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Côme Manckassa de l’UCR s’est rendu à la Consultation de Sassou

L’Union Congolaise des Républicains, parti du professeur Côme Manckassa, a été reçue à Brazzaville, le 4 juin 2015, dans le cadre des Consultations initiées par Denis Sassou-Nguesso.

La délégation de l’UCR a été personnellement conduite par son fondateur, le sociologue et homme politique C. Manckassa qui a fait le déplacement de Brazzaville depuis Paris en compagnie de Roger Ndokolo, secrétaire national à la coopération et aux affaires extérieures du parti et de Théophile Mboukou-Balossa, secrétaire général. Fondée voici un peu plus de vingt ans, cette formation politique n’avait plus fait signe de vie depuis les élections de 2002.

A quatre-vingt ans, Côme Manckassa à la tête de L’UCR depuis vingt ans, a joué aux abonnés absents ces dix dernières années. La presse a eu beau jeu de parler d’un coma dont l’UCR serait sorti en participant aux Consultations de ce mois de juin.

Il est vrai qu’en séjour en France depuis un certain temps, personne ne s’attendait de revoir l’ancien candidat à la présidence sur la scène politique. C’était sans compter avec la détermination de ce pourfendeur de la doxa , auteur d’un récent puissant essai politique « France, grandeur perdue » qui réduit en pièces les partisans de la décolonisation.

La volonté du professeur Manckasa de donner un nouveau souffle à sa formation politique a probablement déterminé le voyage de Brazzaville. La présence de Roger Ndokolo et de Théophile Mboukou-Balossa à ses côtés confirme cette volonté d’apporter du sang nouveau au sein de l’UCR.

A sa sortie du Palais du Peuple, le professeur C. Manckassa a dévoilé la teneur de l’échange qu’il a eu avec Denis Sassou-Nguesso.

« Nous avons tenu à rappeler au Président de la République le principe de toute démocratie qui est faite d’alternance » a-t-il confié au micro de Télé-Congo.

Féru d’épistémologie hégélienne, Manckassa a probablement voulut distinguer « démocratie populaire » des pays du Pacte de Varsovie où le président du parti unique exerce le pouvoir à vie et « démocratie parlementaire » des pays d’Europe de l’Ouest où le changement est la règle.

Selon Roger Ndokolo, l’UCR n’est ni de l’Opposition ni de la Majorité. Elle est au centre. Le centre qui regroupe une dizaine de partis autour de Jean-Michel Bokamba Yangouma militerait pour le « compromis ». Aussi, le dialogue prôné par le gouvernement (si jamais il a lieu) sera un moment de consensus où les partis du Centre joueront un rôle majeur. Inutile de cacher que le Congo vit actuellement une période où la « tension est palpable » en raison du débat sur le changement ou non de la Constitution. A en croire son secrétaire national à la coopération, L’UCR attend le moment opportun pour se prononcer sur le débat constitutionnel. Autant dire qu’on pourra compter sur l’UCR pour décrisper une actualité congolaise où il est clair que les partis de l’Opposition sont en train de ronger leur frein en attendant 2016.

Quid Côme Manckassa, fondateur de L’UCR ?
Ancien ministre de la Culture de Lissouba, C. Manckassa a connu quasiment tous les pouvoirs depuis Youlou. Egalement ancien journaliste à La Semaine Africaine
sous la première République, sa mémoire gère une foule d’archives politiques et historiques. En plus ce professeur de sociologie a enseigné la science d’Auguste Comte à la Fac de Brazzaville et formé une multitude de cadres congolais. Autant dire aussi qu’il connaît les 2/3 du personnel politique congolais. Certes, selon la distinction wébérienne du "savant et du politique" l’homme de sciences devrait se méfier du métier de "politique".

Il ne reste pas moins que, politologue, cet enseignant à la retraite, intellectuellement alerte, a encore des choses à apporter au Congo sur la gestion de la "Res Publica", la cité, la polis, creuset de la "démos cratos" (pouvoir par le peuple).

Par ailleurs, ancien étudiant et collègue du professeur Georges Balandier, Côme Manckassa sait que le fait politique est ambigu parce que la soif de conserver le pouvoir et l’envie de lâcher prise sont intimement liées. On n’apprendra pas au lecteur de Machiavel (qu’il est) que le Prince est entouré de conseillers qui lui soufflent les meilleurs techniques de garder ledit pouvoir en sachant que ces techniques possèdent également les pires germes qui concourent à sa destruction.

De la sagesse

Au moment où Sassou consulte les « sages » de tout bord, celui-ci a bien fait de recevoir Côme Manckassa qui a passé son temps à étudier les sociétés lignagères face au marxisme (sujet de sa thèse d’Etat – 1988, Lille) et a pénétré leur mode de fonctionnement puis analysé leur façon de régler les conflits.

Selon Manckassa, nos sociétés lignagères sont structurées par la dichotomie « aîné/cadet » qui fonctionne comme des classes sociales dans la topique de Karl Marx.

Manckassa, plus âgé que Sassou (71 ans), a dû prodiguer des conseils de bon sens à son cadet, l’actuel homme fort du Congo, lors des entretiens brazzavillois.

Si le théoricien du social est pressenti pour participer au « dialogue national » qu’appelle de tous ses vœux Sassou (probablement du 15 au 25 juillet 2015 à Djambala), ce ne sera qu’un choix de bon sens. Ayant lu Platon, ayant fait des recherches comme l’écrivain Jean-Malonga dans sa région natale de la haute Madzia, personne ne peut remettre en cause son statut « d’intellectuel organique » dont parle Gramsci, nul ne peut douter que Côme Manckassa a acquis la sagesse, le « tsimuntu » de la philosophie bantoue. Il l’a suffisamment démontré dans ses écrits et dans ses conférences. C’est un sage, un vrai.

Reste à savoir si les jeunes cadres de son parti, entre autres, Roger Ndokolo, Théophile Mboukou-Balossa, sauront perpétuer cet héritage culturel fondé sur le compromis consensuel.

Thierry Oko

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