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Où l’on reparle de l’exécution de l’Opération Mouébara

Selon le site Opinion Internationale (31 juillet 2015), de lourds soupçons de crimes contre l’humanité pèsent sur le Président congolais Denis Sassou Nguesso coupable d’avoir fait couler beaucoup de sang dans son pays.

Monsieur Sassou, en tentant une fuite en avant avec son débat actuel sur la Constitution, a fini par être attrapé au collet. D’ailleurs selon Opinion Internationale, ce serait moins pour sa volonté arbitraire de s’accrocher au pouvoir dans son pays que pour ses présumés crimes contre l’humanité que l’actuel chef d’état congolais va se trouver dans de beaux draps d’ici peu.

Le Président congolais aurait commis ces forfaits entre 1999 et 2000. Dans ces années sombres ; Sassou, obsédé par sa reconquête du pouvoir perdu par les urnes face à Lissouba, a procédé à des bombardements de quartiers civils, des pillages, viols, enlèvements, tortures, etc. De très sales moments pour ses compatriotes ayant pour conséquences de les tenir à jamais à carreau. Ce fut le but recherché par le général Sassou.

Opération Mouébara
Dans un document signé de la présidence, le successeur de Lissouba aurait eu une idée machiavélique à savoir : « continuer de s’appuyer sur la force comme moyen essentiel de conservation du pouvoir ». C’est la moindre des choses qu’un dictateur utilise la terreur pour régner. Mais il est également normal qu’un châtiment accompagne tout crime.

Le document qualifié « secret défense » est intitulé « Opération Mouébara » (du nom de sa mère Emilienne Mouébara - étrange choix onomastique oedipien). Il s’agit d’un véritable plan d’extermination des populations hostiles à son retour en force en 1997.

Dès son arrivée, après le coup d’état, la dynamique du crime s’installe, méthodique, froide, sanglante, génocidaire. La consigne d’épuration ethnique dite « Mouébara » comporte une deuxième phase, testable avant la tentative de changement de la Constitution de 2002.

Sassou a une dent contre ceux qui l’on jeté dehors en 1992. Après avoir repris du service en 1997, l’homme fort du Congo peut se targuer d’avoir réussi l’application de la première partie du plan de terreur. Les exécutions sommaires, la tragédie du Beach de Brazzaville (+300 morts), la chasse à l’homme dans les quartiers sud de Brazzaville (des milliers de familles dispersées), le confinement des population du Sud dans les forêts sont là pour en témoigner.

Vingt ans de règne sans partage plus tard (1997-2015), le sang du tombeur de Lissouba (par putsch militaire) n’a fait qu’un tour lorsque la population intra et extra muros (i.e. la diaspora) a commencé à rappeler que son bail à la tête du pays prenait fin en 2016.

C’était sans compter avec « Emilienne Mouébara ».
Entre alors en ligne de compte la deuxième phase du plan macabre : construction de camps d’entrainement de mercenaires à Tchambitso, tracasseries policières dans les grandes villes quadrillées en permanence par des engins blindés, empoisonnements des adversaires par la tactique de l’assiette roumaine, enlèvements nocturnes de citoyens par des escadrons de la mort sous la direction du directeur général de la police, assauts militaires lancés en pleine ville (cas de la résidence privée du colonel Marcel Ntsourou), multiplications de discours sur la guerre et la paix à l’approche de l’échéance de 2016 avec l’item du sang comme mot-clef. (voilà pour le bâton).

Corruption financière de la population grâce au phénomène des « nguiri », (grand sac plastique ), charters gratuits de fans vers le Bourget en France, création tout azimut d’associations de soutien grassement subventionnées, clientélisme rural accordant crédit à des villageois qualifiés de sages, (voilà pour la carotte).

CPI

Fort heureusement, ce plan d’épuration ethnique qui vise particulièrement les départements sud de la République est aujourd’hui éventé par les organisations internationales des droits de l’homme.

Est-ce suffisant pour stopper l’exécution d’un plan échafaudé au nom de sa mère par un enfant devenu gâteux avec l’âge ? (D’ailleurs cet attachement maternel œdipien est surprenant dans un environnement parental patrilinéaire. Voilà qui pourrait confirmer l’hypothèse fallacieuse des origines ouestaf du sujet Sassou).

Le sang des autres

Sassou continue de promettre du sang et des larmes en 2015 et 2016. Le sang des autres est la seule chose qu’il agrée. Le peuple en a ras les patates. Des slogans comme « Tout sauf Sassou en 2016 » scandés par l’opinion nationale donnent le tournis au tyran congolais.

François Hollande au Bénin, Barack Obama à Addis-Abeba n’ont pas semblé calmer ses ardeurs d’ « oloma niama, mwana Mouébara ». Contre vents et marées il ne jure que par l’épitaphe inscrite au cimetière Konako sur la sépulture de mama Mouébara.

