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Commission Nationale Electorale Indépendante

Le gouvernement congolais tente de désamorcer l’opposition

La remise officielle de la nouvelle carte nationale d’identité biométrique au couple présidentiel ce 20 avril, la refonte des listes électorales encours et l’adhésion du gouvernement à la mise en place d’une forme de Commission Electorale Indépendante, augurent la volonté du gouvernement à affronter des élections législatives libres et transparentes dans les délais fixés par la constitution. Seules zones d’ombre : le rôle et mission de la Commission Nationale Electorale Indépendante.

"Je suis un mensonge qui dit la vérité" [1] : le gouvernement congolais tente de frelater l’essence de la Commission Nationale Electorale Indépendante en proposant à l’Assemblée Nationale un projet de loi modifiant et complétant certaines dispositions de la loi N° 9-2001 du 2 décembre 2001. Au deuxième paragraphe de cet article 17 nouveau on peut lire : « la Commission nationale d’organisation des élections est un organe indépendant. » Dans le même article 17 nouveau concernant les missions de cet organe, on peut lire en effet qu’il a, entre autres, missions de : « vérifier les listes électorales et leur affichage », d’ « assurer le suivi des opérations électorales. »

D’après l’opposition, le gouvernement congolais veut restreindre le rôle de la Commission Nationale Electorale Indépendante à la vérification et au suivi, pendant qu’il s’arroge les prérogatives de la maîtrise du corps électoral et de l’organisation des élections. [2].

Que peut redouter le gouvernement d’une Commission Electorale véritablement indépendante ?

La controverse autour de l’organisation des législatives de 2007, est lisible à l’approche des échéances. Cette situation n’honore pas le Président de la République Denis Sassou Nguesso très impliqué dans la dynamique de transparence des élections à travers l’Afrique pendant son mandat à la tête de l’Union Africaine [3]. On sait que l’homme sait rebondir en politique, et qu’il n’a jamais eu peur de ses contradictions.

A ce propos, Denis Sassou Nguesso a été interpellé par Thystère-Tchicaya et Lékoundzou Itihi Ossetoumba, deux figures emblématiques de la politique congolaise. :« … Ou cette commission est indépendante ou elle ne l’est pas. Si elle est indépendante, alors laissons-là assumer toutes les prérogatives de cette indépendance à savoir la capacité de réaliser les opérations préélectorales et d’organiser les élections en ayant la maîtrise de toutes les phases de celle-ci. C’est dire que cette Commission doit avoir entre autres missions, d’identifier le corps électoral, (vérification et affichage des listes électorales, recensement des électeurs), établissement et distribution des cartes d’électeurs avec photo. »

Si l’opposition a opté pour la fermeté, par les déclarations pamphlétaires des députés RDPS Mavoungou-Zinga Mabio [4] et Julien Makoundi, aux côtés de Bernadette Thystère Tchicaya [5], lors d’un meeting à Hinda. Les populations se sont réjouies de cette première congolaise.
Nombre de membres du gouvernement espèrent se servir d’Otshombé comme tremplin politique. Rien n’est gagné pour ceux-ci, Sassou décidera en dernier ressort et en toute responsabilité selon ceux qui pour lui présenteront les meilleures garanties pour sa continuité au pouvoir. Nul doute qu’après qu’il ait jaugé les forces d’opposition des têtes vont tomber, seul moyen pour lui de maintenir un consensus autour de sa personnalité somme toute controversée dans le secret des antichambres y compris de son propre entourage.

Dans la même direction, Grégoire Léfouoba, Saturnin Okabé, respectivement leaders des partis politiques du PCR et du RDD ont dénoncé la mascarade des élections de 2002. L’opposition serre les coudes dans ce débat électoral intense, l’UPADS par la voix de son porte parole Mouanda Mpassi : « nous utiliserons tous les moyens que nous confère la loi pour contraindre le gouvernement à fléchir ».

