email

La Fifa remet les six points retranchés à l’équipe du Cameroun

[ Yaoundé - Cameroun ] ( 24/05/2004) Emmanuel Gustave Samnick

On continuera du reste longtemps à s’interroger sur le contexte particulier de cette affaire. La publication de la décision de la commission de discipline de la Fifa, à une semaine des élections prévues à la Fécafoot, était-elle innocente ? L’acharnement de la Fifa à sanctionner si sévèrement l’équipe du Cameroun tenait-il uniquement à la seule faute sur le port d’un maillot innovant mais interdit ? Plusieurs dessous de cette sombre affaire ne seront certainement pas dévoilés de si tôt. Ce dont on est sûr, c’est que rien ne sera plus jamais comme avant.

Tout est bien qui finit bien, est-on tenté de dire désormais, au sujet de la sombre affaire Fifa-Fécafoot qui a alimenté la chronique plus d’un mois durant, depuis le 16 avril dernier et la décision de la commission de discipline de la Fédération internationale de football association (Fifa) de retirer six points aux Lions indomptables dans les éliminatoires à venir de la Coupe du monde 2006.
C’est un Happy End parce que l’assemblée générale de la Fifa, organe suprême de cette institution, réunie le 21 mai dernier en session ordinaire à Paris, la capitale française où la Fifa fut créée il y a 100 ans, a décidé de lever cette sanction, assurément disproportionnée et incompréhensible, que la commission d’appel de la Fifa venait pourtant d’entériner mercredi 15 mai 2004.

Jeudi dernier, la Confédération africaine de football (Caf) avait enfin réagi dans cette affaire. Profitant de la présence de ses 52 membres à Paris à l’occasion de la commémoration du centenaire de la Fifa, elle a tenu une session extraordinaire de son assemblée générale qui a décidé de solliciter la grâce du président de la Fifa, au sujet de la sanction contre la Fédération camerounaise de football (Fécafoot). Or, le même jour, Joseph Sepp Blatter, le président de la Fifa, faisait savoir que les textes de la Fifa ne lui donnent pas la possibilité d’annuler une décision prise par les commissions techniques de l’instance faîtière du football mondial, lesquelles sont autonomes. Ne restait donc, comme ultime recours à l’équipe du Cameroun, que le Tribunal arbitral du sport dont le siège est à Lausanne en Suisse. Mais, à Paris où la Fifa célébrait son centenaire, la pression n’a pas du tout baissé.

Solidarité internationale

Du monde entier ont continué à déferler des cris d’indignation, face à ce qui était largement perçu comme une sanction injuste contre l’équipe du Cameroun de football. Vendredi donc, le président de la Fifa a décidé de poser le problème à l’assemblée générale. Au cours de la quelle Mohammed Iya, le président de la Fécafoot a pris la parole pour demander le soutien de ses pairs, et Roger Milla, footballeur emblématique du Cameroun et d’Afrique, a été entendu et applaudi. Dans les coulisses, la Fifpro, le syndicat mondial des joueurs dont le vice président de la Fécafoot David Mayebi est membre du conseil exécutif, avait mis la pression sur les associations nationales, menaçant de perturber le déroulement des différents championnats nationaux. Par ailleurs, le chef de l’Etat camerounais, sur le front diplomatique, avait commis Martin Belinga Eboutou pour aller négocier la levée de la sanction contre l’équipe du Cameroun auprès du président de la Fifa. Certaines sources laissent dire que Sepp Blatter aurait alors donné des assurances à l’envoyé spécial de Paul Biya.

S’il faut souligner pour s’en féliciter l’implication personnelle du président de la République dans ce dossier, il est difficile en revanche de conclure que c’est cette action qui a porté, puisque jeudi soir encore, le président de la Fifa, saisi par le comité exécutif de la Caf, annonçait officiellement qu’il ne peut pas remettre en cause un décision des commissions spécialisées de l’institution qu’il dirige. En fait, il suffisait que la question soit inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée générale extraordinaire de la Fifa. Et les 201 membres de la Fifa, qui ont vu tout le danger qu’il y avait à entériner la jurisprudence du 16 avril 2004, se sont dès lors montrés solidaires de la fédération camerounaise qui, véritablement, était lourdement et injustement punie dans cette affaire. Sanction pécuniaire, oui ; mais retrait des points, non !

