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ESPERANCES

- L’Editorial de Benda Bika -

Il est de la légitimité reconnue à tout gouvernement de se fixer des étapes et de se donner des ambitions. Le gouvernement que Dirige Denis Sassou-Nguesso (puisqu’il n’a pas de Premier ministre) s’est donné un programme, sensé apporter une nouvelle espérance. Son contenu est beau, puisqu’il vise à apporter aux Congolais, d’ici sept ans, le soulagement aux maux dont ils ont peine à se débarrasser depuis au moins quarante ans.

En août 2009, le Congolais sera invité à faire le bilan : qu’a-t-il été fait ; que reste-t-il à faire, quelles sont les marques indélébiles de ma nouvelle espérance ? Je vois d’ici les sceptiques dodeliner de la tête, comme pour dire : qui y croit ? Et ils auront sans doute raison. Sept ans pour réduire les "fractures sociales", ramener la paix, ressusciter les infrastructures cela et d’autres défis encore à relever, reposant sur les mêmes talents, ça laisse un peu de doute.

Car les fondements du changement sur lequel devrait se baser cette espérance s’annoncent bien mal. Ne serait-ce que parce que, nous l’avons déjà écrit ici, plus le Congo change et plus il donne le sentiment de rester le même. Plus on nous annonce des changements et plus nous sommes obligés de constater qu’ils reposent sur les mêmes acteurs, les mêmes protagonistes. Donc les mêmes méthodes, et très certainement avec les mêmes résultats.

Gérard Bitsindou vient d’être nommé à la tête du Conseil constitutionnel. La décision était attendue. On peut tout reprocher à Sassou-Nguesso sauf sa constance et sa fidélité dans les amitiés nouées depuis des années. Gérard Bitsindou vient, dans l’Organigramme de la nomenklatura congolaise, se placer aux côtés d’Ambroise Noumazalaye (Sénat) ; Pierre-Thystère Tchikaya (Assemblée) ; Isidore Mvouba (Gouvernement ; premier des ministres) et toute la lignée des officiers de l’armée qui tiennent solidement un pan ou l’autre de la sécurité.

Une photo ainsi décrite aujourd’hui, en 2003, n’aurait pour différence d’avec une autre prise, par exemple en 1987, que la blancheur des tempes des protagonistes. Tous sont là, solides au poste, aux côtés de Denis Sassou Nguesso. Pour conduire une espérance donnée pour nouvelle. Pour annoncer un Congo de changements, mais bien ancré dans le statu quo.

Je ne tiens pas absolument la France pour un modèle à suivre. Non. En bien des choses j’aurais même quelques récriminations valables contre l’ancien colonisateur. Mais, regardons le « régime » Chirac. Et plaçons dans les casiers des responsabilités essentielles du corps de l’Etat les noms des acteurs qui, entre Chirac I et Chirac II, conduisent aujourd’hui la France. Nous y verrions des faces nouvelles, des talents nouveaux. Qui connaissait Raffarin, il y a dix ans et le « soupçonnait » de jouer un jour un rôle de fusible sérieux aux côtés de Chirac ? Pas moi, je l’avoue.

Au Congo, nous n’en sommes pas là. Nos acteurs sont immuables ; ne sont pas interchangeables. Peut-être aussi parce que nos opposants, invités à préparer l’alternance, se complaisent eux-mêmes dans une médiocrité figée pour des années. Ou parce qu’on les sait friables au moindre appel des sens : une cagnotte agitée et tous rentreraient dans le rang ! Comme si nous n’avions le choix qu’entre chercher à manger - "boukoutage !" - aux frais de l’Etat, et « brailler fort » pour y parvenir.

Le Combat des idées ; les propositions nouvelles ; les centres de réflexion ne fleurissent qu’aux abords des échéances électorales. Avant et après, nous travaillons à consolider le sur-place. Parler de démocratie dans ces conditions, c’est se faire violence ; trahir sa nature ; aller à contre-courant. La nouvelle espérance viendra-t-elle des espérances déçues, dûment constatées par une opinion qui sera capable de dire : les gogos, c’est fini ?

BB

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