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Un griot pas comme les autres Tata BOUESSO

Créateur du walkimbgié-rock-music

Un nom étrange et un peu barbare pour une musique qui emprunte à divers styles : Le walla, le kimbwa, le ngiengié et le muntuta sans oublier le hard rock’n’roll. Tata Bouesso est certainement le griot le plus étonnant de sa génération. Guitariste inspiré et allumé comme les virtuoses anglais et américains des seventies tels Jimi Hendrix, Jimmy Page ou Stevie Ray Vaughan, il enflamme un public à priori peu connaisseur mais qui se prend bien vite au jeu et à sa voix éructant des textes de son cru en français comme dans les langues locales.

Approchant la quarantaine, cet universitaire, professeur d’anglais, a un long passé musical. Né Adolphe Bouesso, il se fait "Tata" (papa) pour marquer sa doyenneté auprès de jeunes musiciens émergeant dans le paysage sonore congolais. Il a été connu par le passé sous le nom de Ado Adopez quand il jouait en 83 avec Ben Koulou puis en 84 avec Nzongo Soul, puis Matrix de 91 à 97 du nom son premier groupe personnel dont les membres se sont évaporés dans la nature vaquant à leur propre destin. Il s’est alors fait griot pour garder son indépendance.

Il se produit dans d’invraisemblables tenues de scène combinant la marinière à son nom et des coiffes de raphia, martyrisant sa guitare pour notre plus grand plaisir. Tata Bouesso ne se départit jamais d’un grand sourire qui vous le rend sympathique au premier contact.

Ya Sanza : Tata Bouesso, je suis fou de ta chanson "Zenguélé-zenguélé" c’est je crois la première que j’ai entendue et je suis resté coincé dessus, que peux tu me dire de ce morceau ?

Tata Bouesso : "Zenguélé-zenguélé" veut dite "incroyable mais vrai", c’est une chanson chantée en lari, elle parle d’une prédiction que personne ne prend au sérieux, mais qui se réalise, et tout le monde regrette de ne pas y avoir cru.

YS : Dans "No mwan’wo", chantée en langue makwa du nord du congo, le rythme est particulièrement enlevé, tu y as mis une intro très rock alors que le reste de la chanson est très africaine c’est très caractéristique de ton style, parle m’en un peu.

TB : Ce rythme là est le tout craché du walkimbgié-rock où vous avez l’impression d’écouter du rock alors que le rythme est foncièrement ancré dans le walla et le ngiengié soutenu par le beat d’une percussion enlevée. Je veux d’ailleurs en profiter pour dire deux mots de Steve Sheridon Loufouki, qui tourne maintenant avec moi depuis six mois et qui s’est très bien adapté au style walkimbgié-rock.

YS : Tu n’as pas encore enregistré, comment expliques-tu qu’aucun producteur ne t’ait encore remarqué ?

TB : Ça, il faut avoir du flair parce que nos producteurs ne pensent qu’à la musique congolo-zaïroise, les griots n’ont pas la côte et les producteurs sont timorées. Le ndombolo est pour eux une valeur qui leur assure les ventes, ils ne prennent aucun risque et je compte sur des gens comme toi pour nous aider.

YS : Tu vas très bientôt passer sur scène au nganda "La Pétanque" à Pointe-Noire, penses-tu que de tels passages sont à même de favoriser ta carrière ?

TB : On dit souvent : "On n’allume pas une lampe pour la mettre sous la table" et "Qui a frotté sa cervelle avec celle des autres apprend", oui, je crois que tous les passages devant des publics divers ouvrent les frontières et vous font connaître.

YS : La scène congolaise est bourrée de gens qui se concurrencent comme de vrais guerriers, toi par contre réalises avec quelques autres artistes une synergie qui fait qu’on te voit chanter, je dirais même t’amuser, en spectacle avec des gens comme Kaly Djatou et Achille Mouébo, seriez vous les initiateurs d’une nouvelle mentalité dans la culture musicale congolaise ?

TB : A quoi sert-il de se bouffer le nez alors que nous sommes tous dans la même galère. Nous avons tous nos particularités qui font que chacun peut trouver sa place, il est vrai que les artistes qui sont en rivalité font la même musique et que leurs productions sont souvent interchangeables. Ce n’est pas le cas avec les gens que tu cites qui ont tous leur style et leur originalité. Quand tu organises ton propre concert seul, inviter d’autres artistes vient donner un autre relief, ça te permet aussi de mesurer ta popularité. Lors de mon dernier concert au CCE Kaly est venu me soutenir, c’était beau et fraternel, nous devons regrouper nos énergies, la qualité vient de la diversité.

YS : As-tu des contacts avec le CCF pour passer à la "Pagode" ?

TB : Dernièrement je suis allé voir le spectacle de Zac Maikhan, j’ai trouvé que sa scène était pleine d’artistes percussionnistes, batteur, clavier, cuivres, basse et chœurs en plus de lui-même. Une autre fois j’ai assisté au spectacle de Prince Mpoutou, de Brice Banda Mitzingou et leur scène est toujours très fournie de musiciens. Quand je m’y compare, qui ne tourne qu’avec un seul musicien, je ne vois pas comment je pourrais avoir la prétention de rivaliser avec de tels artistes. Franchement ça me donne des complexes pour aller me proposer au CCF.

YS : Tu sais Tata, les grands artistes sont à même de se passer "d’emballage", les grands chanteurs réalistes européens passaient seuls ou presque je pourrais te citer Brassens, Brel ou Barbara. Si tu n’oses pas te proposer, on ne t’offrira rien. Fonce.

Contacts :
Email : [email protected]
Tel : (Joël Nkounkou) (242) 39 28 15

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