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Littérature, postérité et dimensions du sexe des Noirs

Littérature de combat

Dany Laferriere

Hier, à Montréal, la discussion avec Dany Laferrière s’est prolongée jusqu’à 1 heure du matin chez notre ami commun Rodney Saint-Eloi. Dany a en horreur ce qu’íl considère comme une certaine littérature drapée de bonne conscience. Il s’est insurgé contre ces prétendus écrivains négro-africains qui agitent la nécessité d’une « écriture de combat ». Selon lui, il est d’ailleurs intéressant de voir que parmi tous les livres écrits pendant les guerres mondiales, ce sont ceux des « délateurs » ou « collaborateurs » qui ont traversé le temps et non ceux de ceux qui pratiquaient la dénonciation : c’est le cas de Louis-Ferdinand Céline. Si les livres de celui-ci ont un impact intemporel, c’est que l’auteur a su laisser parler la littérature. Céline mettait la force de sa pensée dans la truculence de sa langue, hissant toujours la littérature à un tel sommet que ses détracteurs devaient réfléchir dix fois avant d’opposer quelque contradiction.

La possibilité d’un livre

Laferrière pense que la France a une attitude pour le moins surprenante en ce qui concerne les livres « qui font rire ». Elle couronne alors d’ordinaire les oeuvres qui véhiculent un pessimisme, un humour noir, le tout chargé de phrases lourdes. Et il est, dans ces conditions, difficile d’imaginer que derrière la drôlerie se cache des enjeux littéraires importants. La France préfère ainsi ce qui est opaque, serré, parce que pour elle, la postérité et la nébulosité sont liées, quitte à être en déphasage avec le lectorat. J’ai d’ailleurs cru un instant que Dany faisait allusion à La possibilité d’une île de Houellebecq que je venais d’acheter dans une grande librairie montréalaise et qu’il a feuilleté d’une traite, avant de poser son verre de rhum sur les 485 pages de ce roman... et de passer a autre chose : son livre Le gout de jeunes filles paru chez Grasset ( sortie en collection de poche Folio chez Gallimard l’annee prochaine). Il sort prochainement un nouveau livre intitulé Les annees quatre-vingts dans la vieille Ford aux editions Mémoire d’encrier ( dirigées par notre ami Rodney Saint-Eloi)...

On ne peut pas compter sur les morts

Le grand écrivain haïtien Frankétienne

Et puis, il y a ce grand homme que nous avons eu en ligne depuis Haïti : Frankétienne. Il vient de sortir Anthologie secrète aux éditions Mémoire d’encrier (www.memoiredencrier.com) à Montréal.
L’écrivain est considéré comme le nouveau Joyce. Ce que semblait presque tout de suite mettre en doute Christian Sauvage en 2004 dans le Journal du Dimanche : « On dit de lui qu’’il est est un nouveau Joyce. A voir. Mais c’est un grand écrivain et un sacré personnage » !

Ce n’est pas une surprise pour moi si Frankétienne est sur la liste du Nobel de Littérature 2005. Assurément l’un des grands écrivains de ces temps. Dany me raconte qu’un jour Frankétienne le prit à part pour lui confier :

« - Mon petit Dany, je vais bientôt mourir...

« - Ah bon ?

« - Je te fais confiance pour continuer dans la lancée de mon œuvre, parce que notre ami Emile Ollivier est mort, et on ne peut pas compter sur les morts ! »

De Jacques Stephen Alexis à Serge Bilé :
Le sexe surdimensionné des Noirs

Et puis, vers la fin de la soirée, comme nous évoquions le titre du prochain livre de Serge Bilé : La légende du sexe surdimensionné des Noirs. Laferrière a rigolé longtemps avant de préciser : « je préfère la formule de Jacques Stephen Alexis qui parle de sexe surnuméraire du Noir, laissant entendre qu’au moment de l’accouplement, le sexe du noir prend de telle proportions qu’on peut en conclure qu’il porte deux organes ! J’ai évoqué ça dans Comment faire l’amour avec un Nègre sans se fatiguer » . ..

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