Il est certain que l’information parue à BERLIN le 12 janvier 2006 et que signale l’AFP fera des heureux, en particulier notre ami Serge Bilé qui se bat pour cette cause depuis longtemps. (Il a entre autres réalisé un documentaire, écrit un livre sur la question des Noirs dans les camps nazis).
En effet, l’armée allemande d’alors - La Wehrmacht (en photo ci-dessus) - a exécuté au moins 1.500 soldats d’Afrique noire combattant dans des régiments français après l’entrée des troupes allemandes en France en 1940. Ce n’est pas Serge Bilé qui le rappelle, mais un historien allemand, Raffael Scheck, dans une longue et riche tribune à l’hebdomadaire Die Zeit, tribune parue le jeudi 12 janvier, et qui a sans doute donné des boutons à certains...
L’historien allemand souligne que "Les sources d’archives font état de 1.500 Noirs" exécutés pendant l’avancée des troupes allemandes vers l’Ouest" mais, ajoute-t-il, "le nombre réel devrait être au moins le double". Ceci est d’une importance capitale puisque, contrairement au début de l’avancée de l’armée allemande en Union soviétique un an plus tard, "il n’y avait en 1940 pas de directive (...) exigeant l’exécution de groupes spécifiques de prisonniers de guerre", souligne ce professeur.
Selon Raffael Scheck, "il y avait en Allemagne une tradition de stigmatisation des soldats noirs qui remonte au temps des insurrections dans les colonies allemandes en Afrique du sud-ouest et de l’est (1904 à 1907)". Et cette propagande hostile aux soldats noirs a été "renforcée et ravivée" par les nazis, précise-t-il.
Cet historien est une autorité dans son domaine. Chef du Departement d’histoire européenne à l’université de Colby, dans l’Etat du Maine, aux Etats-Unis, il va publier cette année un livre qui risque de soulever des polémiques et qui s’intitule : Hitler’s African victims : the German Army massacres of Black french soldiers in 1940. Que nous traduirions sans élégance : "Les victimes africaines d’Hitler : L’Armée allemande et le massacre des soldats francais noirs en 1940"
Le livre sort en mars prochain aux Etats-Unis, dans la prestigieuse Cambridge University Press (la plus ancienne maison d’édition du monde, reconnue pour la qualité et l’excellence de ses publications)...
Dans ce livre du chercheur allemand, selon le résumé fourni par l’éditeur, nous apprendrons enfin comment, durant sa campagne contre la France en 1940, l’armée allemande a massacré plusieurs milliers de soldats noirs (les fameux tirailleurs sénégalais) alors qu’il n’y avait aucun ordre formel de liquidation de ces prisonniers de guerre. Le racisme se tranforma en ordre tacite de liquidation, et ces massacres furent approuvés, encouragés par Hitler et son régime nazi...
L’article paru en Allemagne dans le Die Zeit est donc du coup comme un petit test avant la parution de la grande bombe que sera son livre. La vérité prend toujours les escaliers, mais arrive le plus souvent avant le mensonge qui a pris l’ascenseur, dit-on.
Je suis curieux de voir quelle maison d’édition assurera la traduction du livre en France... et surtout en Allemagne !
Bref, notre ami, le journaliste ivoirien Serge Bilé peut souffler avec ce "soutien" de poids, puisque l’Ivoirien avait évoqué les massacres et les exécutions massives de soldats de couleur lors de la progression des troupes allemandes en France (lire ou relire son livre "Noirs dans les camps nazis" paru l’an dernier). Sauf qu’en France, malgre l’accueil du public, le livre a été pris par beaucoup pour des ratiocinations d’un petit militant qui devrait d’abord apprendre les bases de l’Histoire. Au point que Bilé a raté le Prix "France-Télévisions Essais", semble-t-il parce que ses affirmations n’étaient pas crédibles et qu’on attendait que les Allemands se prononcent sur ces questions ! Et maintenant que les Allemands se prononcent, comme on dit chez les Ivoiriens : "On fait quoi ?"...
