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Quand le Ministre Alain Moka se moqua de notre intelligence

A en croire Jean-Paul Pigasse, le Congo est un pays qui a repris sa place dans le concert des nations ainsi que le montre le nombre impressionnant de colloques, de conférenses, de congrès et de symposium qu’abrite Brazzaville sa capitale.

Comme pour donner raison à Pigasse, le site gouvernemental Congosite nous informe que :

"Alain Moka lance la campagne de sensibilisation sur la prévention des accidents de la route"

Très belle initiative, notamment quand on sait l’hécatombe que représentent les accidents de la route pour nos populations. Tenez par exemple, notre pays a failli perdre dans un accident de circulation l’un de nos super flics, Jean-François Ndengué qui n’a eu la vie sauve que grâce à une évacuation urgente à l’hôpital du Val de Grâce en France.

Comme de bien entendu, Alain Moka, Ministre de la Santé et de la Population s’est lancé ce 7 avril 2004, dans l’exercice préféré des apôtres de la Nouvelle Espérance : le discours.

Le thème dudit discours :
"sensibilisation sur la prévention des accidents de la route" .

L’auditoire :
 Le Représentant de l’OMS au Congo,
 Les Représentants des Agences du Système des Nations Unies,
 Le Représentant de l’Union Européenne,
 Le Député Maire de la ville de Brazzaville,
 Les Distingués invités...

Dans sa très brillante allocution, Monsieur le Ministre Moka en est arrivé aux trois constats suivants qui ont édifié son auditoire tant ils étaient remarquables en originalité. Il fallait vraiment y penser :

  1. "Les accidents de la route constituent un problème réel de santé publique. En effet, chaque année, les accidents de la route occasionnent des traumatismes qui tuent et handicapent à vie des milliers de personnes, sans distinction de sexe ni d’age.
  2. Les accidents de la route constituent un obstacle au développement. Dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire en particulier, les traumatismes dus aux accidents de la route constituent un lourd fardeau pour les familles, la société et pour l’économie nationale.
  3. La progression régulière des accidents de la route n’est ni une malédiction des temps modernes, encore moins une fatalité, celle-ci étant davantage liée à la persistance de nos mauvais comportements au volant."

Puis moment attendu de tous :
Les solutions à ce grave problème de société .

"Alors, que faire pour éviter, dans les mois et années à venir, des milliers de morts et d’handicapés à vie, enfants comme adultes, imputables aux accidents de la route ?"

Alors, que faire ?

"Au plan stratégique, les pouvoirs publics, les collectivités locales, les organisations non gouvernementales, la société civile, les partenaires au développement, les populations et autres acteurs, doivent œuvrer ensemble et s’impliquer davantage dans la sensibilisation et dans la promotion de la prévention des accidents de la route."

En effet, c’est une solution radicale et imparable :
il n’y a qu’à...

"C’est ici l’occasion d’interpeller les responsables des hôpitaux et des centres de santé sur la prise en charge des malades dans les services d’urgences et d’accueil. La Constitution de notre pays garantit l’égalité d’accès aux soins de santé. Les établissements publics de santé ne doivent pas occulter leur mission première : celle de sauver la vie des patients."

Alors ça c’est la meilleure. L’opinion publique est encore traumatisée par le meurtre d’une infirmière assassinée à bout portant par un parent devenu fou parce son fils de trois mois est mort à l’hôpital A. Cissé parce que laissé sans soins par le personnel médical. Aujourd’hui, dans un pays où la lenteur de la Justice est légendaire (cf. Affaire des Disparus du Beach) le parent tueur son exécution capitale dans le couloir de la mort après une instruction aussi rapide que suspecte. Dans un pays où on inaugure des hôpitaux avant qu’ils ne deviennent des hôpitaux, le Ministre ne manque pas de cynisme pour parler de soins pour tous.

"Pour cela, tout doit être fait pour que le malade en situation de détresse, bénéficie des premiers soins médicaux de qualité dès son arrivée, gestes salvateurs, sans aucune condition préalable, ni autres contraintes."

Au CHU de Brazzaville, un réseau de trafic de médicaments auquel participent médecins, infirmiers et aides-soignants rend l’accès aux soins problématique. le service d’urgence n’existe plus. Un réseau de porteurs au dos aide les malades à monter les escaliers pour pallier l’absence d’ascenseurs qui relient les cinq étages du vieux bâtiment.
Après cela, Alain Moka a le culot de dire devant ses invité que :

"Telle est la volonté du Gouvernement, et tout doit être mis en œuvre pour atteindre cet objectif"

L’ETAT s’est désengagé dans tous les domaines où la vie des citoyens est menacée. Cela n’a pas empêché notre Ministre de souligner : Mesdames messieurs

"C’est dire l’importance que revêt la présente cérémonie, tant il est de notre responsabilité collective de créer les conditions favorables à la sécurité routière, avec la participation de tous."

Je ne sais pas si le ministre était sous l’emprise d’une drogue dure quand il a osé affirmer :

"La rencontre de ce jour 7 avril 2004 est l’expression de notre volonté commune d’agir pour inverser la tendance actuelle des accidents de la route en République du Congo."

C’est vrai qu’au dernier Conseil de Ministre, le gouvernement a projeté bitumer des "segments" routiers, réhabiliter des pistes à travers le territoire national, boucher les nids de poule, réhabiliter les barrages électriques, en construire d’autres, donner de l’eau potable à tous. Le Ministre aurait dû, même par démagogie, s’engouffrer dans cette brèche et dire que désormais le nombre d’accidents de la circulation sera réduit puisque Sassou va construire des routes qui ne ressemblent pas à des mouroirs. Mais non, cela ne lui a même pas traversé l’esprit que l’éducation seule ne suffit pas pour diminuer le nombre de morts sur la route : il faut d’abord de bonnes artères de circulation.

Le Congo ne peut pas dire qu’il possède un réseau routier. On peut même dire qu’il n’y a pas de routes. Construire des moyens de communication n’a jamais été le souci de Sassou. Après l’accident de chemin de fer de Mindouli, la question d’un axe routier Brazzaville/Pointe-Noire a été remis sur les rails par l’opinion publique. Sans émouvoir le Ministre des Transports et de l’Aménagement du Territoire.

Pour montrer qu’il fait partie de la Nouvelle Espérance, le Ministre a conclu :

"C’est sur cette note d’espoir, que je déclare ouverte la campagne de sensibilisation de la population sur la prévention des accidents de la route. Je vous remercie."

Ce n’était pas la peine de "sensibiliser" la population, elle ressent assez bien dans sa chair la douleur de votre politique diabolique.

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