Et pourtant les disparitions du Beach, les exécutions extra-judiciaires, les destructions des villages, les exils des populations dans les forêts où famine et maladies les ont décimées sont des crimes condamnés par les article 10 et 11 de la Constitution congolaise. Mieux : ils tombent sous le coup de crimes contre l’humanité.

Décidé de se maintenir au pouvoir à tout prix, c’est pour Sassou, plus que jamais, le moment d’appliquer la seconde partie de l’Opération Mouébara. L’un des aspects du plan a porté sur la fabrique de nouvelles matrices démographiques donnant un sureffectif fictif aux régions nord du Congo. Jadis connues pour être des déserts humains, les terres septentrionales ont reçu la grâce de la multiplication selon l’opération Mouébara.

Le spectre de la guerre

Ce faisceau d’indices articulés par Mouébara a inquiété la presse française « Congo Brazzaville : l’ombre de la guerre civile sur un régime vermoulu » titre Rosa Moussaoui Vendredi, 31 Juillet, 2015 dans L’humanité.fr .

En effet le spectre de la guerre plane sur le Congo. Et c’est là que l’Opération Mouébara est à la fois freudienne et machiavélique. Comme le loup de La Fontaine décidé de bouffer l’innocent agneau, le dictateur congolais veut faire croire que c’est le peuple civil qui trouble la paix en exigeant mordicus le respect de la Constitution de 2002. En vérité le tyran congolais, parvenu au pouvoir par les armes, ne veut pas entendre parler d’élections régulières qui favorisent l’alternance et signent le glas de sa chute. Son « truc à lui » c’est le référendum dont, justement, la société civile ne veut pas entendre parler puisque le recensement démographique a été précisément falsifié par ses soins pour qu’il gagne cette épreuve à tous les coups.

« Ils descendront dans la rue, c’est à ce moment que je vais charger » préconise le concepteur de Mouébara qui sait comment piéger un animal qu’on veut capturer avec un filet de chasse. Il l’a clairement dit dans son idiome à Oyo, devant les kani (sages mbochis) réunis en plénière, en pleine nuit.

Bref, il y a du « Mouébara » dans le référendum (pour ne pas dire du mbéba). Beaucoup de Mouébara à n’en plus finir, du mbeba à revendre, par exemple au Burundi, par exemple en RCA. Il se peut même que les stratèges et autres tacticiens de l’opération ont fait du référendum le socle de la réussite du plan Mouébara.

Châtiment

La Cour Pénal Internationale et Le Commissariat aux Droits de L’Homme des Nations Unis ont affaire à deux documents criminels « Mouébara » paraphés par le général Noël Léonard Essongo et validés par Denis Sassou-Nguesso.

Ils ont été remis en mémoire grâce à une alerte du Dr Marcel Guitoukoulou du Congrès du peuple.

En plus de cette saisine par les ONG des Droits de L’Homme, on notera que tous les plans de bataille Mouébara envisagés par Sassou sont tout de même en train de prendre l’eau. Les consultations/Concertation de Juin ont été des pétards mouillés, le dialogue de Sibiti un bide et son référendum un pataquès.

Il faut dire aussi que Mouébara possède des pièces cousues de fil blanc et rose, une grande dose d’improvisation, une immense part d’arbitraire et une somme incroyable de culot ainsi que d’audace. C’est vrai que le florentin Machiavel dit que plus une ficelle est grosse, plus elle passe. C’est le cas de Sibiti où tout le monde (y compris Mouébara, surtout elle) était d’avis qu’il n’y aurait jamais de « consensus ». Dans son subconscient, Mouébara appelait de tous ses vœux cet échec de Sibiti, cette absence de consensus. Le fils de Mama Mouébara rêvait de ce fiasco pour passer à la seconde partie du piège : la consultation du « souverain primaire », c’est-à-dire l’ingurgitation par le peuple de la pilule amère du référendum que lui, Sassou, ne va pas perdre s’il l’organise. En Afrique Noire on n’organise pas une élection sans être sûre de la gagner.

Même si Sassou a juré sur la tombe de sa mère Emilienne Mouébara que celui qui prendrait son pouvoir n’était pas encore né, « L’homme des masses » est de plus en plus conscient qu’il est en train d’être pris dans la nasse du chasseur/pêcheur. Le filet qui lui servit de capturer le pouvoir voit ses mailles céder de toutes parts avec les défections de ses anciens nombreux rabatteurs. Même le lion Cecil protégé par l’ami Mugabe a été tué par un braconnier, compatriote d’Obama. A plus forte raison, un roi lâché par des généraux comme Mokoko. Moralité : tout à une fin. Le fils unique de Mouébara ne sait plus à quel saint se vouer. Cependant Mwana mama Mouébara ne veut pas freiner des deux pieds à mesure que l’échéance de 2016 approche. Sa philosophie : « Après-moi le déluge. »

Reste que le dernier mot revient à notre mère-patrie, le Congo, qui attend de tous ses vœux la Genèse du pays et non l’Apocalypse.

Thierry Oko

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