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La Dérive des Continents 4 ème partie

Ce n’est pas que je veuille harceler qui que ce soit, les amis, mais dans la vie, il y a des promesses qu’il vaut mieux tenir. Il y a quelques jours, je vous annonçais la livraison de tous les détails sur la vie de Firmin, mon cousin et le plus parfait des hommes, raillé par certaines personnes aux intentions impures ; suspecté de vilènies par les jongleuses de la pomme ; traîné par le bout par des autresses en mal de venin : rien n’y fait. Je dois dire au monde qu’avant la naissance de Firmin, et 20 siècles après Jésus-Le-Christ (que la magnificence soit sur son nom trois fois béni, et à jamais) eh ! bien l’humanité se déclinait en avant et en après JC certes, mais aussi en 21è SPF, oui. Car nous sommes bien au 21è Siècle Pendant Firmin !

Beaucoup ne le savaient pas, mais c’est ainsi. Il y a le mètre comme unité de mesure ; le litre (pour le whisky) ; le millésime pour les vins ; le bordeaux pour la couleur de ce qui peut se boire, il y a Firmin pour mesurer l’intensité d’un siècle. Oui, c’est aussi simple que cela. Firmin est homme de paix ; il n’élève jamais la voix (sauf quand il crie) et il ne crie jamais quand il se concentre : des qualités rares, que l’humanité a placées dans une seule personne devenue la perle des hommes. Car, je ne sais pas si je vous l’ai dit : je ne connais qu’un seul défaut à Firmin, mon cousin : sa femme. Elle s’appelle Séverine. Mais les enfants à la maison l’appellent tous Vipérine, pour sa douceur à l’arsenic. Mais ça, c’est une autre affaire dont je vous parlerais quand les cerisiers seront en fleurs.

Donc, Firmin.

Que vous dire de cet homme sinon qu’il est le fils de tante Maguy. Fils unique né un certain mardi. Le soir. Il a pleuré, a fait pipi, a fait son rôt, a marché à quatre pattes, a fait sa varicelle, a eu sa bicyclette à roulettes puis sans roulettes ; a fait sa première communion, est entré au Lycée et y a commis une erreur monumentale, la seule de sa vie. C’est là en effet qu’il a rencontré Séverine, une lycéenne qui s’ennuyait de tout, même des maths dont Firmin était féru. Mon cousin, forcément, a voulu aider et a proposé des cours de rattrapage chez lui. Mais ce jour-là même, Séverine a pris un taxi (les fameux « Cent-cent », vous voyez ?). Et au moment de descendre, elle a claqué tellement la portière qu’elle n’a récolté que le aïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïïeeeeeeeeeeeeeeeee » strident d’une noble passagère qui s’apprêtait, elle aussi, à descendre au même arrêt. C’était Tante Maguy.

Bien sûr, la vipère a voulu aider, se rendre utile ; s’enquérir des dégâts collatéraux provoqués par sa rageuse façon de refermer les portières des « Cent-cent ». Ce jour là et les jours suivants, elle vint chez nous pour s’enquérir, paraît-il, de la convalescence de Tante Maguy. Mais en douce, les choses étaient compromises assez. Neuf mois plus tard, Firmin avait la corde au cou, qu’il traîne encore comme une pancarte sur une truite à l’étal. Tante Maguy n’a jamais serré la main de Séverine. Or vous savez combien ma tante est la plus douce des femmes. Si donc elle n’a jamais pu piffer Vipérine, c’est qu’il y avait de quoi, non ?
Dans tout cela, il n’y a que Firmin qui n’a pas compris. Sourd aux analyses logiques de ma tante. Imperméable aux démonstrations lumineuses de votre serviteur. Un marabout du quartier est passé par derrière, pour « laver » la parcelle. Un faiseur d’amulettes est ensuite venu, pour « blinder » le terrain. Puis ce fut le Père André-Marie, un saint homme, qui prit la Bible au bon endroit et récita les prières de délivrance. Le Pasteur compléta enfin l’armada : il entra en transes et médita à la mode pendulaire. Firmin, totalement aveugle, s’enfonçait. De sorte qu’il n’y avait que lui et la vipère le jour où ils allèrent voir le maire. Tante Maguy et moi n’avions pas trouvé de « Cent-cent » pour nous déplacer : tous avaient les portières arrachées !

C’est l’épisode le plus douloureux de la vie de Firmin ; la seule tache à son casier judiciaire. Une tache qui se prolonge aujourd’hui, car Vipérine n’est pas loin quand Firmin est près. Nous avons quand-même obtenu qu’elle se tienne loin de la Place de la République. « Chez Dédé », on est priés de tenir les animaux en laisse. Tentez donc de passer une laisse à une vipère, vous !

A part ça, le 3A se porte bien, et le Syndicat aussi. Vous voulez en savoir plus sur Firmin, mon cousin-le-plus-merveilleux-des-hommes ? Lisez-nous au prochain numéro.

BB

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