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La fuite des cerveaux nuit à la lutte contre le sida en Afrique

BANGKOK (Reuters) - Thu July 15, 2004

De très nombreux médecins et infirmières quittent l’Afrique pour chercher à l’étranger de meilleurs salaires, ce qui provoque une "fuite des cerveaux" préjudiciable à la lutte contre le sida, ont déclaré des médecins américains.

L’Afrique, particulièrement touchée par la pandémie, qui a déjà fait 20 millions de morts dans le monde, doit recruter des dizaines de milliers de professionnels de santé si elle veut pouvoir fournir des médicaments à tous ceux qui en ont besoin.

Mais pour le moment, de nombreux médecins africains, ainsi que des infirmières, partent chercher du travail dans les pays développés, notamment en Grande-Bretagne où les services de santé sont confrontés à d’importants problèmes d’effectifs.

"Nous sommes face à un terrible paradoxe : comment est-il possible d’espérer répondre aux besoins des malades du sida alors que la main d’oeuvre décline et que l’on s’attend à ce qu’elle décline de plus en plus", a déclaré à la presse Leonard Rubinstein, directeur de l’association Médecins pour les droits de l’homme.

Dans un rapport publié à l’occasion de la 15e conférence internationale sur le sida qui se tient actuellement à Bangkok, en Thaïlande, Rubinstein demande que le recrutement de professionnels de santé originaires d’Afrique sub-saharienne soit soumis à des restrictions.

Il exhorte également les pays donateurs à financer des hausses de salaires en Afrique pour les professionnels du secteur.

"UN MANQUE DRAMATIQUE DE PROFESSIONNELS"

En décembre dernier, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait fixé comme objectif de permettre à trois millions de personnes vivant dans des pays en développement d’avoir accès aux médicaments antirétroviraux d’ici fin 2005. Aujourd’hui, seuls 440.000 malades en bénéficient, dont 150.000 en Afrique.

Le problème du diagnostic, du traitement et de la surveillance des malades du sida en Afrique a été l’un des thèmes majeurs de la conférence de Bangkok et a encore été souligné mercredi par Randall Tobias, qui dirige la lutte contre la maladie aux Etats-Unis.

"Dans des endroits comme l’Afrique, les Caraïbes ou l’Asie du Sud-Est, il y a un manque dramatique de professionnels de santé et d’infrastructures", a-t-il dit.

"Tous les médicaments anti-sida du monde ne serviront à rien s’ils restent dans des entrepôts."

En Afrique du Sud, qui compte le nombre de malades le plus élevé au monde, 32.000 postes d’infirmiers sont vacants. Au Malawi, seuls 28% des postes d’infirmiers étaient pourvus en 2003, contre 47% en 1998. En Zambie, seuls 50 des 600 médecins formés depuis l’indépendance de 1964 vivent toujours dans le pays.

La plupart de ces professionnels, anglophones, sont partis en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, au Canada, en Australie ou en Nouvelle-Zélande à la recherche d’un travail mieux rémunéré.

"Ils s’en vont au moment où le plan adopté par l’OMS nécessite une hausse massive des effectifs dans le domaine des soins de santé. Ces effectifs doivent être doublés, parfois triplés, parfois même quadruplés", a déclaré Rubinstein.

Plus des trois quarts des pays d’Afrique sub-saharienne sont en dessous du seuil minimum de 20 médecins pour 100.000 habitants fixé par l’OMS.

Dans 13 pays, on compte cinq, ou moins de cinq médecins pour 100.000 habitants.

par Ben Hirschler

http://www.reuters.fr/

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