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Mme Matsocota brise le silence

"Ma vie avec Lin Lazare Matsocota",c’est le titre évocateur de l’autobiographie que vient de publier Marceline Fila Matsocota aux éditions l’Harmattan. La veuve du premier procureur de la république du congo assassiné en aout 1960 sous prétexte d’un coup d’Etat préparé avec Joseph Pouabou et Anselme Massouémé, ne lésine pas sur les mots.Au delà du récit qu’elle y fait de sa vie aux cotés de cette figure politique,ce livre est un témoignage poignant sur les victimes de la betise politicienne qui ne cesse de se perpétuer dans ce pays.

Il y a bien de gens à qui la conférence nationale souverainne congolaise de 1991 auraient pu accorder la parole. Marceline Fila Matsocota qui fait partie de ceux-là a décidé de briser son silence autrement. C’est du moins ce qu’on peut dire des 124 pages qu’elle vient d’écrire dans un style tout à fait simple et plausible.

Elle y aborde aussi bien sa jeunesse, sa rencontre avec le jeune étudiant en Droit que fut Lazare Matsocota en France que les péripéties qui ont jonché leur vie commune.Le point saillant de ce livre reste cependant la courte vie politique de celui qui fut nommé Procureur de la République du Congo au lendemain de l’indépendance. On découvre dans le récit de Mme Matsocota le brillant et téméraire étudiant que fut cet Homme.

On s’aperçoit alors qu’il n’était pas arrivé au poste de procureur par hasard. Son engagement au sein de la fédération des étudiants d’Afrique noire de France et de l’association des étudiants congolais prouve que le jeune Matsocota avait des idées à faire valoir et des ambitions politiques nobles.On comprend donc bien sa décision de rentrer au bercail après ses études, convaincu qu’il fallait mettre ses compétences au service de son pays.Un reve que , malheureusement, il ne put réaliser qu’en cinq ans sous l’oeil aigri de certaines tetes felées de la classe politique de ce temps-là.

Une fois de plus, le nom de Pascal Lissouba ressort parmi les commanditaires des assassinats crapuleux de Matsocota, Pouabou et Massouémé.C’est aberrant de constater que malgré la conférence nationale qui était sensée écairer les congolais sur les assassinats perpétrés contre des hauts cadres,le peuple congolais ait porté à la tete de son pays, un homme impliqué, sinon responsable, à en croire Mme Matsocota, d’un acte de barbarie aussi répugnant.Hélas, ces trois premières victimes n’ont pas été les seules à avoir été sacrifiées à l’autel de l’intolérance de certains de nos politiciens.Beaucoup d’autres y sont passées puisque la meme tolérance a fini par se transformer en guerres ethno-tribales dont les conséquences pèsent encore sur notre pays.

On ne le dira jamais assez, au delà du tribalisme , le congo paie le lourd tribut d’un passé trop entaché de sang de victimes innocentes.Trop d’ assassinats restés impunis,de non-dits et de vérités camoufflées font retarder le retour de la paix et de la réconciliation véritables. A défaut de subir l’impunité, le peuple congolais a au moins le droit de connaitre la vérité des faits sur cette épuration ethnique organisée depuis des années.Peu de congolais auteurs, victimes ou observateurs de ces abus, sont animés du souci de devoir de mémoire dont a fait montre Mme Matsocota. De surcroit, ce livre pourrait constituer un plaidoyer pour les enfants -orphelins des assassinats politiques au congo.

Yengui Matsocota, fils unique du defunt premier procureur de la République du Congo y illustre un exemple choquant du sort réservé à ces enfants abandonnés à eux-memes quand bien meme ils portent le sang et le nom d’un digne fils du pays.Ils sont si nombreux dans son cas qu’on en ferait une liste à n’en pas finir.Le pire, c’est qu’au Congo, les traumatismes causés par des actes de barbarie politique n’ont ni coupables, ni remède.L’histoire se répète et continue de faire des enfants traumatisés pour lesquels personne n’a d’égards.


Par : langangou
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