Incapable de mettre les accusés au pied du mur en les "cuisinant" comme il se doit, le tribunal veut focaliser son attention sur l’ancien ministre Bonaventure Mbaya et Mgr Ernest Kombo cités arbitrairement par Sita Bantsiri, un accusé spécialiste de la diversion qui, au passage, n’a pas hésité de "mouiller" un mort : le juge Nzouala. Compte-rendu de la neuvième journée.

Acte 9 : Brazzaville le 29 juillet 2005. Chambre criminelle.

Pendant un peu plus de cinq heures, la cour a continué sur la lancéz des interrogatoires des accusés, délinquants supposés responsables de génocide de plus de trois cent cinquante congolais en provenance de Kinshasa entre avril et juin 1999.

Les premiers interrogés, ce 28 juillet, Jean Eve Alakoua (commissaire spécial de la police au beach de Brazzaville à l’époque des faits) et Marcel Tsourou (chef des renseignements militaires au moment de ces disparitions) continuent à nier les crimes qui leur sont reprochés. Le premier expose son homologue du port de l’ATC, où s’était faite la plus grande partie des débarquements. Le second se justifie d’être occupé par la guerre (le champ de bataille) qui opposait les miliciens Ninjas aux forces loyales et de n’être pas directement à la tête du service des renseignements militaires où les réfugiés suspectés d’avoir pris part aux affrontements étaient conduits.

Le même scénario s’est reproduit hier. En bloc, les accusés Jean-François Ndengué et Vincent Vital Bakana ont nié leur implication à cette affaire. « Vous appeler un général au tribunal, où est donc le respect ? » déclare Guy Pierre Garcia, très nerveux et colérique, qui demande toujours la raison de sa comparution puis qu’au moment des faits, il dirigeait un bataillon de militaires dans le la région du Pool. Bouassa Samuel de la garde républicaine estime qu’il se trouve dans cette cour par erreur, car dans la plainte déposée au tribunal par Marcel Ntouanga il était fait mention d’un certain Mboussa, lui aussi sous les ordres de Blaise Adoua. Ce qui est surprenant dans ces deux derniers cas est le fait qu’aucune question n’a été posée à ces deux accusés de la part des avocats des parties civiles.

L’accusé Dieudonné Yvon Sita Bantsiri, ancien milicien Ninjas, qualification qu’il continue de nier, a révélé avoir connu trois personnes, supposées disparues, mais qui sont encore vivantes et accompliraient des actes de commerce à Kinshasa, en R.D. Congo. Il a ajouté avoir été contacté par l’ancien ministre Bonaventure Mbaya afin de faire échec au procès des Disparus du Beach.

Ce procès de plus en plus insipide, serait certainement assaisonné lors de la comparution de l’accusé Blaise Adoua, commandant de la garde républicaine au moment des faits, dont le nom est régulièrement cité dans les dépositions à charges des ayant droits des disparus du Beach. Prenons rendez-vous ce 1er août 2005 à 14h30 au tribunal correctionnel de Brazzaville.

Les méandres de l’affaire du Beach : Bonaventure Mbaya et Ernest Kombo cités par un accusé

Sur le fond des déclarations, la vedette de cette neuvième journée de l’affaire des Disparus du Beach, sans contestation était l’accusé Yvon Sita Bantsiri et dans une moindre mesure Vital Bakana. Ce dernier regretta vivement l’absence de Me Hervé Ambroise Malonga auquel, dit-il, il aurait des choses à rappeler en appelant la population congolaise à témoin, devant leur transistor et poste téléviseur.

L’accusé Sita Bantsiri, en lingala, a fait des révélations plus que compromettantes pour les cadres du département du Pool, lesquels selon les déclarations de ce dernier soutiennent les parents des Disparus. Il a avoué avoir été menacé par M. Nzouala, de son vivant, le doyen des juges. Chargé de l’instruction de cette affaire, l’ancien procureur de la République voulait démontrer preuve à l’appui l’implication de M. Sassou Nguesso dans ces disparitions.

D’après toujours les déclarations de cet accusé, président de l’association « les Amis de Sassou », il certifie avoir été contacté -en compagnie d’un autre accusé, Vital Bakana- par M. Bonaventure Mbaya quatre jours avant l’ouverture du procès dans lequel il est accusé. L’ancien ministre lui aurait proposé de quitter le pays en échange de quelques promesses. Bonaventure Mbaya, ancien ministre d’André Milongo, aurait suggéré une rencontre avec lui, Sita Bantsiri. A cette réunion confie Sita Bantsiri, devaient participer Mgr Ernest Kombo et Me Hervé Malonga. Stupéfaction générale des auditeurs du prétoire quand Bantsiri sort ce témoignage.

Le juge et les assesseurs ont appelé à une confrontation entre l’accusé Sita Bantsiri et Bonaventure Mbaya.

Keila Samuel
Brazzaville, le 30 juillet 2005.