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Le serment d’Hypocrite

La santé au Congo n’est qu’un problème d’argent. Les grosses huiles se font soigner en Europe quand les pauvres crèvent comme des chiens enragés, parce que les médecins oublient la règle essentielle de leur fonction : préserver la vie.
On entrait autrefois en médecine comme on entrait en sacerdoce, avec foi en la personne humaine et générosité. Ce temps est bien révolu. Si vous tombez en maladie ayez le porte feuille bien plein ou mourrez dans l’indifférence la plus totale de la part du corps médical.
"La Rue Meurt", encore elle, a publié l’article suivant.

Qui a vendu l’hôpital public

© " La Rue Meurt " N° 460 du 13 janvier 2004

Jadis havre de secours pour tous les malades, pauvres ou riches, l’hôpital public tend à revêtir aujourd’hui une autre signification drainant avec elle l’idée de ségrégation, surtout de manque de considération envers les pauvres. L’hôpital public exhale l’odeur de répugnance et de dégoût aux sans argent. La culture de l’argent a tellement submergé les bons sentiments si bien qu’avant toute consultation médicale, l’argent est la première carte d’invitation exigée par le médecin.

Tout accueil se jauge à l’aune du gabarit financier. Moins il pèse, plus les portes de la morgue sont grandement ouvertes. Hélas ! L’automédication, les tisanes, les médecins de l’ombre régentent la santé actuelle des plus pauvres. Au nom de l’argent, des vies nombreuses qui devraient être préservées sont fauchées dans bien de centres hospitaliers publics. La motivation du médecin s’aiguise mieux en donnant "quelque chose". La compassion et l’amour sont des données historiques révolues, l’argent décide tout. Le médecin mettra tout son savoir-faire, il diagnostiquera avec aisance et sérénité. La tendresse sera de mise. L’argent éveille la dextérité, la finesse à indiquer le produit pharmaceutique approprié pour vite recouvrer la santé. Le principe de non assistance à personne en danger ne s’applique ici sans susciter le rire narquois du médecin. L’argent est le symbole de la santé. Le contraire s’appelle insensibilité à votre douleur. L’hôpital public actuel est loin de sympathiser avec les pauvres. Ainsi, en proie au désespoir de son bien-aimé mourant au centre hospitalier de Talangaï, une femme manquant de maîtrise a mordu l’oreille gauche d’un médecin.

L’éthique médicale actuelle se substitue en immoralité. La vie et la dignité humaine sont désacralisées au grand regret du serment d’Hippocrate.

Au vrai, les indicateurs de santé révélés par l’OMS en 2002 pour la République du Congo sont loin d’émouvoir la sensibilité des décideurs politiques : 65% de la population n’ont pas accès aux soins de santé de qualité, 30% souffrent de faim, et 70 % vivent en dessous du seuil de la pauvreté.

Ce tableau sombre à l’avantage de repréciser la place belle du Congo parmi les pays les plus malheureux de la planète. Tout bien réfléchi, le congolais mérite-t-il ce sort ?

Absolument pas ! Consciemment, est-il normal d’exiger à une personne incapable d’avoir un dollar, un montant onéreux de consultation ? Le pays a-t-il des dirigeants dignes de ce nom ? S’il est quasi impossible de redresser certains esprits déjà corrompus par le mal sur le terrain de la conscience, on peut du moins solliciter d’eux le minimum de compassion. Les gouvernants doivent le peuple : l’argent du pétrole. Le peuple le réclame légitimement pour qu’il prenne en charge sa santé. Les recettes pétrolières donneront la bonne santé à tous.

Le budget de la défense du pays est estimé à des centaines de millions contre moins de 5 millions de dollars pour la santé. Le rapport du FNUAP du 12 septembre 2002, page 02 ; souscrit : "Entre 1984 et 2002, l’espérance de vie a diminué, passant de 52,4 ans à 49,6 ans pour les hommes et de 54,3 ans à 53,7 ans pour les femmes. L’extrême pauvreté, le VIH/SIDA, le paludisme, et l’absence du système de santé adapté sont au nombre des facteurs qui contribuent à son recul".

Le peuple pauvre pleure et meurt, faute d’argent ; alors que le pays en a en plénitude. Point n’est besoin d’expliquer au peuple les austérités des Programmes d’Ajustements Structurel (P.A.S) imposés par les institutions financières de Bretton Woods qui prévoient la privatisation même des hôpitaux publics. Rien n’empêchait à ceux qui les ont homologués de refuser. La Malaisie, la Chine ou l’Indochine en sont des exemples probants. Une classe politique qui ne peut garantir le bien-être social est une classe qui défend la "Nouvelle Désespérance".

Elie Sosthène Nganga

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