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Ebembé ya Adoula

La campagne de Sassou, une bérézina intellectuelle

Une légende disait jadis que Sassou ne disait rien de bon en public quand il prenait la parole. L’actuelle campagne politique (2021) a donné raison aux colporteurs de ce mythe. On a atteint le délire verbal à certains moments.

Nombre de leaders ne savent pas que la communication est une science où l’improvisation n’a pas sa place. Quand on est piètre orateur, les chances sont grandes de basculer dans le ridicule. C’est ce qui est arrivé au candidat infatigable surnommé aussi « Monsieur j’assume » durant la campagne présidentielle de 2021.

Hagard, peu bavard

Papi Sassou n’est pas une pie. Très peu bavard, il excelle dans le verbiage. Autant son homologue, feu Mobutu, fut une bête de scène (Ahmed Sekou Touré également), autant Sassou-Guesso passe pour bête lorsqu’il se met en scène. D’où sa phobie des grands discours et surtout des débats contradictoires. Les meetings sont chez lui un mythe redouté. Mais grâce à l’échappatoire des huis-clos en mbochi à Edou, l’opinion nationale et internationale s’est tout de même fait une petite idée de ses tares de langage quand bien même le soldat Sassou eut pour premier métier celui de moniteur d’école primaire. A sa décharge, il ne l’exerça que le temps d’un feu de paille.

Nié nié

Depuis le premier coup d’Etat de 1977, Papi Otchombé est rattrapé par l’histoire. Les pratiques du discours inhérents aux fonctions présidentielles sont en train de lui renvoyer à la gueule ses principales limites intellectuelles. Désormais les seules articulations intelligibles de sa production oratoire sont des anaphores empruntées à l’impayable Mobutu Sésé Séko Waza Banga : « Nié nié nié nié », onomatopées qui ont ironiquement pour synonyme le substantif « caca » en français.

Freud aurait dit que le premier stade de l’aliénation mentale est le coq à l’âne dans la pensée du sujet. Le mari d’Antoinette Tchibota est-il en train de sombrer dans la folie ? On se le demande. De Pointe-Noire à Kinkala, en passant par Dolisie, les supporters les plus zélés ont eu du mal à supporter les ânonnements de leur poulain. N’eut été leur soutien inconditionnel motivé par des coupures de 2000 frs cfa per capita, ils auraient fait meetings buissonniers.

Discours décousu, débit oratoire trainant, structuration verbale infantilisante, signes d’addiction éthylique, trous de mémoire...autant de symptômes qui ne trompent pas sur l’état de dégradation mentale inquiétante de l’individu. Les fans les plus irréductibles (dont sa conseillère en...communication, sa propre fille Claudia Sassou), ne savent pas où se cacher quand l’empereur tient un microphone. Admirateurs et détracteurs sont témoins d’une véritable bérézina rhétorique. « C’est ça qui nous a dirigés depuis quatre décennies ? » s’étonnent-ils. Et pourtant « c’est Sassou ou rien » surenchérissent les adeptes.

Les safous de Sassou

Safou, kwanga, dikondi, Ebembé ya Adoula ont eu bon dos sur le chapitre de l’autosuffisance alimentaire ratée. Pour son malheur l’articulation de ces éléments de langage s’est produite dans le Congo méridional, une zone linguistique où se pratique le « kikongo ya l’Etat » une langue qui est du sanskrit pour l’ancien élève de l’Ecole Normale de Bounda. Il la baragouine à peine.

A l’instar de ce personnage de Dostoïevski qui ne savait pas parler le russe alors que c’était la seule langue qu’il connaissait, Sassou ne sait parler aucune langue du terroir tandis qu’il ne maitrise pas le français, la langue officielle. Sa propre langue, le mbochi, Sassou l’assassine.

Et lorsque notre Bokassa national s’essaie au chant, c’est carrément un massacre. Sur le registre musical, n’est pas feu Bernard Kolélas qui veut. Car Bernard Bakana Kolélas connaissait le diapason et savait donner le La quand il voulait galvaniser les foules.

Question : où donc L’empereur d’Edou a-t-il passé son enfance puisque les langues véhiculaires et vernaculaires congolaises passent pour des langues étrangères à ses oreilles ?

Import/Export

Au chapitre de l’autosuffisance alimentaire, le camarade nyongologue ne manque pas de cynisme. Quarante ans après son programme alimentaire, il fait mine de s’étonner que ses compatriotes importent encore safou et volaille surgelée. Un lanceur d’alerte congolais a d’ailleurs fait remarquer la dichotomie selon laquelle le peuple doit se contenter de safous (Dacryodes edulis en latin) tandis que à Oyo les Nguesso s’arrogent le pétrole, le bois, l’or et le diamant.

Signes et consignes

En conclusion, c’est l’occasion ou jamais, le 21 mars 2021, de faire taire définitivement Sassou crédité de 5% d’intentions de votes (contre 8% en 2016). Papi Sassou nous a servis une campagne digne d’un barman ivre. Son charabia a fini par irriter la nature. Les abeilles l’ont attaqué à Kinkala. La consigne est claire : « Finissons-en ! »

Le Pool est un champ métaphysique où se chante le requiem des dictateurs. En 1977, un chien sorti de nulle part, urina sur Marien Ngouabi à Boko. On connaît la suite. Ngouabi perdit la vie dans l’année. A Kinkala, chef-lieu de la région, des frelons venus on ne sait d’où ont foncé sur le couple Sassou/Tchibota, obligeant monsieur et madame de prendre la fuite. Cette attaque de guêpes au pays de Matsoua est un très mauvais signe.

Thierry Oko

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