew.
Janvier 2003
Textes et Chants : Jahwise

Basse : Gildas Brouet,
Guitares : Bruno Clement, Eric Zorco.
Musiciens additionnels :
François Sadin (saxo), Chritophe Devaut.
Feat : Skl
Choristes :Virginie "Botiba" & Virginie Divouron "Vivi".
Arrangement, programmation, et saxo : Désiré Traoré

"JUSTICE"

Sorti fin décembre 2003 au Congo.Il comporte 6 titres dont L’unification dans une troisième version.

Les titres :

  1. Justice
  2. Marcus Garvey
  3. Tout ça a trop duré
  4. Politique du perroquet
  5. Mabina
  6. L’Unification

Les musiciens :

 Choeurs : Babindamana Jubline, Louzolo Antoinette, Landou Peje.
 Guitare Basse : Alphonse Babindamana.
 Guitare rythmique : Jérémie Bonnet.
 Claviers : Babindamana Christ Yohana.
 Cuivres : Mafuta Bruce, Bigata Charles, Batsimba Charles.
 Batterie : Omombo.

 Ingénieur du son : Vinalot.

Laissez un commentaire
Les commentaires sont ouverts à tous. Ils font l'objet d'une modération après publication. Ils seront publiés dans leur intégralité ou supprimés s'ils sont jugés non conformes à la charte.