Pour sa part, le gouvernement en artilleur balise les élections pour la majorité présidentielle. Le premier ministre Isidore Mvouba, est monté au créneau : « A partir du moment où le gouvernement de la république a introduit sur la table du parlement de notre pays, un projet de loi rectificatif de la loi électorale, qui fait de la commission électorale, une commission nationale électorale indépendante, on est donc a se demander lorsque certaines voix s’élèvent et parfois à l’extérieur de notre groupe, de quoi s’agit-il ?

Lorsque certaines personnalités osent faire des problèmes subalternes un problème crucial, de quoi s’agit-il ? Lorsque certains partis supposés agir pour la majorité présidentielle, du moins jusqu’à preuve du contraire osent tenir des discours hystériques de quoi s’agit-il ?... »

François Ibovi, Ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation, gère avec maestria la machine électorale en balançant des torpilles à l’opposition : « A partir du moment que le gouvernement approuve la commission électorale indépendante, l’introduit dans un texte de loi qui est la loi électorale, et toutes les conditions sont réunis pour que la commission soit indépendante et on s’entête à l’extérieur ça veut dire qu’on veut organiser un coup de force »

Menace ou intimidation ? En tout cas les congolais n’en perdent pas une miette. Alors que les banderoles pavoisent les avenues de Brazzaville et Pointe-Noire pour inviter les citoyens à s’inscrire sur des listes électorales, d’ores et déjà du 20 avril au 5 mai une révision extraordinaire des listes est organisée sous l’œil d’une commission électorale sensée être indépendante. C’est probablement un débat de clocher et de repositionnement à l’heure de vérité.

Le Congo va-t-il vivre un crash démocratique comme au Nigeria, au moment où des avancés significatives d’alternance politique sont observées au Bénin, Mali, Sénégal ? C’est l’occasion de s’interroger sur la prise en charge des politiques qui ont assumé des hautes fonctions au terme de leur mandat.

Parlons en, monsieur Jean-Pierre Thystère-Tchicaya, leader du RDPS et actuel président de l’Assemblée Nationale au terme de son mandat a joui pendant cinq ans des largesses d’un pacte de non destitution "exécutif-législatif" par définition malsain pour le fonctionnement normal d’une démocratie. Au risque de nous tromper il a été à la soupe. Aujourd’hui ses mandants parlent d’escrocs politiques. Qui est escroc politique et qui ne l’est pas dans cet imbroglio qui floue le peuple ? Cependant en tant que citoyen, hors disposition d’âge limite, il est en droit de briguer la magistrature suprême. Les jeux sont donc ouverts et seules les urnes trancheront.

Si Alpha Oumar Konaré et Abdou Diouf, respectivement ancien Président des Républiques du Mali et du Sénégal, après leur mandat présidentiel, s’en sont allés servir l’Afrique et le monde, cette perspective n’est pas à l’ordre du jour pour d’autres chef d’Etats africains qui se voient obligés de perpétuer leur règne avec des cocktails indigestes au risque de transformer la République en monarchie qui tait son nom.

Les constitutions, costumes taillés au départ aux mesures de leur porteur et sans cesse réajustés pour coller à l’embonpoint grandissant de leurs propriétaires ne ressemblent plus qu’à des loques informes. Elles mettent à mal les discours pseudo démocrates de dirigeant autocrates et pathétiques devant leur crainte de perdre leurs avantages et prérogatives. Qu’ils prennent garde, les africains ne veulent plus être ces roses qui croient que le jardinier ne peut pas mourir. La mondialisation de l’information édifie le peuple sur les pratiques anti-démocratiques de ses chefs, les ondes, le web, la télévision par satellite posent des garde fous à la mégalomanie des oligarques et aux risques de débordement et de basculement incontrôlables. Espérons que le Congo se tire de cette épreuve en épargnant au peuple les conséquences de la bêtise humaine.

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