Le 6 juin prochain contre le Bénin, le Cameroun entamera donc les éliminatoires couplées Coupe du monde/Coupe d’Afrique des nations 2006 sur les mêmes bases que ses quatre concurrents du groupe 5 zone Afrique, notamment la Côte d’Ivoire et l’Egypte. Ce n’est que justice ! Il restera maintenant aux Lions indomptables à prouver, sur le terrain, qu’ils méritent tout le soutien que le monde entier leur a apporté pendant ces cinq dernières semaines difficiles. Or, à ce niveau, avec les errements d’un sélectionneur controversé comme Winfried Schäfer, on est loin d’avoir toutes les garanties. Et il n’y aura plus aucune excuse désormais. La balle est revenue au centre.

La victoire de la raison

Depuis le 16 avril 2004, jour où la commission de discipline de la Fifa a décidé d’infliger le retrait de six points lors de prochaines éliminatoires de la Coupe du monde et de la Can 2006 à l’équipe nationale du Cameroun, pour avoir porté un maillot cousu avec le short pendant la dernière Can 2004 en Tunisie, nous avons vécu cette énième affaire Fifa-Cameroun comme une blague de mauvais goût. Quelle idée en effet, de pénaliser une équipe en lui donnant deux matches perdus avant même le début de la compétition, pour une faut commise lors d’un tournoi différent et antérieur ? Cette histoire ne tenait pas debout. L’arbitre du match querellé Cameroun-Nigeria du 8 février 2004 à Monastir, n’avait même pas mentionné sur la feuille de match que les Lions indomptables ont joué avec des maillots non conformes. Une mention qui figurait sur les feuilles des matches du premier tour Algérie-Cameroun et Cameroun-Zimbabwé. Juridiquement, les avocats commis par la Fécafoot et le gouvernement camerounais ont pu démontrer que le code de discipline de la Fifa ne prévoit pas de retrait de points en cas d’infraction aux lois du jeu, et même que la sanction s’applique à la compétition en cours et non à celle à venir. Mais, comme nous le disions dès le premier jour, l’affaire était plus diplomatique que juridique.

On continuera du reste longtemps à s’interroger sur le contexte particulier de cette affaire. La publication de la décision de la commission de discipline de la Fifa, à une semaine des élections prévues à la Fécafoot, était-elle innocente ? L’acharnement de la Fifa à sanctionner si sévèrement l’équipe du Cameroun tenait-il uniquement à la seule faute sur le port d’un maillot innovant mais interdit ? Plusieurs dessous de cette sombre affaire ne seront certainement pas dévoilés de si tôt. Ce dont on est sûr, c’est que rien ne sera plus jamais comme avant. Au-delà des personnes que l’affaire aura emportées, les Lions indomptables et leur équipementier, qu’il demeure Puma ou qu’il change, prendront désormais plus de précautions avant de jouer avec des équipements révolutionnaires. L’autre leçon de l’histoire, c’est que la raison a fini par triompher : la mobilisation internationale derrière l’équipe du Cameroun a été exemplaire. La seule conséquence triste que pourrait entraîner cette affaire, à notre sens, c’est la reprise à peine voilée de la gestion intégrale du football camerounais par le gouvernement. Lequel, non seulement n’est pas un modèle de bonne gouvernance, mais n’a jamais rien fait de durable en faveur de ce football qui était devenu son cache-sexe et qui lui a donné tant de lauriers depuis deux décennies.

Source : http://www.icicemac.com

NDLR : Le retrait de la sanction est tout aussi curieux que de l’avoir prise. Voyons les choses en face, la FIFA n’a rien trouvé à redire à l’utilisation de tenues sorties du musée pour la première mi-temps du dernier match France-Brésil. Le fait que le Cameroun ne soit pas sanctionné pour l’utilisation de leurs combinaisons veut donc forcément dire qu’il n’y avait pas faute, ou une sanction (plus légère que l’initiale) aurait du être prise. On doit donc forcément conclure que les équipes sont désormais libres de choisir la façon dont leurs joueurs seront vétus.
En fait beaucoup de bruit pour rien.

Laissez un commentaire
Les commentaires sont ouverts à tous. Ils font l'objet d'une modération après publication. Ils seront publiés dans leur intégralité ou supprimés s'ils sont jugés non conformes à la charte.

Recevez nos alertes

Recevez chaque matin dans votre boite mail, un condensé de l’actualité pour ne rien manquer.