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L’étrange destin de Ras Kaya, réfugié congolais et disciple de Bob Marley

05/02/2005

"C’est grâce à Bob Marley que j’ai découvert la musique et le reggae. La première fois c’était en 1980, j’ai écouté Bob sur un 33 tours et même si je ne comprenais pas les paroles, Bob m’a parlé", confie Ras Kaya.

En 25 ans, le parcours de Ras Kaya a été tumultueux, mais sa "communication, presque une communion," avec Bob Marley n’a pas faibli.

A Lagos, Ras Kaya, de son vrai nom, Joseph Anicet Kola, 42 ans, joue plusieurs fois par semaine au Nimbus, un petit bar en plein air d’Ikoyi, au coeur de cette mégapole de 15 millions d’habitants, la plus peuplée d’Afrique.

Son répertoire reprend les standards de la légende du reggae, décédée en 1981 et dont on célèbre actuellement en Ethiopie le 60è anniversaire de naissance, ainsi que des titres des Ivoiriens Alpha Blondy et Tiken Jah Fakoly, et ses propres compositions.

Dans les années 1980, Ras Kaya "apprend la musique dans la rue", monte un groupe à Brazzaville et rencontre un certain succès malgré les difficultés.

"A l’époque le tribalisme régnait au Congo, c’était l’instabilité", raconte le chanteur. "Aucun promoteur ne voulait mettre d’argent dans le reggae qui était mal vu".

Pour fuir la guerre et tenter sa chance, Ras Kaya décide de s’exiler et arrive en 1989 au Gabon avec seulement 25.000 CFA (38 euro) en poche, mais très vite, commence à jouer dans les cabarets de Libreville.

Il se retrouve en Côte d’Ivoire au début des années 90, encouragé par les succès d’Alpha Blondy. "Là aussi j’ai vite été dans le circuit, j’ai joué avec Alpha, avec (le Sud-Africain) Lucky Dube", se souvient le rastaman, ses dreadlocks oxygénées dans les yeux, les mains dans sa salopette rose.

En 1997, il ouvre à Abidjan le Café des Arts où se retrouvaient artistes, touristes et jeunes des quartiers, et qui devint vite un must de la capitale ivoirienne encore florissante.

La politique et la guerre le rattrapent : à Noël 1999 un coup d’Etat plonge la Côte d’Ivoire dans l’instabilité. "Le racisme et la xénophobie devenaient trop forts, alors j’ai voulu rentrer au Congo avec mon album Cessez le feu. Je croyais qu’il fallait, comme Bob Marley l’avait fait en Jamaïque, délivrer ce message à mes compatriotes".

Mais le retour se passe mal : "Les autorités ont saisi les 50.000 cassettes, et des hommes en armes m’ont enlevé. Les yeux bandés ils m’ont conduit dans un camp où j’ai été tabassé, torturé, humilié pendant dix jours. On m’a arraché les cheveux".

Il est reconnu par un admirateur, un capitaine de l’armée qui le fait évader.

Blessé d’un coup de baïonnette au ventre, il rallie Pointe Noire (dans le sud du Congo-Brazzaville) caché sous un train, monte sur un bateau et gagne le Nigeria où il se déclare réfugié.

Depuis, Ras Kaya a remonté une guitare "avec des morceaux ramassés dans une décharge" et un groupe, AfricaRoots. Fin 2004 il a sorti un double album au Nigeria.

"J’ai trouvé des amis qui m’ont aidé et j’ai eu de la chance puisque je vais faire une tournée en Asie. Je suis comme Bob Marley, je ne peux pas m’arrêter de jouer, ce combat c’est ma vie", explique Ras Kaya.

"Ce n’est pas que de la chance", estime Chike Nwagbogu, directeur du Nimbus, "Ras Kaya a un talent fou, il a le feu, c’est le prochain Bob Marley !".

http://actu.voila.fr/

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